Décidemment, au Mali, les intérêts personnels et partisanes ne sont pas encore prêts à être abandonner au profit de ceux de la nation. C’est du moins le constat alarmant qui découle de l’imbroglio politique, sur fond de démêlés fratricides et de divergences idéologiques, qui secoue toujours Bamako.
Le retour au bercail du Professeur Dioncounda était censé annoncer les prémices d’une stabilité politique au Sud, laquelle devrait aboutir à une union sacrée pour la reconquête du Nord et l’organisation de futures élections. De concrètes initiatives ont certes été posées dans ce sens, mais force est de reconnaitre que les résultats escomptés n’ont toujours pas encore été atteints. Le débat sur les différentes propositions formulées par le Président de transition est ouvert et ne souffre point de sujets de discussion. De la création du conseil d’Etat à la mise en place de la commission nationale chargée des négociations avec les mouvements armés du Nord, en passant par le sort du Premier ministre, l’initiative du conseil national de transition, le nouveau gouvernement…les prochains jours s’annoncent à la fois effervescents et surtout décisifs pour le Mali.
Des analyses, il ressort, au-delà du débat national qu’alimente cette nouvelle réalité politique, une divergence accrue des maliens sur le sort du Mali. La classe politique, plus que divisée, a montré ses limites. La société civile peine à jouer son rôle. La communauté internationale et la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest, pour une fois, semblent faire profil bas et accorder une double présomption de confiance et de responsabilité aux leaders politiques. Les populations, apparemment réconfortées dans leur orgueil d’une résolution interne et exempt de toute ingérence extérieure, observent la classe politique et l’attend comme diraient les ivoiriens ‘’au carrefour’’. La guerre médiatique à laquelle se livrent les politiques par médias interposés ; le dernier débat d’Afrique d’Alain Foka ; les mobilisations et opérations ‘’séductions’’ qui émergent de part et d’autre ; le silence presque dolosif de la grande muette et bien entendu les remues ménages qui pointent à l’horizon avec le dossier du premier ministre et son gouvernement sont autant de chambardements qu’illustrent aujourd’hui la fragilité de Bamako plus que Gao-Kidal-Tombouctou.
La situation du Nord est connue. Les deux tiers du territoire national sont occupés par des bandits armés qui veulent imposer la charia dans tout le sahel. Ces bandits armés se livrent à des atteintes et actes de tout acabit. Abandonnées à elles-mêmes et face à leur triste sort, les populations tentent tant bien que mal de résister et de préserver notre patrimoine culturel et nos valeurs sociétales. Les actions, tant sur le plan national qu’à l’échelle internationale, sont multipliées de part et d’autre pour plonger le Mali dans le KO total ou l’aider à recouvrer son intégrité nationale.
La situation du Sud, disons de Bamako, incite plutôt indignation et incertitude. Indignation à l’égard d’une classe politique aux abois et d’une société civile dans une profonde léthargie. Incertitude quant aux perspectives de sortie de crise, ainsi qu’à l’espoir et aux attentes des populations et de la communauté internationale. Plongée dans une équation à plusieurs inconnues, la crise politique s’avère plus délicate que celle sécuritaire comme pour dire que le véritable problème du Mali est à Bamako. Etant donné que la reconquête du Nord passera inéluctablement par la stabilité et l’union sacrée du sud, deux évidences paraissent importantes à souligner :
Primo, la classe politique a failli à sa mission. Les partis et hommes politiques sont divisés parce qu’ils ne visent pas le même intérêt (celui de la nation). Leurs divergences résultent en réalité d’autres calculs politico-politiciens essentiellement basés sur le contrôle du pouvoir et la projection pour les futures échéances électorales. Le débat politique est dépourvu de toute éthique et souffre de l’objectivité pouvant rassembler les politiques autour d’un idéal commun, malgré leurs différences et pour l’intérêt suprême de la nation malienne. Donc, la solution au problème politique que nous connaissons n’est forcément pas politique. Secondo, le vrai défi pour le Mali réside dans la capacité des maliens à faire fi des clivages, à consentir d’énormes sacrifices et s’accepter malgré leurs divergences pour enfin trouver une solution à nos problèmes. La société civile doit monter au créneau pour exercer une pression sans précédent sur les politiques. Les médias doivent préparer les populations sur le plan psychologique et les pousser à jouer également leur rôle. Les vrais patriotes du Mali doivent sortir de leur silence. L’intérêt suprême du Mali doit primer au dessus de tout. Bref, un sursaut patriotique s’impose.
FOUSSEYNI MAIGA