Exceptés quelques rares commerçants détaillants qui peinent encore à se conformer dispositions du cahier des charges, les prix des denrées de première nécessité se maintiennent à un niveau relativement stable en ce mois béni de Ramadan, et cela depuis le début de l’approvisionnement des marchés dans le cadre des exonérations accordées par le gouvernement sur 120 000 tonnes de riz et 85 000 tonnes de sucre.
Du moins en ce qui concerne le riz à 25% et à 100% brisure non parfumé et le sucre. C’est la conclusion qu’on peut tirer désormais après la tournée du ministre en charge de la question dans les magasins de stockage et sur certains marchés à Bamako et dans les capitales régionales.
En dépit de la situation économique très difficile dans laquelle se trouve notre pays après le retrait des bailleurs de fonds consécutif au coup de force du 22 mars dernier, l’actuelle équipe gouvernementale s’active pour soulager les consommateurs. En prélude à la période de soudure et au mois béni de Ramadan, mois de forte consommation des produits de première nécessité qui vient de commencer, le gouvernement du Mali a accordé une exonération totale sur 120 000 tonnes de riz et 85 000 tonnes de sucre, pour approvisionner les marchés et permettre aux consommateurs d’accéder à ces produits à un coût abordable. Comment les opérateurs économiques de notre pays ont-ils accueilli la mesure? Le consommateur moyen ressent-il l’effet de ces exonérations au quotidien? Quelles sont les innovations apportées à la mesure cette année? 22 Septembre a mené son enquête.
Le déficit pluviométrique de l’an dernier a fortement impacté la campagne agricole 2011-2012. Cette situation s’est traduite par un déficit céréalier dans notre pays. Face à ce constat, le gouvernement a pris des mesures incitatives pour renforcer l’offre sur le marché, afin de tirer les prix vers le bas et de permettre aux consommateurs moyens de pouvoir accéder à ces produits à des coûts abordables. C’est pourquoi il a accordé une exonération totale sur 120 000 tonnes de riz et 85 000 tonnes de sucre. Cette mesure, qui est en vigueur depuis le 8 mai 2012, coûtera à l’Etat plusieurs centaines de millions de francs de manque à gagner. Elle concerne le riz de large consommation dans notre pays, notamment les 25% de brisure et 100% brisure non parfumé.
En ce qui concerne le sucre, il ne s’agit pas d’une nouvelle exonération, selon le ministre des Mines, du Commerce et de l’Industrie. Me Ahmadou Touré précise que qu’il s’agit d’une taxe conjoncturelle à l’importation. Cette taxe, faut-il le signaler, qui existait déjà, n’a jamais fait l’objet d’application au niveau du cordon douanier. Mais, malgré le fait que cette exonération soit maintenue, le gouvernement a pu négocier avec les importateurs et les opérateurs économiques du secteur une baisse sensible du prix du sucre sur le marché. Si, au départ, la mesure avait du mal à se concrétiser sur le terrain, force est de reconnaitre aujourd’hui que le prix a considérablement chuté. Il oscille de nos jours entre 498 et 540 FCFA à Mopti et sur certains marchés de la capitale. Quant à la variété de riz sur laquelle porte l’exonération, à savoir le riz brisure de 25% et de 100% non parfumé, il est cédé au prix unitaire de 315 FCFA en gros, pour être revendu au détail à 340 FCFA.
Pour le respect strict du cahier de charge sur le terrain, on a mis les bouchées doubles du côté de la Direction Nationale du Commerce et de la Concurrence (DNCC). «Nous avons nos agents sur le terrain. Chaque jour, 24 agents sillonnent les marchés pour s’assurer de l’effectivité de ces prix. Seulement, la difficulté tient au fait que, des fois, les gens ne savent pas faire la différence entre les catégories de riz qui sont concernées par les exonérations et qui doivent obéir à l’application des 340 CFA au détail. J’ai donné des instructions afin que, si les agents sur le terrain sont débordés, on s’active à déployer les autres agents de la DNCC, pour les renforcer. Le ministre nous a aussi assuré qu’en cas de difficultés il pouvait nous faire assister par d’autres structures, pour toujours nous renforcer, afin que ces prix soient pratiqués. Nous sommes en rapport avec les Présidents des marchés et les Présidents des associations des détaillants. Il y a tout cet arsenal qui veille sur l’application des prix. Mais, encore une fois, il faut que les gens comprennent les catégories de riz qui sont concernées par les exonérations» nous a déclaré Mahamane Ansoumane Touré, Directeur National du Commerce et de la Concurrence.
