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Guerre ouverte entre les syndicats et le ministre de la justice : Quid de la lutte contre l’impunité et la corruption
Publié le lundi 3 mars 2014  |  Le Zenith Bale




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Le samedi 1er mars 2014, les trois syndicats de la famille judiciaire notamment le Syndicat autonome de la magistrature (Sam), le Syndicat libre de la magistrature (Sylma) et le Syndicat autonome des greffiers secrétaires de greffes et parquets (Synag) étaient face aux journalistes à la Maison de la presse. Avec à l’ordre du jour la situation de leurs doléances et l’annonce qu’ils font désormais front commun contre le ministre de la Justice Garde des Sceaux, Me Mohamed Ali Bathily pour lui rendre la monnaie de ses sorties intempestives et malencontreuses contre les acteurs de la justice. A ce pli, qu’adviendra-t-il de la lutte contre l’impunité et la corruption ?

Selon les conférenciers Issa Traoré du Syndicat autonome de la magistrature (Sam), Adama Yoro Sidibé du Syndicat libre de la magistrature (Sylma) et Hadia Dioumassy du Syndicat autonome des greffiers secrétaires de greffes de parquets (Synag), leurs doléances trainent depuis 2007 à êtres satisfaites alors que la famille judiciaire est actuellement victime d’injonctions abusives de la part du ministre, contrairement au principe de l’indépendance de la justice.

En effet, le cahier de doléances des magistrats visait la relecture de leur statut et la concrétisation par le gouvernement des différents textes d’application de ce statut. Mais les magistrats sont au regret de constater que depuis 2002, près d’une dizaine de textes règlementaires pour l’application de la loi n°02-054 du 16 décembre 2002 portant statut de la magistrature sont rangés dans les tiroirs : le plan de carrière, la composition du costume d’audience des magistrats, les modalités d’installation des chefs de juridiction et de parquet, les autorités chargées de la notification, etc.

Les magistrats dénoncent l’instrumentalisation de la justice par les politiques du fait qu’il existe dans les divers textes de la République une pléthore de dispositions tendant à la fragilisation du pouvoir judiciaire face au pouvoir exécutif. Selon les conférenciers, » les règles fondamentales qui régissent leur rapport sont allègrement contournées, bien des fois brutalement violées (principes d’inamovibilité et d’indépendance) « .

En outre, les trois syndicats sont remontés contre le ministre de la Justice Garde des Sceaux, Me Mohamed Ali Bathily parce que, depuis son arrivée, il y a eu une brusque montée de fièvre sous le prétexte de la lutte contre l’impunité, la corruption et la mal gouvernance. Ils affirment leur adhésion à ce combat s’il en était un, en réalité. Mais ils font des réserves quant aux méthodes peu orthodoxes qu’ils observent malheureusement dans le traitement de certains dossiers impliquant des magistrats d’une part et les sorties médiatiques corsées du ministre d’autre part.

En fait, les syndicats de la justice ne comprennent pas, au regard des dispositions pertinentes du code de procédure pénale, que soient décernés des mandats de dépôt décernés contre 4 magistrats, un greffier et un clerc d’huissier. Car en application du Code de Procédure Pénale dans ses articles 122 et 1223, les mandats de dépôt ne s’imposaient pas. Pis, le ministre, selon les conférenciers, a fait fi de la présomption d’innocence dans cette affaire quand il affirme que » c’est des magistrats qui ont dépouillé un vieil homme aveugle de 56 bovins « . Est-ce à dire que le ministre a fait une affirmation gratuite voire mensongère ? Est-ce à dire que même le délinquant pris la main dans le sac, une prétendue présomption d’innocence devrait empêcher la liberté d’expression et d’opinion du garde des sceaux ou des citoyens ?

Alors les syndicats d’enfoncer le clou en fustigeant le report de la première session de la Cour d’Assises qui devrait s’ouvrir le 24 février 2014 et s’étaler sur 21 jours au cours desquels 120 affaires devraient être jugées. Selon eux, au temps du ministre Malick Coulibaly, le Mali s’était inscrit dans la tradition des bonnes pratiques en matière criminelle. Et le pas est franchi pour dénoncer les sorties médiatiques teintées de menaces parfois comme ces propos tenus dans le journal » Le Sphinx » sur l’affaire Adama Sangaré du genre : » Le mardi, je ne voudrais pas que le procureur qui est en charge de son dossier me dise qu’il n’est pas en prison. S’il n’est pas en prison, c’est le procureur qui y irait pour recel de délinquants. C’est moi qui le ferai poursuivre pour recel de délinquant et lui y ira. C’est clair « . Et le ministre d’ajouter : » j’ai demandé que la Sécurité d’Etat surveille tout magistrat en charge des dossiers « .

