Les morts ne veulent pas le lâcher et les vivants lui mènent la vie dure. Il s’agit de Blaise COMPAORE. Il a deux morts célèbres qui, non contents de peser sur sa conscience, lui collent aux basques et réclament Justice. Il s’agit de son ex-camarade, feu Thomas SANKARA. Tombé sous les coups de feu et les balles assassinées en octobre 1987 ; et de notre confrère Norbert ZONGO tué par le feu pour avoir voulu faire la lumière sur un assassinat. Blaise pensait s’être débarrassé d’eux définitivement, mais il faut croire que ces morts-là n’ont pas l’intention de tomber dans l’oubli et ils ont… la vie dure.
Et pour être bien sûr de hanter les nuits de Blaise et lui pourrir la vie au maximum, ils ont mis la justice à ses trousses. Le premier, Thomas SANKARA, non content de l’embarras que son assassinat a causé chez Blaise voudrait qu’il fasse la preuve que le corps jeté dans un trou dans les cimetières est bien le sien. Normalement, ce n’est pas la fin du monde. Sauf que Blaise s’oppose à ce que la famille de Thomas et ses amis soient bien sûrs que la tombe sur laquelle ils se recueillent tous les ans contient bien le corps de Thomas. L’affaire est pendante devant la Justice burkinabé. Après plusieurs péripéties qui prouvent qu’il y a anguille sous roche et peut-être pas le corps de Sankara sous la sépulture.
Pour ce qui est de note confrère, l’affaire est en transport à Abuja devant la Cour de Justice de la CEDEAO. A Ouagadougou, la justice à la solde de Blaise, avait classé l’affaire. Sauf que Norbert ne voudrait pas que son dossier soit enterré à la va-vite et à la sauvette après qu’il ait été brûlé vif d’où la saisine de la Cour de Justice de la CEDEAO qui a estimé que le Burkina est allé un peu trop vite en besogne et qu’il y avait matière à juger … en faveur du mort. Thomas et Norbert sont en train de prouver que ce ne sont pas tous les cadavres qui acceptent de rester tranquille dans les placards. Et surtout, ils nous rappellent le fameux poème de Bernard B. Dadié, « les morts ne sont pas morts », « ils sont dans les avocats qui attaquent leurs assassins ».
Mais le Président burkinabé n’est pas le seul à être dans le collimateur de la Justice. Il y a notre ministre de la Justice, Me Bathily, qui est dans le viseur de tous ceux qu’il accuse à tort et à travers. Et quand on sait qu’il a accusé presque la terre entière de tous les maux d’Israël (les magistrats, les maires, les journalistes, les hommes politiques, les préfets, les opérateurs économiques, les anciens ministres, les anciens chefs d’Etat, etc.), il a du souci à se faire. Sans blague ; car ils sont nombreux à vouloir le traîner devant les tribunaux. Lui, l’homme de droit, sait qu’il ne pourra pas échapper ou s’en tirer à bon compte. A force de croire à tout ce qu’il entend, à force de prendre pour argent comptant tout ce qu’il lit, à force de prendre plaisir à s’écouter, le ministre de la Justice remue la boue et éclabousse tout le monde.
En attendant d’être à la barre, il reçoit des coups de massue sous forme de démentis. Lors d’une sortie devant nos compatriotes vivant en France, le ministre de la Justice avait accusé Soumaïla CISSE d’avoir empoché, pour son profit personnel et exclusif, 22 des 56 milliards alloués aux travailleurs compressés du temps où il était ministre des Finances. Non seulement, Soumaïla a répliqué sèchement en déclarant que le ministre est un menteur, mais il s’autorise une petite menace et une grande allusion « perfide ». En effet, Soumi « Champion » menace le ministre d’un procès en bonne et due forme. Pour qui connait Soumaïla, sa menace doit être prise très au sérieux. Ça ne lui déplairait pas d’avoir le scalp d’un ministre de la République, lui qui se veut Chef de l’opposition. Mais, Soumïla ne se contente pas de dire que le ministre a raconté des histoires, il pousse son avantage en déclarant que s’il avait empoché 22 milliards, où étaient le Premier ministre IBK et le Président Alpha, « Sont-ils mes complices ? ». Et Vlan.
Soumaïlla n’est pas le seul à traiter le ministre de la Justice de menteur, il y a le Procureur Général Daniel TESSOGUE. Lors de sa sortie française, le ministre de la Justice qui a une défense d’éléphant contre le Maire de Bamako Adama SANGARE avait déclaré qu’il avait remis 20 dossiers à charge au Parquet contre l’édile de la capitale. « Faux » rétorque, TESSOGUE. « S’il l’a fait, les dossiers ont dû se perdre dans les dédalles du ministère de la Justice » persifle celui qui est à couteaux tirés avec son ministre. Par contre TESSOGUE a déclaré avoir constitué une soixantaine de dossiers contres des maires, des préfets et cela sur toute l’étendue du territoire.
Et puis, il y a les maires qui ne veulent plus se laisser faire, se laisser marcher sur les pieds, se faire accuser à tout bout de champ sans rien faire. Eux, ils ne sont pas dans les démentis ; ils sont dans l’action. On apprend qu’ils ont décidé d’interdire les meetings et les sit-in de soutien au ministre de la Justice organisés par ses Associations pour Mali (APM). Entre nous, c’est vrai que ça fait bizarre un ministre de la Justice qui s’organise des meetings pour se soutenir. S’il craint pour son poste, c’est humain, mais la lutte contre la corruption n’est pas liée à sa personne et elle se fera avec ou sans lui. Le Président de la République exige de lui d’être juste professionnel. Visiblement, sur ce terrain, il a encore du chemin à faire.
Talfi