Le président de la République, Ibrahim Boubacar Kéita, est partant pour les négociations inclusives avec les groupes armés. Mais au préalable, il exige le désarmement, il en fait même la condition sine qua non au dialogue. Alors la communauté internationale, agacée par cette posture du président IBK, a pour sa part fortement insisté sur le fait que le désarmement était un objectif de la négociation et non un préalable, et que l’urgence de cantonner ces groupes armés prime sur le fait de les désarmer. Le Mali ne devrait pas se laisser piéger par la question de préséance du cantonnement sur le désarmement, au risque d’y perdre beaucoup.
Le Mali, à travers cette position obstinée du président IBK, a plus à perdre qu’à gagner dans le processus de paix et de stabilité du Mali. Parce qu’en acceptant la proposition de la communauté internationale, qui consiste à procéder au cantonnement des différents groupes armés d’abord, le Mali pourra prouver sa bonne foi dans l’aboutissement du dossier du Nord, et avoir une meilleure marge de manœuvre pour entreprendre quoique ce soit avec les groupes armés. Si par malheur, les autorités maliennes s’entêtent à continuer de sortir du cadre de l’Accord de Ouagadougou, signé le 18 juin 2013, le pays se retrouvera à la case départ en piétinant d’abord ses propres efforts, ensuite ceux de la communauté internationale. Rappelons que l’Accord prévoit que les négociations devraient intervenir depuis le mois de novembre dernier, soit 60 jours après l’entrée en fonction du président de la République. Ce calendrier n’a nullement été respecté. Aussi, le même accord accentue d’abord le cantonnement puis le désarmement.
Le Mali rate une chance
Dépouillé d’une bonne partie de ses dispositifs et prérogatives régaliens, l’Etat malien est actuellement en position de faiblesse, IBK devrait avoir conscience de cela et éviter d’user de ses pouvoirs, qui pourront enfoncer le pays davantage et réaffirmer la position marginalisée que les rebelles armés veulent avoir. IBK doit comprendre que c’est en respectant les étapes de la résolution de la crise que le Mali pourrait se réformer afin de reconquérir ses capacités d’action perdues et retrouver sa stabilité. La méthode coriace du président IBK, pour résoudre la crise, apparaît de plus en plus inadaptée aux réalités. Le Mali ratera une belle aubaine en tournant dos à la proposition de la communauté internationale, à savoir cantonnement avant désarmement. Dans la mesure où elle renforcera la position du Mali et permettra de filtrer l’entrée de nouveaux combattants et de nouvelles armes sur le territoire national, de déterminer de façon souveraine les différents sites de cantonnement, de mettre à nu la complicité entre le Mnla et certains éléments de Serval et de la Minusma, de mettre fin aux mouvements des éléments armés sur les sites de réfugiés et de déplacés, de suivre les mouvements suspects et dénicher les caches d’armes sur le terrain, d’évaluer correctement l’effectif des militaires déserteurs ayant rejoint les rangs des groupes armés, entre autres.
A trop vouloir conserver le pouvoir, IBK prend le risque de jeter à l’eau le peu de puissance qui reste au Mali. Qu’il sache que le moindre petit sacrifice diplomatique aura plus d’effet que tous les grands discours abusivement avant-gardistes pour le bonheur des Maliens.