La volonté du gouvernement de la république du Mali à faire du port du casque, une obligation pour les propriétaires d’engins à deux roues est en soi salutaire. Dans la mesure où l’utilisation du casque permet de protéger son porteur en amortissant les conséquences d’un choc éventuel sur son corps.
Cependant, la mise en relief de cette utilité de la mesure suffit-elle pour amener les intéressés à s’y soumettre ? Evidemment que non !
L’échec des gouvernements précédents dans la mise en vigueur doit servir de leçons pour déterminer une méthode pertinente afin de faire accepter cette nouvelle réglementation par l’ensemble des différents concernés.
Le port du casque ne parait pas dans le contexte actuel du Mali, une priorité. D’abord, le gouvernement a à faire de façon générale à des populations ancrées dans l’incivisme général et particulièrement des usagers de la circulation routière qui ne manifeste aucun respect vis-à-vis du code de la route.
De plus, le port n’a pas pour but de prévenir un accident mais de minimiser ses dégâts. Dès lors, il s’avère plutôt urgent de s’attaquer aux véritables causes de la majeure partie des accidents routiers en intensifiant les efforts. Tous les acteurs de la circulation (Compagnie de Circulation Routière, Syndicats des chauffeurs, usagers…) sont unanimes que la cause principale des accidents routiers réside dans l’incivisme entretenu par l’irresponsabilité des agents de la police chargés de faire respecter le code de la route et de faire suivre des sanctions aux contrevenants.
Les premières mesures gouvernementales en matière de sécurité routière devrait consister à corriger cet incivisme des usagers et à répondre à la problématique de la corruptibilité des policiers sur les règles ordinaires de la circulation routière.
La transgression des principes de la circulation routière par les usagers majoritairement des propriétaires d’engins à deux roues, est due à l’absence de rigueur de la part des policiers disposés à négocier sur les cas de délits. Les relations avec d’autres policiers… ou un billet de 500 ou 1000 F CFA suffissent la plupart des fois pour faire une concession. Cet accord est conclu sur des profits personnels. Cet état de fait est à la source du discrédit et du manque de respect dont souffrent nos policiers notamment de la CCR (Compagnie de la circulation Routière).
Ces mauvaises pratiques ont entrainé la plupart des usagers dans l’inobservation des règles de la circulation et les policiers dans des spéculations érigées en mode pour se faire de l’argent.
Face à ces défis, le rôle des policiers parait très déterminant. Ils doivent s’assumer en traitant tous les usagers sur des bases égalitaires en ayant comme référence exclusive que la loi en la matière.
Tout porte à croire que si les règles sont respectées, le nombre d’accidents sera réduit. C’est sur ce terrain que le gouvernement doit fournir les premiers efforts pour être objectifs et imprimer une légitimité à son projet de port obligatoire de casque.
Sur tout autre plan, rien ne semble avoir été réalisé pour assurer le respect de cette nouvelle disposition dans la circulation routière à part l’utilisation de la force contre tout contrevenant.
D’abord, aucune assurance n’est donnée sur la disponibilité suffisante de casques sur le marché. Les casques disponibles répondent-ils aux normes de sécurité ?
Ces mesures d’accompagnement qui relèvent de la responsabilité de l’Etat devraient préalablement être réunies avant toute fermeté sur la question.
Au-delà, le gouvernement doit être sensible aux contraintes sociales d’une population qui cherche difficilement à joindre les deux bouts dans un pays encore fragilisé par une crise multidimensionnelle de plus d’un an.
Au risque de rendre la nouvelle mesure impopulaire, le gouvernement doit se donner les moyens principaux de sa politique en tenant aussi compte du contexte socioéconomique difficile.
Cela consisterait par exemple à subventionner les casques en fixant et en contrôlant un prix unique. Peut-être aussi en prorogeant un délai qui est déjà très scandaleux à l’analyse de plusieurs intéressés.
L’absence de toutes ces mesures d’accompagnement technique et social nous amène à poser la question de savoir si les ministres en charge de ce projet n’ont pas plutôt l’intention de se faire apprécier par le président de la république au lieu de prouver leur souci de sécuriser les usagers.
Plusieurs ministres du gouvernement Oumar Tatam Ly semble être égarés dans la conduite de leurs missions respectives face aux rappels à l’ordre récurrents du président IBK. Ils ne savent plus dans quel ordre s’attaquer aux multiples défis qui paraissent d’ailleurs tous prioritaires. Le cas du ministère de l’assainissement et de l’environnement illustre parfaitement cette thèse. Il a fallu une interpellation du président IBK pour que la question de l’insalubrité de la ville de Bamako soit prise à bras le corps par les autorités compétentes.
D’accord au port du casque mais comment ?
Il est encore temps de se ressaisir pour éviter une déstabilisation inutile et inopportune de la paix sociale.