Représentant le Liban, l'équipe de l'ALBA, composée de Cynthia Gereige, Antoun Rizk, Michael Najjar et Chadi Hijazi, a remporté le premier « Prix USF du développement durable ». Les 2e et 3e prix ont été décernés respectivement au Mali et à l'Inde. Le concours lancé par l'association Urbanistes sans frontières (USF) avait pour thème : « Restructuration écologique d'un bidonville et adaptation au changement climatique ».
Les résultats du concours ont été proclamés le 25 janvier au Sénat français à Paris, lors de la conférence internationale « Le devenir des bidonvilles face aux crises socio-économiques et environnementales ». Quatre finalistes, le Liban, l'Arménie, le Mali et l'Inde, avaient été sélectionnés, la veille, parmi trente-six pays participants par un jury international composé de membres de l'USF, de représentants d'institutions internationales et de professionnels internationaux en architecture et urbanisme.
Restructuration écologique de Sabra el-Horch
Encadrée par des enseignants de l'École d'architecture et de l'Institut d'urbanisme de l'ALBA – Ziad Akl, Georges Khayat, Tony Chakar, Jihad Kiamé et Fadi Chiniara –, l'équipe libanaise a travaillé sur le quartier de Sabra el-Horch, dans la banlieue sud de Beyrouth. L'intervention s'est basée sur trois grands axes : la reconnexion de Sabra à la ville et son réaménagement en un fragment de ville désenclavé et animé ; la réorganisation et la dilution de la masse urbaine de Sabra ; et la transformation de Sabra en un quartier durable et écologique.
« Comme le thème de la durabilité est complexe à aborder dans un quartier censé être provisoire car illégal, nous avons réfléchi à une stratégie de légalisation de ce quartier afin que l'argument de la durabilité soit crédible », précisent les jeunes architectes. Une stratégie qui vise entre autres à créer des ressources financières locales pour les habitants et qui fait intervenir toutes les personnes ou instances en lien avec la région : l'État, les propriétaires originaux des terrains et les habitants.
Vu le caractère irrégulier de la zone choisie, il a fallu, avant d'entamer le travail sur le terrain, rassurer les habitants sur la nature et l'objectif du projet. Les étudiants ont donc rencontré « le responsable de la région » qui a fini par accepter de leur faciliter l'inspection dans les rues de Sabra. « Il nous a assuré, lors de nos visites, des accompagnateurs afin d'éviter d'éventuels ennuis avec les habitants. Ces derniers nous ont guidés dans les ruelles labyrinthiques de Sabra et nous ont facilité l'accès aux habitations afin d'effectuer nos relevés », explique Antoun Rizk.
La réalité de la région
Sabra el-Horch est une région pauvre, caractérisée par des constructions irrégulières, des habitations souvent exiguës et surpeuplées, des structures instables, des ruelles très étroites et insalubres, et une infrastructure « artisanale ». Toutefois, les quatre étudiants affirment avoir été impressionnés par « sa richesse spatiale hors du commun, née du bon sens et de la spontanéité », et par la solidarité qui unit ses habitants. « C'est un village urbain où tout le monde se connaît et s'entraide », insiste Cynthia Gereige.
Au cours de ses multiples visites à Sabra, l'équipe de l'ALBA a réussi à collecter un grand nombre de photos informatives et à s'imprégner du mode de vie des habitants. Des données nécessaires pour comprendre l'histoire de la région, les raisons de sa morphologie urbaine, ainsi que son statut juridique et démographique. « Nous avons réalisé que les habitants ont quelque chose à donner. Et nous avons essayé de comprendre comment ils vivaient pour leur apporter, en tant qu'architectes, des solutions qui répondent vraiment à leurs besoins », affirme Michael Najjar.
Les lauréats s'accordent à dire que cette expérience a été des plus enrichissantes. « Nous avons appris comment, en tant qu'architectes, nous pouvons aider les autres. Pris par notre vie de tous les jours, nous ne nous rendons pas toujours compte de l'existence de ces quartiers démunis à quelques kilomètres de chez nous », poursuit Cynthia.
De retour au Liban depuis dimanche, les jeunes architectes sont fiers d'avoir relevé le défi. « Au début, nous avions des doutes. Pourrions-nous faire quelque chose à Sabra ? Puis, avec la multiplication des visites et l'approfondissement de la recherche, nous avons réalisé à quel point les habitants étaient attachés à cet endroit. Après une sérieuse et profonde étude, nous avons trouvé que nous étions capables de faire une différence et d'améliorer la qualité de vie de ces gens sans les priver de leurs souvenirs et de l'endroit qu'ils aiment. Nous avons pu leur assurer, dans notre projet, des habitations et des structures dignes de ce nom sans tout raser et sans les déraciner », s'enthousiasme Chadi Hijazi.
Verra-t-on un jour le projet de restructuration écologique de Sabra el-Horch se concrétiser ? C'est possible. L'USF a promis de « réaliser des opérations pilotes sur les terrains des projets lauréats »... suite de l'article sur Autre presse