Les échéances fixées ne pourront pas être respectées. Mais la volonté d’avancer demeure intacte. Le rêve depuis longtemps entretenu d’une monnaie unique pour les 15 membres de la Communauté économique des états de l’Afrique de l’ouest (CEDEAO) tarde à devenir une réalité. L’exécution de la feuille de route établie pour la réalisation de cet ambitieux programme monétaire unique enregistre en effet de sérieux retards. Pourtant tout était allé très vite au début. L’Agence monétaire de l’Afrique de l’ouest (AMAO) a été créée depuis 1996 à la suite de la transformation de la Chambre de compensation de l’Afrique de l’ouest (CCAO). En 2001, c’était l’Institution monétaire de l’Afrique de l’ouest (IMAO) qui a été mise en place. Ces deux institutions ont été chargées de préparer la mise en circulation de la monnaie unique prévue pour 2015.
A cette date, la Zone monétaire de l’Afrique de l’ouest (ZMAO) qui regroupe les Etats de la CEDEAO non membres de l’UEMOA (la Gambie, le Ghana, la Guinée, le Nigeria et la Sierra Leone) devrait avoir bouclé son processus d’intégration et disposer d’une monnaie unique à l’image de la zone UEMOA, déjà détentrice du franc CFA et d’une Banque centrale unique. Ensuite, à l’horizon 2020, les deux ensembles – UEMOA et ZMAO – devraient fusionner et se retrouver avec la monnaie unique de la CEDEAO qui est l’objectif final à atteindre. En attendant, les pays membres doivent respecter les critères de convergence macroéconomique.
Malheureusement le calendrier établi ne pourra pas être respecté. Pour permettre au monde universitaire malien d’appréhender cette question économique régionale dans toute sa complexité, les professeurs de l’Université des sciences sociales et de gestion de Bamako (USSGB) ont organisé samedi dernier une conférence-débat sur le sujet dans l’amphithéâtre de 500 places de la Faculté des sciences économiques et de gestion (Fseg). L’événement animé par le professeur Bani Touré, économiste, spécialiste en monnaie, s’est déroulé en présence du ministre chargé des Affaires religieuses et du Culte, Thierno Amadou Hass Diallo, et de représentants de la CEDEAO, des spécialistes en politique monétaire de la BCEAO et de nombreux chercheurs et étudiants en économie et gestion.
DANS LES DÉLAIS PRESCRITS. Dans sa communication, le professeur Bani Touré a fait la genèse de la création de la monnaie unique ouest africaine ainsi que ses objectifs, ses avantages et les difficultés ont émaillé le processus. Il rappellera que la création d’une zone monétaire unique de l’Afrique de l’ouest représente un projet politique qui participait de la vision d’une Afrique unie, vision esquissée dès 1983 par les pères fondateurs de la CEDEAO. Les chefs d’Etat et de gouvernement de la Communauté manifestaient ainsi leur ferme volonté de solutionner les problèmes de paiement qui minent l’ensemble régional et qui résultent de la divergence des zones monétaires dans la région. Après des années d’immobilisme, a souligné le conférencier, c’est finalement en 1999 au Togo que les responsables de la CEDEAO définiront une stratégie dite « approche accélérée de l’intégration ». Cette stratégie visait la construction rapide d’une zone monétaire unique en Afrique de l’ouest sur une base plus large et en remplacement de l’actuelle UEMOA.
Cependant de 2003 à ce jour, la mise en œuvre de cette politique monétaire n’a cessé d’être reportée, a regretté Bani Touré qui relèvera que l’ensemble des échéances fixées n’a pas pu être tenu et que certaines activités d’importance ont accusé du retard. Or, a insisté le conférencier, l’enjeu principal réside dans la mise en œuvre effective des actions inscrites dans la feuille de route. Pour ce faire, aussi bien les institutions sous- régionales que les Etats membres doivent assurer correctement et dans les délais prescrits les missions qui leur ont été assignées.
L’économiste rappellera que l’espace CEDEAO fait actuellement cohabiter en son sein le franc CFA en usage dans huit pays de l’Union économique et monétaire ouest africaine et des monnaies nationales telles que le cedi au Ghana, le naira au Nigeria ou encore le franc guinéen en Guinée Conakry sans oublier les monnaies des pays lusophones (Guinée-Bissau et Cap Vert). C’est la prise en compte de cette réalité qui a inspiré la marche en deux grandes étapes (2015 et 2020) vers la monnaie commune de la CEDEAO. Bani Touré a invité les universitaires et étudiants à réfléchir sur la mise en œuvre de nos politiques macroéconomiques qui suivent la trajectoire de l’intégration sous-régionale et également sur le respect des critères de convergence y relatifs.... suite de l'article sur L’Essor
