DAKAR - Une présence en Libye du jihadiste algérien Mokhtar Belmokhtar, dont un groupe a occupé pendant plusieurs mois le nord du Mali en 2012, "serait une menace pour la paix", a estimé lundi à Dakar le président malien Ibrahim Boubacar Keïta. Dimanche, des sources sécuritaires jointes par l’AFP depuis Bamako avaient affirmé que Belmokhtar, ancien d’Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) et qui a créé son propre mouvement, "Les Signataires par le sang", s’est retiré en Libye d’où il entend désormais contrôler tout le Sahel.
"Si cela était vrai, il est évident que ce serait une menace. Je crois que c’est un personnage assez connu et pas de la plus belle des façons", a indiqué M. Keïta, interrogé sur ce sujet, lors d’une conférence de presse avec le président sénégalais Macky Sall. "Si cet individu (...) dont on nous avait (annoncé) la disparition que personne n’a regrettée, resurgissait quelque part, ce ne serait pas pour la paix, hélas", a dit le chef de l’Etat malien, en visite d’Etat au Sénégal de dimanche à mardi.
"On ne souhaite jamais la mort d’un homme mais il en est qui ne sont pas de compagnie tout à fait souhaitable", a-t-il affirmé. Appelé Belawar ("le borgne" en arabe) ou Khaled Abou al-Abbas, Belmokhtar avait été donné pour mort, "tué" par l’armée tchadienne au Mali le 2 mars
2013, une information ensuite démentie par Al-Qaïda. Ancien combattant en Afghanistan contre les troupes soviétiques, Belmokhtar a ensuite intégré les rangs des islamistes algériens avant de devenir un chef d’Aqmi.
Il avait en 2012 fait scission d’avec Aqmi et créé "Les Signataires par le sang", groupe avec lequel il a mené la prise d’otages sanglante d’In Amenas, en Algérie, en janvier 2013.
Cette attaque, au cours de laquelle 38 otages et 29 assaillants ont été tués, avait eu un retentissement planétaire en raison de la présence de nombreux étrangers parmi les otages.
Le 3 juin 2013, la tête de Belmokhtar, recherché par plusieurs pays, a été mise à prix par les Etats-Unis pour cinq millions de dollars. En août 2013, "Les Signataires par le sang" a fusionné avec une partie du Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest (Mujao) - un des groupes qui avaient occupé le nord du Mali en 2012 - sous le nom de "Al-Mourabitoune".
Interrogé au sujet de l’ancien président malien Amadou Toumani Touré, réfugié au Sénégal depuis deux ans et menacé de poursuites au Mali, M. Keïta a affirmé: "C’est une question d’ordre judiciaire. Je n’ai pas de commentaire sur les affaires judiciaires en cours dans mon pays". Général à la retraite élu président du Mali en 2002, puis réélu en 2007, M.
Touré avait été renversé le 22 mars 2012 par des militaires qui l’accusaient d’incurie dans la lutte contre les groupes armés menant alors une offensive dans le nord du pays.
M. Touré est menacé d’un procès pour "haute trahison" par le régime du président Keïta, qui a pris ses fonctions en septembre 2013. Fin décembre 2013, le gouvernement malien l’a notamment mis en cause pour avoir, pendant son mandat, laissé le Nord tomber aux mains de groupes armés.