PARIS - François Hollande et Angela Merkel ont dénoncé
d’une seule voix mercredi à Paris les violences "inqualifiables" commises en
Ukraine qu’il faudra "sanctionner" et la "répression du pouvoir", appelant
toutefois à une reprise du dialogue politique.
La chancelière a indiqué être convenue avec le président russe Vladimir
Poutine, soutien indéfectible du président ukrainien Viktor Ianoukovitch, de
"tout faire pour éviter une escalade de la violence" en Ukraine, lors d’un
entretien téléphonique.
"Il se produit en Ukraine des actes inqualifiables, inadmissibles,
intolérables, une violence, une brutalité, une répression", avait fustigé
auparavant le président français, à l’issue d’un conseil des ministres
franco-allemand à l’ordre du jour totalement bouleversé par l’aggravation de
la crise à Kiev.
Les violences entre manifestants de l’opposition et policiers y ont fait 26
morts dans la nuit de mardi à mercredi. "Ceux qui ont commis ces actes, ceux
qui se préparent à en commettre d’autres, doivent savoir qu’ils seront
sanctionnés", a martelé M. Hollande.
Le président français avait appelé un peu plus tôt l’Union européenne à
décider dès jeudi de prendre des sanctions "rapides et ciblées", précisant
qu’elles devraient viser les "principaux responsables" de "violences
policières inacceptables".
"Cette question des sanctions, de leur graduation ou de leur ciblage (...)
sera posée" lors de la réunion des ministres européens des Affaires étrangères
jeudi à Bruxelles, a-t-il spécifié lors d’une conférence de presse commune
avec la chancelière allemande qui a cependant souligné que ces sanctions
n’étaient pas une "fin en soi".
Avec l’intention manifeste de ne pas couper les ponts avec Kiev, l’un comme
l’autre ont soigneusement évité aussi de nommer Viktor Ianoukovitch même si
François Hollande a souligné qu’ils condamnaient "la répression venant du
pouvoir" ukrainien. La chancelière a souligné pour sa part sa volonté de
poursuivre les discussions avec l’opposition ukrainienne mais aussi avec le
numéro un ukrainien "s’il est disposé à y participer".
- ’Que ça cesse’ -
"Notre premier appel est que ça cesse et que le calme, la sérénité,
l’apaisement puissent être de retour", avait souligné d’emblée le président
français. "Seul le dialogue politique peut véritablement produire des
progrès", a approuvé la chancelière qui a appelé à un arrêt "aussi rapide que
possible" des violences.
La brutale dégradation de la situation en Ukraine contraint les Vingt-Huit
à réagir rapidement pour tenter d’éviter une guerre civile à leur frontière.
Et le sujet s’est imposé comme la dominante du 16e conseil des ministres
franco-allemand réuni mercredi à l’Elysée, le premier depuis l’arrivée au
pouvoir des sociaux-démocrates à Berlin aux côtés des conservateurs d’Angela
Merkel.
Les deux dirigeants ont par ailleurs confirmé le déploiement de la brigade
franco-allemande au Mali où elle sera affectée pour l’essentiel à des tâches
de formation, "plus qu’un symbole" pour François Hollande. Les effectifs et le
calendrier de ce premier déploiement de la brigade sous la bannière européenne
et en Afrique n’ont toutefois pas été précisés.
Paris et Berlin ont affiché par ailleurs leur "total accord" sur la
transition énergétique. Mais plutôt que "l’Airbus de l’énergie" promis par le
président français à la mi-janvier, celui-ci a annoncé une simple "plateforme"
industrielle, de recherche et financière.
Celle-ci s’étendrait à quatre domaines clés: les réseaux de transport
d’électricité, les énergies renouvelables, le stockage de l’électricité et
l’efficacité énergétique.
Au chapitre fiscal, les deux dirigeants ont affiché leur "volonté d’aboutir
avant les élections européennes" de la fin mai à une taxe européenne sur les
transactions financières.
Alors que plusieurs ONG espéraient un accord franco-allemand plus ambitieux
dès mercredi, François Hollande lui-même l’a admis: "Je préfère une taxe
imparfaite à pas de taxe du tout."
Paris et Berlin planchent depuis des mois sur cette taxe qui concernerait
d’abord onze pays de l’Union européenne et contournerait ainsi les réticences
britanniques.
L’objectif est à la fois de lever des fonds pour financer l’aide au
développement ou la lutte contre le changement climatique et de décourager la
spéculation.
Et pour manifester une nouvelle fois l’intensité de l’amitié
franco-allemande, François Hollande s’est réjoui que la chancelière ait
accepté de venir en France le 6 juin prochain pour le 70e anniversaire du
Débarquement, y voyant "un beau message".
Pour cette commémoration sont également attendus la reine Elisabeth II et
le président américain Barack Obama.