Issaka Sidibé après son élection à la tête de l’Assemblée nationale a laissé entendre qu’ »en tant que représentants du peuple malien, ensemble nous veillerons à ce que notre Assemblée ne soit pas une chambre d’enregistrement ». Il sera jugé à l’heure du bilan.
En prenant en charge les destinées de l’auguste institution, le président Sidibé a dit à ses collègues que « présider notre Assemblée nationale du Mali, en ce moment important de l’histoire de notre pays constitue un immense honneur, mais aussi et surtout un redoutable challenge. Ce challenge, j’entends le relever avec vous tous, car convaincu que nous sommes tous dépositaires de la souveraineté du peuple malien. Notre peuple nous observe et nous demande un comportement honorable et digne ».
Il a rendu grâce à Dieu par le fait que le Mali soit en train de sortir de la grave crise avant d’appeler le Parlement à servir l’intérêt général, rien d’autre. « C’est le moment d’être à l’écoute de notre peuple, de rendre compte à nos mandants. Nous allons écrire ensemble une nouvelle page de l’histoire, de la longue et riche histoire parlementaire de notre pays. Cette page, nous devons faire en sorte qu’elle soit écrite en lettres d’or dans l’histoire de notre Parlement. Il nous faut œuvrer sans relâche à la réconciliation entre les filles et les fils du Mali, quelle que soit leur appartenance politique, religieuse, ethnique… Nous devons être l’Assemblée nationale de toutes les Maliennes et de tous les Maliens.
Nous devons tous à ce moment délicat de l’histoire de notre pays apporter notre contribution à l’œuvre de refondation de notre Etat. Œuvre entreprise par Son Excellence Ibrahim Boubacar Kéita, président de la République du Mali, homme d’Etat, homme de conviction, homme de défis ». Le chef de l’institution parlementaire a déjà donné le ton par rapport à la vocation de la nouvelle Assemblée nationale. « En tant que représentants du peuple malien, ensemble nous veillerons à ce que notre Assemblée ne soit pas une chambre d’enregistrement. Le chef de l’Etat ne le conçoit pas ainsi ».
Issaka Sidibé qui est aussi le beau-père de Karim Kéita, le fils d’IBK a ajouté qu’il s’efforcerait au cours de cette législature à poursuivre, les réformes entamées au niveau du travail parlementaire en y apportant plus de clarté et en faisant de sortes que le personnel parlementaire soit mieux formé plus sécurisé. « Cela n’ira pas sans grincement de dents et sans frictions, mais c’est le prix à payer pour réussir des réformes majeures sur la durée, nous ne pouvons pas nous y dérober ».
Voilà un beau discours sauf que nos dirigeants nous ont toujours habitués au discours mais pas aux actes. Si comme l’a dit le nouveau tenant du perchoir l’Assemblée nationale pouvait cesser d’être une chambre d’enregistrement et relever tous ces défis dont parle Issaka Sidibé !
Dans tous les cas, contrairement aux législatures passées, le futur patron des députés devra se mettre au-dessus de la mêlée, des considérations mesquines et de la politique politicienne pour ne considérer que l’intérêt supérieur de la nation.
Dans tous les cas, le peuple électeur du Mali veut savoir si le changement tant vanté par le président de la République sera effectif au niveau de toutes les institutions de la République, en particulier le Parlement qui contrôle l’action gouvernementale. Il faut croire que l’Assemblée nationale est réellement le premier contre-pouvoir dans une démocratie réelle.
Son bon fonctionnement découle en partie de la personnalité du titulaire du perchoir. Avec 66 députés à son compteur, il est évident que le nouveau patron de l’hémicycle sortira des rangs du Rassemblement pour le Mali (RPM).
Il faudrait que l’Assemblée nationale retrouve sa vocation première qui est le débat responsable duquel jaillit la lumière. Le titulaire du perchoir devra aussi mettre un point d’honneur à instaurer une discipline de fer pour que les élus participent pleinement à tous les travaux. Les questions orales et les interpellations du gouvernement sur des sujets de préoccupation majeure conforteraient l’assise du Parlement national.
Co responsable du drame malien
Jusque-là le pouvoir législatif, malheureusement, s’est révélé un faire-valoir en accompagnant tous les régimes de l’ère démocratique dans leurs turpitudes. Il est l’accusé n°2 de la déchéance dans laquelle notre pays s’était retrouvé. Et dire que le nouveau président de la République vient de cette institution dont il a été le président de 2002 à 2007 !
IBK veut sonner le renouveau dans la gouvernance institutionnelle dans notre pays, mais acceptera-t-il que le Parlement, au sein duquel son parti est majoritaire sans avoir la majorité absolue, soit celui que le peuple attend, c’est-à-dire qui dira non au gouvernement s’il le faut ?
Une chose est de chanter le changement, mais une autre chose est d’en accepter les principes. Beaucoup de présidents africains évoquent l’indépendance dans les relations entre les institutions, mais ne l’acceptent pas dans la pratique surtout au niveau des parlements qui sont transformés en caisses de résonance pour la seule cause du prince du jour. C’est à ce spectacle déshonorant auquel nous assistions ces 20 dernières années dans notre pays et qu’on n’aimerait voir relégué dans les oubliettes de l’Histoire.
Ce serait dommageable qu’après toute la tragédie que notre pays a vécue, par l’irresponsabilité politique au Parlement, qu’on se retrouve encore avec une Assemblée nationale légataire de pratiques décriées.
La nouvelle Assemblée nationale devra alors marquer son territoire en suivant la voie du peuple et non celle du prince. Elle ne doit aucunement être l’Assemblée nationale de nos habitudes, mais celle de nos besoins.
Abdoulaye Diakité