Dans l’attribution de la 3ème licence de téléphonie globale, le gouvernement sortant de Diango Cissoko a commis des gaffes extraordinaires que le Bureau du vérificateur général n’a pas manqué de relever dans son rapport.
Le nouveau gouvernement d’Oumar Tatam Ly, malgré toutes les irrégularités relatives à ce dossier, continue d’observer un silence assourdissant. A tel point que le bénéficiaire provisoire de la licence, Apollinaire Compaoré (qui parle beaucoup), a fait savoir qu’il va lancer ses activités. La date annoncée n’a pas été respectée puisque sur le plan de l’investissement, il n’a rien fait et demeure hésitant. Le fait nouveau, c’est que le milliardaire, Babou Yara, est désormais entré dans la danse. Ce richissime Malien a été, semble t-il, approché par le Burkinabé Apollinaire Compaoré afin qu’il lui vienne en aide, c’est-à-dire le soutenir au plan relationnel pour la concrétisation de son projet.
En retour, Babou Yara lui aurait demandé de lui concéder une partie des actions de sa société. Les discussions sont en cours afin que Babou Yara entre dans le capital. Ce dernier mettra donc toutes ses relations en jeu pour que l’attribution de la 3ème licence ne soit pas annulée. Ce n’est pas tout. Il mettra également la main à la poche pour le nombre des actions convenues.
Compaoré, après avoir doublé Cesse Komé, veut se racheter en introduisant un Malien dans le capital de sa société. Cela est-il suffisant pour que les autorités ferment les yeux sur les nombreuses irrégularités qui ont émaillé le processus d’attribution de la licence ?
La première est le recrutement d’un cabinet conseil par le gouvernement pour l’octroi de la troisième licence. Sans avis de manifestation d’intérêt préalable, le gouvernement de la transition a attribué un marché de 1,733 milliard de nos francs au cabinet d’expertise dirigé par l’un des fils de l’ancien Président sénégalais, Abdou Diouf.
Ce montant faramineux lui a été payé, rubis sur ongle, sans le moindre respect de la procédure législative en la matière. Tenez-vous bien ! Le contrat n’a pas été enregistré aux Impôts pour permettre à l’Etat du Mali de recouvrer son dû, soit 3% du montant. Normalement, il ne devrait même pas être payé, sans que le contrat soit enregistré aux Impôts. Tous les jours, les hommes d’affaires maliens enregistrent leurs contrats avant tout engagement et mandatement, les préalables pour espérer être payé par le Trésor public. Mais, les opérateurs économiques d’autres pays sont automatiquement payés comme sur un coup de baguette magique. Allez savoir pourquoi.
Ce n’est pas tout. L’argent obtenu des ventes des dossiers d’appels d’offres a été directement versé dans le compte personnel de ce fils à papa en lieu et place du Trésor public. Pire, il n’a pas reversé les sommes reçues.
Ce qu’il faut savoir, c’est qu’il a fallu que le Vérificateur Général aille faire une vérification de conformité concernant l’attribution de la 3ème licence pour que le pot-aux- roses soit découvert. Rapidement, les autorités de transition ont paniqué et ont demandé au « voleur », de reverser la quote-part des Impôts et l’argent obtenu dans la vente des appels d’offres. Il a tergiversé. Il aura fallu, enfin, des menaces de poursuites judiciaires pour qu’il accepte reverser 52 millions de nos francs au Trésor public pour les Impôts et 80 autres pour les dossiers d’appels d’offres. Une régularisation en somme. Mais, il faudrait rechercher ceux qui ont eu la barbe mouillée pour accélérer ce paiement qui n’aurait pas dû être fait sans le respect de la procédure requise.
La deuxième gaffe du gouvernement de transition est d’avoir annulé le premier marché, sans recourir à l’avis de la DNGMP et procédé par entente directe. En effet, le ministère des Postes et des nouvelles technologies d’alors a attribué la 3ème licence par entente directe à Apollinaire, un opérateur économique burkinabé, en violation des textes en vigueur. Au lieu de procéder à un avis d’appel d’offres tel qu’exigé par la législation, ce département a préféré s’écarter des principes supranationaux mais aussi des dispositions nationales.
La troisième gaffe est d’avoir octroyé cette licence, sans caution bancaire, s’il vous plait. Aucune sanction n’est toujours tombée et celui à qui les irrégularités ont profité continuent de se moquer des uns et des autres. C’est dans cette logique qu’il faut mettre le deal en cours avec Babou Yara. Sera-t-il couronné de succès ? Le temps nous le dira.