Après sa sortie hasardeuse pour tenter de justifier » le placement » de l’Adéma, aux allures de groupement d’intérêt économique, dans la mouvance présidentielle, le Pr Ali Nouhoun Diallo vient d’essuyer les quatre vérités de l’ex-président intérimaire de l’Adéma, M. Ibrahima N’Diaye dit Iba qui, dans une interview historique dans » L’Aube » du 13 février 2014, nous donne raison pour dire que l’Adéma devait plutôt s’assumer et aller à l’opposition. Suivez ce duel à distance.
Pour cette sortie dans le journal du Parlement, le Pr Ali Nouhoun Diallo a déclaré : » Il a été largement dit qu’après avoir géré le pays pendant 10 ans, avoir eu un candidat au second tour de l’élection présidentielle en 2002 et avoir été battu, le Parti africain pour la solidarité et la justice (ADEMA/PASJ) devait aller à l’opposition. Autant en 2002 je comprenais qu’une partie de la classe politique et une partie de la société civile disent que la place de l’ADEMA/PASJ devrait être à l’opposition. Autant, aujourd’hui, je comprends moins bien cette tendance à traiter les membres du parti d’hommes qui ont peur d’aller à l’opposition, qui ne veulent qu’être proches du pouvoir. Donc, qui veulent, à tout prix, être près du plat national, autour de la table. Je comprends moins bien cela, cette fois-ci. A mon avis, pour dire qu’on va à l’opposition, on doit se dire: on s’oppose à quoi? On s’oppose à un homme, à un groupe d’hommes. On va à l’opposition, parce qu’on a été trop longtemps au pouvoir ou aux côtés du pouvoir. On s’oppose à des idées, à un projet de société, à un programme. C’est très clair dans ma tête qu’on s’oppose à des idées avec lesquelles on n’est pas d’accord, à un projet de société et à un programme. Il se trouve qu’IBK et le RPM, dans son ensemble, disent qu’ils sont des socio-démocrates, qu’ils sont de l’Internationale Socialiste. Pendant six ans, IBK était le président du Parti africain pour la solidarité et la justice. C’est à ce titre qu’il a représenté le parti à l’Internationale Socialiste. Et ceci a naturellement facilité qu’il reste très lié à l’Internationale Socialiste et que le parti qu’il a créé aussi demande son adhésion à l’Internationale Socialiste. Nous ne pouvons pas dire que nous partageons les valeurs sociales démocrates sur le plan international et que sur le plan intérieur, nous voulons appliquer un programme social démocrate et dire que nous allons à l’opposition. Ce sont des choses que je ne comprends pas. Pour moi, c’est manquer d’esprit de suite. Si tant est qu’on se bat pour des idées, sur la base des projets de société et des programmes « .
Iba rétorque : » Il faut saluer ceux qui ont accepté de respecter l’esprit des élections. Si celles-ci ne vous sont pas favorables, et qu’au lendemain vous partez rejoindre la majorité, je trouve que cette attitude ne peut pas consolider la démocratie. Ce n’est pas logique. C’est pourquoi, je regrette, déplore et condamne ce choix fait par la direction actuelle de l’Adema. C’est ce qui est ma position. Et c’est ce qui va demeurer(…)
(…)Politiquement, lorsqu’on vous met devant des choix, vous êtes obligés de faire celui qui vous met en harmonie avec vos convictions. Il m’était impossible de suivre » cette majorité » qui se prononçait pour dire, dès lors qu’on a connu les résultats du 1er tour, sans aucune autre raison, qu’il faut aller avec celui qui venait avec une majorité très confortable et dont la victoire était quasi certaine pour le second tour. Lorsqu’on me met devant un tel choix, à des instants comme ça, je ne peux pas changer de veste. J’étais moralement, politiquement contraint de prendre la décision que j’ai prise (NDLR : démissionner de la direction du parti) « .
