Le roi Mohammed VI vient de se voir offrir une occasion inespérée de fourrer son nez dans le conflit malien et, plus généralement, dans le Sahel. Son royaume, qui n’a strictement aucune attache géographique avec cette région, contrairement à sa propagande basée sur l’occupation du territoire sahraoui, vient d’être invité par le Mnla. De fait, c’est une voie royale qui s’ouvre à Mohammed VI pour se présenter dans la peau d’un faiseur de "paix" entre frères ennemis maliens. Une occasion trop précieuse pour que le roi la loupe. Ses nombreuses tentatives de s’inviter comme partenaire au sein des pays du Sahel et du Sahara ont été infructueuses malgré le coup de pouce de la France. L’Algérie ayant érigé une sorte de mur de séparation entre le Maroc et le Sahel via le fameux groupe des «pays du champ» qui englobe tous les pays de la bande sahélo-saharienne.
Pour Alger, la présence du royaume au sein de cet ensemble sous-régional équivaut ipso facto à une reconnaissance de sa souveraineté sur le territoire de la République sahraouie. Une erreur fatale à ne pas commettre. Sans doute que Rabat est mû, lui aussi, par ce paradigme géographique qui lui aurait permis d’engranger une victoire diplomatique par le fait accompli. Le roi a perdu la bataille mais n’a pas renoncé pour autant à la guerre d’influence.
Pour plaider la "légitimité" de son intrusion dans la géopolitique du Sahel, Rabat a organisé, le 14 novembre dernier, une conférence régionale pour "le renforcement de la sécurité des frontières entre les pays du Sahel et du Maghreb". Ce fut une offre de service diplomatique qui ne manque pas d’ingéniosité de la part d’un monarque qui veut régner au-delà des frontières réelles de son pays. Il s’apprête aussi à accueillir le sommet de la Communauté des États Sahélo-Sahariens (Cen-Sad), cette année.
La multiplication de ces initiatives diplomatiques cache mal la volonté de Rabat de prendre durablement pied au Sahel, faute d’y avoir un ancrage géographique et humain. Et voilà que c’est un des protagonistes du conflit malien qui lui tend la perche pour jouer un rôle dans la recherche d’une solution qui favorise l’intégrité territoriale du Mali et qui satisfasse les revendications du mouvement azawad. Les deux représentants du Mnla, Bilal Ag Acherif (son secrétaire général) et Moussa Ag Attaher (son porte-parole), ont sollicité les bons offices du roi qui les a reçus, vendredi dernier, en audience.
Le Mnla, qui apprécie de moins en moins, voire plus du tout, la médiation algérienne dans le conflit, se tourne désormais vers d’autres pays, dont le Maroc. En creux, les Touareg signifient qu’ils ne cautionnent plus le leadership de l’Algérie dans ce conflit. Ceci, bien qu’ils sachent que le nord du Mali (sur)vit presque grâce aux aides algériennes.
Question qui coule de source : pourquoi le Mnla a-t-il pris ses distances avec Alger et s’en est allé voir ailleurs, plus précisément à Rabat ? Le fait est que les rencontres exploratoires tenues dernièrement à Alger à la demande de Bamako, en présence de plusieurs protagonistes du conflit malien, ont été mal digérées. Au Nord comme au Sud, la position algérienne fait polémique, bien que le président IBK ait béni la reprise de la médiation par Alger. Pour le Mnla, la solution a plus de chances d’aboutir à Ouagadougou plutôt qu’à Alger. Il y aurait peut-être une différence culturelle…
Source : El Watan