La question qui se pose à ce niveau, c’est de savoir comment le ministre va s’y prendre. Avec cette allure de justicier digne d’une autre époque, comment compte-t-il sur la bonne collaboration de ses partenaires privilégiés que sont les magistrats ? Il est bon d’employer la fermeté, mais avec la bonne manière, en pesant les mots, en s’abstenant de tout dire en tout lieu et à tout instant. Il lui faut la pédagogie requise face à ces magistrats dont il sait les mauvaises habitudes pour une certaine frange. Le combat sera dur, mais pas impossible, car sûrement la victoire sera au bout du rouleau avec l’appui du peuple désabusé et la volonté affichée des plus hautes autorités. Tout le monde reconnaît qu’il y a des déchets dans l’application de la justice et la distribution du droit dans notre pays. Il y a même des magistrats à écarter purement et simplement du traitement des dossiers judiciaires.

Car il s’agit de magistrats mal formés et recrutés malheureusement par l’Etat lui-même (depuis vingt ans que nous sommes dans des cycles de programmes non épuisés de formation avec des années académiques de cinq voire quatre mois effectifs) et sans aucune conscience professionnelle de leur part. Mais de là à s’attaquer frontalement et sans retenue aux magistrats, il y a de quoi réfléchir mille fois aux retombées d’une telle option. Nous estimons qu’il faut tout un programme complet d’assainissement de la justice. Et ce ministre nous semble bien indiqué à réussir ce combat, pour peu qu’il reste sur sa position et révise sa démarche. En politique, il faut tout calculer.


D’ailleurs aux propos du ministre, les syndicats rétorquent : » Nous disons : oui pour l’assainissement de la justice. Nous sommes prêts à jouer notre partition dans cette entreprise de salut public. Mais nous disons aussi : halte Gestapo ! Nous estimons qu’on n’en a pas besoin pour la prise et la mise en œuvre des mesures d’assainissement du monde judiciaire. Ces magistrats et ces greffiers, en corps, voués aux gémonies, sont quand même ceux qui rendent la justice dans notre pays. Il n’est pas envisageable qu’on ne compose pas avec eux. En parlant d’eux, surtout devant les partenaires étrangers, il est important que le ministre intègre la règle de l’indépendance du pouvoir judiciaire vis-à-vis de l’exécutif. Quelque ministre de la Justice qu’il soit, il est un membre de l’exécutif, et à ce titre, il lui est interdit de s’immiscer dans les affaires judiciaires « .

Et les syndicalistes d’ajouter qu’en allant dire à Bruxelles, devant des partenaires étrangers, qu’il a fait mettre des magistrats en prison, le ministre Bathily crée le trouble chez ses interlocuteurs et dessert le Mali. Car ces derniers se disent entre eux : » Ah bon, au Mali un ministre peut faire mettre quelqu’un en prison ! La justice n’est donc pas indépendante ! Méfiance, méfiance…. « .

Mais à quoi cette indépendance a abouti si ce n’est l’abus de pouvoir de certains magistrats au profit de l’argent ? C’est, disons-le franchement, le même constat au sein de plusieurs corporations dont la presse à laquelle le ministre ne fait pas non plus de cadeau. Là aussi, nous sommes dans la même situation d’insuffisance de formation en l’absence de la simple filière de journalisme à l’Université du Mali, et en présence du manque d’organisation par la non application de la convention collective et la mort depuis plusieurs années de l’Observatoire pour la Déontologie et l’Ethique de la Presse dont le Président se trouve présentement à la tête de la Cellule de Communication de la Présidence de la République. Sans compter l’incapacité depuis vingt ans de mettre en place une seule et unique instance supérieure de régulation de la presse et de la communication. Comme quoi, au Mali on veut bien faire avec la médiocrité comme moyen de réussite. Allez savoir là où un tel défi a pu être relevé ! Tout le monde est voué à la débrouillardise et les critiques mal à propos sont les seuls remèdes au Mali. Courage !

Pour revenir à nos montons, aussi les syndicats estiment inexacts les propos du ministre dans le Journal Le Serment N°004 du 18 février 2014 : » A chaque fois qu’on touche à un magistrat, c’est des menaces de grèves. Qu’ils aillent en grève ! « . Selon eux, il n’y a jamais eu de menace de grève suite à une poursuite engagée contre un magistrat ou un greffier au plan disciplinaire, pénal ou civil.

Pour conclure, les syndicats se disent dans la dynamique de répondre au ministre coup par coup car plus question de se laisser faire, la guerre est ouverte. Comment donc réussir la lutte contre l’impunité et la corruption avec ce déplorable conflit qui nuit à l’assainissement de la justice et par ricochet à l’exécution de cette noble et légitime mission ?
Que Dieu préserve notre pays !
Mamadou DABO

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