Les innovations apportées cette année
A la différence des années précédentes, le gouvernement a renoncé en 2012 à 10% de droits de douane et 18% de droits pour la Taxe sur la Valeur Ajoutée. Les 120 000 tonnes de riz concernent les consommations des mois de juin et juillet, plus une consommation supplémentaire d’un mois pour faire face au mois de Ramadan, durant lequel la demande est toujours plus élevée. Si, au cours des autres années, ces exonérations étaient accordées seulement à une catégorie de commerçants, cette année la mesure est ouverte à tous les importateurs qui remplissent les conditions définies par la loi.
Il s’agit de ceux bénéficiant de numéros d’identification au Registre du Commerce et du Crédit Mobilier. A la date du 19 juillet, 121 cahiers de charges avaient été signés par 59 opérateurs pour le riz et 62 cahiers de charges pour le sucre. En plus de ces dispositions, le cahier de charges des exonérations de cette année ne fixe pas de limitation aux commerçants. Ce qui est limité, c’est la quantité de riz et de sucre à importer. A savoir, 120 000 tonnes de riz et les 85 000 tonnes de sucre. C’est dire donc que chaque importateur est libre de s’engager jusqu’à concurrence de ses moyens.
A la même date du 19 juillet, les opérateurs économiques signataires du cahier de charges ont pu importer 103 963 tonnes de riz, soit un taux de réalisation de 86,64% et 34 629 tonnes de sucre, soit un taux de 40,74%. Ces taux sont l’œuvre de 22 opérateurs pour le riz et de 15 opérateurs pour le sucre. Au Groupement des commerçants, dirigé par Bakorè Sylla, tout en saluant la mesure, on se dit déterminé à jouer sa partition, en ces moments difficiles pour notre pays. Du côté du Grand Distributeur de Céréales au Mali (GDCM), on salue aussi la mesure. La société est à pied d’œuvre pour l’acheminement de la quantité de riz et de sucre pour laquelle elle s’est engagée dans le cahier de charges, soit 60 000 tonnes de riz et 45 000 tonnes de sucre d’ici la date butoir.
Pour son Président Directeur Général, Modibo Keïta, le GDCM dispose encore de quantités importantes de stocks au port d’Abidjan. Déjà, dans certains de ses magasins à l’intérieur du pays, comme à Sikasso et Mopti, le sucre et le riz importés sont vendus en deçà du prix fixé dans le cahier de charges. Toutefois, selon Ousmane Keïta, Directeur Général de la société, GDCM ne dispose pas d’assez de camions pour couvrir les besoins.
A la Société de Distribution de Marques, on soutient ne pas avoir de difficultés d’acheminement, contrairement à GDCM. Selon Joseph Diarra, responsable commercial, la SODIMA va importer les 20 000 tonnes de riz et les 15 000 tonnes de sucre sur lesquelles elle s’est engagée. «Nous avons bien voulu prendre part à cette opération, qui répond à un besoin réel du pays. Nous avons déjà acheminé sur le pays 15 000 tonnes de sucre et 2 000 tonnes de riz. Des dispositions ont été prises pour la levée d’intentions de commande, le reste est en cours de traitement» assure Joseph Diarra.
Du côté des commerçants détaillants, on se dit prêt à consentir le sacrifice. Pour Haber Maïga, le gouvernement a fait des efforts, afin d’atténuer les souffrances des consommateurs, et les commerçants détaillants se doivent aussi de faire des efforts, car la baisse du prix des produits concerne tout le monde. Selon Haber Maïga, leur objectif est de contribuer au développement du pays. C’est pourquoi, a-t-il ajouté, un programme a été soumis aux partenaires techniques et financiers du Mali, afin de desservir l’ensemble du territoire. Même son de cloche au Syndicat National des Commerçants Détaillants du Mali. Son Président, Cheick Oumar Sacko, tous les commerçants détaillants doivent s’atteler au respect des prix fixés dans le cahier des charges.