Lors de son dernier discours solennel à la Nation, le 16 juillet, le Premier ministre Cheick Modibo Diarra s’est adjugé un vernis démocratique, en évoquant le dialogue instauré avec la classe politique et la société civile par « la mise en place d’un cadre de concertation, le dialogue avec la classe politique ».
Il informait par la même occasion de l’élaboration par le Gouvernement de sa feuille de route qu’il venait de transmettre le 16 juillet à l’Assemblée nationale, et que le Ministre d’Etat, ministre des Affaires Etrangères et de la Coopération Internationale venait de porter à la connaissance du Corps diplomatique. Il s’est précipité, aussi, d’aller lui-même en remettre copie au médiateur de la Cédéao au Burkina Faso. Mais le Premier ministre ne s’est pas douté qu’il pouvait au même moment susciter la colère de la classe politique par le fait que jusque là, en tant que telle, les politiques n’ont pas été associés à ce processus. Certes il s’agit d’un document gouvernemental, et les partis représentés à l’Assemblée nationale ont connaissance à travers les travaux parlementaires, mais cette période a une particularité. Il s’agit de la transition qui a ses exigences et il faut en tenir compte.
Les raisons qui ont prévalu pour l’ouverture du dialogue politique à travers le Conseil de la République, et pour le gouvernement d’union nationale en gestation, doivent continuer de prévaloir pour la prise des grandes décisions de la transition. N’est-ce pas ce qui explique que dans les conclusions et recommandations qui ont sanctionné leur rencontre du 18 juillet dernier, (voire communiqué en page 4) l’Alliance des Démocrates Patriotes pour la Sortie de crise (ADPS) et le Front Uni pour la Sauvegarde de la Démocratie et de la République (FDR) ont convenu de « conjuguer leurs efforts pour l’élaboration d’une feuille de route pour la conduite de la Transition », alors qu’on sait que le Premier ministre avait annoncé le 16 juillet la transmission de sa feuille de route au Parlement. Officiellement les partis n’ont pas été saisis alors que l’antidote de cette période transitoire semble être désormais le processus participatif.
Ces deux regroupements sont pour la formation d’un Gouvernement d’Union Nationale avant le 31 juillet 2012 suivant les conclusions du mini Sommet du groupe de contact de la Cédéao tenu à Ouagadougou le samedi 07 juillet 2012. Cependant avec l’exigence que ce gouvernement doit être formé par le Président de la Transition après consultation des Forces Vives de la Nation. Or Dioncounda Traoré est absent du Mali depuis deux mois. C’est à ce juste titre que cette partie de la classe politique malienne demande le retour du Président de la Transition dans les meilleurs délais, tout en menant la réflexion « sur le rôle des Forces de la Cédéao dans la sécurisation des organes de la Transition ».
Mais ici on évoque avec insistance « le principe d’appropriation nationale et démocratique » de tout le processus de la transition et de sortie de crise. Il s’agit d’impliquer toutes les parties prenantes et dans un contexte démocratique. Cependant en ce qui concerne la sécurisation des organes de la Transition, c’est intriguant quand on invoque la création d’un corps d’élite de 1 200 éléments relevant du Premier ministre, alors qu’on sait que le Chef suprême des Armées est le Président de la République. A-t-on besoin de ça ? Il ne faut jamais jeter le bébé avec l’eau du bain, car notre armée est vaillante et contient des militaires dignes de leur rang, même s’il y a de mauvaises graines qui jettent le discrédit sur leur corps. Faut-il créer un corps d’élite pour les organes de la transition, quand on sait que les populations du nord ne cherchent qu’à être libérées ? Il faut la concertation à tous points de vue et avoir encore confiance à nos forces armées. Même s’il faut au besoin un appui de la Cédéao et d’autres partenaires qui ne sont pas de la sous-région, en équipements et en troupes. Pour une réussite de la transition, il faut un vrai dialogue politique qui est d’ailleurs une conditionnalité des partenaires techniques et financiers pour reprendre les financements politiques et qui reste encore un vœu pieux quand les politiques en sont encore à s’interroger sur les contours opérationnels du Conseil de la République.