BAMAKO - Pour la première fois depuis plus de quatre
mois qu`ils occupent le nord du Mali, les islamistes liés à Al-Qaïda ont
amputé la main d`un voleur d`Ansongo, un "acte ignoble" qui rend une
intervention militaire "inévitable" pour reconquérir cette région, selon le
gouvernement malien.
L`amputation s`est produite mercredi devant des dizaines de personnes sur
une place publique de la localité d`Ansongo, située au sud de la grande ville
du nord-est du Mali, Gao, a appris jeudi l`AFP auprès d`un élu et d`un chef
islamiste local qui a prévenu que d`autres amputations auraient lieu bientôt.
"Ils ont amputé mercredi la main d`un voleur à Ansogo", a déclaré, sous
couvert de l`anonymat, l`élu de la région depuis Gao, mais qui se trouvait à
Ansongo la veille et a été témoin de cette amputation d`un "voleur de moto",
selon lui. Il a précisé que "beaucoup de sang" a coulé lors de l`amputation.
Un chef islamiste d`Ansongo, Mohamed Ould Abdine, a confirmé cette
information en affirmant: "C`est la loi de Dieu". "Nous avons appliqué la
charia (loi islamique) hier à Ansongo, la main d`un voleur a été coupée. C`est
la charia qui exige ça", a-t-il ajouté.
En ajoutant "un nouvel acte ignoble à leur longue liste d`exactions et de
vexations contre les populations", les "terroristes" et les "narcotrafiquants
habillés d`un faux voile religieux, accréditent le caractère inévitable de
l`option militaire" pour reconquérir le Nord, a estimé le gouvernement malien.
"Leurs gestes de défiance hors de raison justifient la pertinence de
sanctions proposées par le secrétaire général des Nations unies (Ban Ki-moon)
en même temps qu`ils fixent les limites de tout dialogue pour leur faire
entendre raison", a-t-il ajouté dans un communiqué publié jeudi.
Le chef islamiste d`Ansongo a averti que de nouvelles amputations auraient
lieu "dans quelques jours" à Gao où, dimanche, des centaines habitants
principalement des jeunes, avaient empêché les islamistes de procéder à
l`amputation d`un voleur.
Un animateur de radio de Gao, Abdoul Malick Maïga, avait ensuite été
hospitalisé après avoir été battu par les islamistes qui lui reprochaient
d`avoir relaté cette manifestation de colère. Une autre manifestation avait eu
lieu dimanche soir pour protester contre l`agression de l`animateur.
Reconquête du Nord impossible
C`est le premier cas d`amputation rapporté dans le nord du Mali où, le 29
juillet, les islamistes avaient pour la première fois lapidé à mort dans la
localité d`Aguelhok un homme et une femme parents d`enfants sans être mariés.
Auparavant, des couples illégitimes, des buveurs d`alcool, des fumeurs, ont
été fouettés en public dans plusieurs villes, notamment à Tombouctou où ont
également été détruits des tombeaux de saints musulmans vénérés par la
population.
L`objectif des groupes islamistes armés qui se partagent le Nord -
Mouvement pour l`unicité et le jihad en Afrique de l`Ouest (Mujao) et Ansar
Dine (Défenseurs de l`islam), tous deux alliés à Al-Qaïda au Maghreb islamique
(Aqmi) - est d`imposer la charia à tout le Mali.
Le porte-parole d`Ansar Dine, Senda Ould Boumama, a déclaré que ce
mouvement espère conquérir le sud du pays "sans combat", par la persuasion.
Ces groupes qui occupent les deux-tiers du territoire malien depuis fin
mars, agissent en toute impunité, en dehors de la résistance d`une frange de
la population.
La chute de la région aux mains des islamistes a été précipitée par un coup
d`Etat militaire le 22 mars et depuis, l`armée malienne et les autorités de
transition mises en place à Bamako après le retrait du pouvoir des putschistes
en avril, sont totalement incapbles de reconquérir les territoires perdus.
La Communauté économique des Etats d`Afrique de l`Ouest (Cédéao) affirme
être prête à envoyer au Mali une force armée de quelque 3.300 hommes, mais dit
attendre pour cela une demande formelle des autorités de Bamako ainsi qu`un
mandat de l`ONU.
Une conférence destinée à finaliser les plans de déploiement de la force
militaire ouest-africaine doit se tenir à partir de vendredi à Bamako, dans
l`espoir d`obtenir ce mandat.
Parallèlement, la médiation burkinabè dans la crise malienne tente une
négociation avec certains des islamistes maliens occupant le Nord, dont Iyad
Ag Ghaly, chef d`Ansar Dine, que le ministre des Affaires étrangères Djibrill
Bassolé est allé rencontrer mardi dans son fief de Kidal.