Plusieurs pays d’Afrique de l’Ouest étaient mobilisés vendredi contre une épidémie de fièvre hémorragique partiellement due au virus Ebola qui a fait 86 morts en Guinée, au lendemain de l’annonce de premiers cas suspects au Mali, après le Liberia et la Sierra Leone. Le Mali, frontalier de la Guinée, a révélé jeudi soir avoir décelé sur son sol trois cas suspects, qui ont été placés en isolement.
Leurs prélèvements "ont été envoyés pour analyse" dans un laboratoire de référence à Atlanta, aux Etats-Unis, a indiqué le gouvernement malien. "Ce (vendredi) matin, les trois cas suspects se portent mieux. Nous n’avons pas, par exemple, relevé (...) de saignements", un des symptômes de l’Ebola, a expliqué à l’AFP le ministre malien de la Santé, Ousmane Koné.
D’après le Dr Oumar Sangaré, de la Direction nationale de la Santé, tous trois sont maliens, ils "travaillaient dans une zone frontalière entre le Mali et la Guinée" et "ont été repérés séparément à leur arrivée sur le sol malien, par voie routière".
Le Mali a déconseillé "les déplacements non nécessaires vers les zones d’épidémie".
Ces zones sont surtout situées en Guinée, où la fièvre hémorragique a tué 86 personnes sur 137 cas enregistrés depuis janvier, essentiellement dans des préfectures de la Guinée forestière (sud et sud-est), selon le dernier bilan des autorités guinéennes.
45 de ces cas ont été confirmés positifs à l’Ebola, virus hautement contagieux et souvent mortel contre lequel il n’existe ni vaccin, ni traitement. Mais "on note des guérisons, confirmées par des analyses, de deux personnes atteintes d’Ebola" en isolement à Conakry, a précisé le gouvernement guinéen jeudi.
En Guinée forestière, tous les cas suspects ou susceptibles d’avoir été en contact avec des cas suspects sont sous surveillance, a indiqué vendredi à Genève le porte-parole de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), Gregory Härtl. "Nous sommes à peu près sûrs d’avoir tracé tous ceux qui doivent l’être" dans ces zones, mais "nous ne pouvons pas baisser la garde tant qu’il ne se sera pas passé 42 jours" sans notification de cas, ce qui signifierait la fin de l’épidémie, a-t-il expliqué.
- ’Le risque est là’ -
Une maigre lueur d’espoir face à une épidémie jugée "sans précédent" par l’ONG Médecins sans frontières (MSF), très active en Guinée, et inquiétante par plusieurs spécialistes. Cette épidémie "n’est pas encore sous contrôle a priori" et "il y a une grande dispersion des patients", s’est inquiété le Dr Sylvain Baize, chef du Centre national de référence (CNR) des fièvres hémorragiques virales de Lyon (France), qui a posé le diagnostic de l’Ebola en Guinée.
Plusieurs cas suspects, dont certains mortels, avaient déjà été signalés ces derniers jours au Liberia et en Sierra Leone, tous en lien avec une contamination venue de Guinée voisine. Les tests au virus Ebola ont été positifs pour deux cas au Liberia, négatifs pour la Sierra Leone.
Jeudi, le gouvernement libérien avait annoncé la découverte dans une zone forestière de la région de Nimba (est) d’un nouveau cas suspect non lié à la Guinée, contrairement aux précédents signalés essentiellement dans le comté de Lofa (nord). Selon la même source, il s’agit d’un chasseur qui "n’est jamais allé en Guinée" et "n’avait jamais eu aucune interaction avec une personne soupçonnée d’être porteuse du virus" Ebola.
Des prélèvements ont été effectués sur le chasseur pour être analysés en Guinée. "En attendant les résultats, nous avons demandé à la population de ne pas toucher à la viande de brousse dans tout le pays", a dit Bernice Dahn, du ministère libérien de la Santé.
Officiellement, 14 cas de fièvre hémorragique, dont sept mortels - y compris le chasseur -, ont été signalés au Liberia . Ces développements inquiètent en Afrique de l’Ouest confrontée pour la première fois à une flambée de cette ampleur, contrairement à l’Afrique centrale, qui a connu des épidémies meurtrières depuis la découverte de ce virus en 1976 au Zaïre (aujourd’hui République démocratique du Congo).
Les pays voisins de la Guinée ont déployé des équipes sanitaires dans les zones frontalièrese et des campagnes de sensibilisation sont menées. A Bamako, les assurances officielles n’avaient pas réussi à dissiper l’inquiétude. "Le risque est là. Il faut tout faire pour protéger la population, pour soigner aussi les malades", a estimé Gisèle Togo, infirmière à la retraite.
bur-cs/mba