Et Iba d’ajouter : » Permettez-moi de saluer ceux qui ont accepté d’aller à l’opposition. Je suis de cœur avec eux. Mon choix simplement, c’est que ce qu’ils défendent, je peux encore le défendre dans mon parti. Ils ont sauvé la démocratie parce que ce sont eux qui nous permettent de dire que la démocratie malienne est en train de se reconstruire. Imaginez que les dix années passées, à la veille des élections présidentielles, on a été même obligé de changer la loi électorale parce qu’impossible de trouver un parti d’opposition, à part Sadi qui avait un seul député. Pour faire le bureau de la Ceni, les gens ont trouvé que lui seul ne pouvait se tailler autant de représentants dans le bureau national de la Ceni que l’ensemble des partis maliens. Il a fallu changer la loi électorale en mettant à la place du mot égalité, le terme équité.
Si aujourd’hui, nous avons l’Urd, le Parena et le Prvm, qui ont fait ce choix, c’est un choix courageux. Je voudrais les encourager. Ils l’ont fait et même la majorité doit s’en réjouir. »
Alors quand Ali martèle : » Je n’ai pas connaissance d’une renonciation d’IBK et des hommes qui sont autour de lui, surtout ceux qui sont partis de la Ruche pour créer le Rassemblement pour le Mali… » ; Iba réplique : » Le Rpm a refusé l’Adema et dans des situations qui dépassent même l’humiliation. Comment être sur la même liste avec une force qu’on veut éliminer, qu’on veut détrôner, sachant que tous les autres partis avaient donné le gage qu’ils vont être avec la majorité présidentielle. S’il y a un deuxième tour, c’est sûr et certain que les gens vont aller de ce côté là. C’est ce qui s’est produit. L’Adema s’est précipité pour aller se donner au Rpm. Partout, le Rpm, dans la plupart des cas, a dit Non. Il n’a pas voulu aller avec l’Adema parce qu’il voulait justement prendre la place de l’Adema. Et au deuxième tour des législatives, sur 53 députés sortis des urnes, sur 56 députés avec le nomadisme, l’Adema a perdu 40. On n’est pas loin des ¾. Ça été une alliance toxique pour l’Adema. Courir derrière quelqu’un qui veut t’assassiner. On devrait s’affirmer en cherchant le maximum de députés et après voir comment négocier ; pas les alliances, mais les coalitions peuvent se faire en ce moment.
Les militants n’ont pas désavoué l’Adema. Lors du 1er tour des élections- c’est pourquoi je parle du choix malheureux et suicidaire de la direction du parti- le seul parti qui pouvait nous poser des problèmes à partir des résultats, c’était le Rpm.
Je prends comme exemple la région de Kayes. D’abord, l’Adema est allé au second tour dans tous les cercles de la région. Excepté Kéniéba où elle était deuxième, elle a remporté les élections partout au 1er tour. Alors au deuxième tour, partout 1er, à part Kayes, un seul député, parce qu’il a fallu concéder tout pour avoir au moins le nom de l’Adema sur le résultat final. A part Kayes, Yélimané et Diéma, on a retourné la situation partout. Et c’est le Rpm qui est venu gagner au second tour. Ensuite, partout où l’Adema a gagné, elle n’était pas avec le Rpm. Qui a refusé. Il est allé faire alliance avec l’Urd pour battre le Rpm à Yélimané, à Diéma…
Pour compléter, l’Urd qui s’est assumée, en défendant son identité, et qui est allée aux élections comme la bête à abattre, c’est elle qui s’en est sortie avec le moins de dégâts. De 23 ou 26 députés, elle a pu sauver 17. Si s’assumer devait coûter, l’Urd devait disparaitre lors des législatives. Ce n’est pas le cas. Et celui qui s’est déculotté, c’est celui-là qui se retrouve dans cette situation « .
Le vin est tiré, il faut le boire. Après avoir perdu en soutenant Att au détriment de son candidat Soumaïla Cissé et de son actuel allié Ibk, l’on verra ce que l’avenir pourrait réserver à un parti qui ne s’assume pas. A vos marques, Messieurs et Dames abeilles !
Mamadou DABO