Retour d’anciens caciques des régimes précédents, moins de jeunes promus, une équipe pléthorique, incompatibilité entre profil des hommes et leurs postes, etc. Pour le professeur d’université, le nouveau gouvernement est loin de combler les attentes du peuple malien. Mais, pour Dr. Sissoko, le Premier ministre a encore la chance de convaincre les Maliens en s’attaquant aux défis prioritaires comme la question du Nord, la sécurité alimentaire, l’éducation, la santé, mais aussi et surtout la lutte contre la corruption.
Pour cette autre livraison de l’émission « Débat de dimanche » sur la chaîne de télévision « Africable », deux thématiques étaient inscrites à l’ordre du jour. Il s’agissait notamment de la formation du nouveau gouvernement Moussa Mara et le retrait des troupes militaires tchadiennes de Centrafrique.
Autour du journaliste présentateur, Sékou Tangara, quatre invités pour décrypter l’actualité : s’agit de Gaoussou Drabo, journaliste, ancien ministre de la Communication, Bakary Traoré journaliste, chercheur, Alexis Kalambry, directeur de publication du quotidien « Les Echos », et Dr. Etienne Fakaba Sissoko, professeur à l’Université de Bamako.
D’entrée de jeu, les débatteurs ont été unanimes que ce renouvellement de l’étalage gouvernemental n’a pas connu le bouleversement attendu. Bref, pour les invités, l’essentiel des visages ont été maintenus et la réduction de taille annoncée n’a eu lieu.
Selon Bakary Traoré, des départements pouvaient être recentrés, comme l’énergie et l’eau, le sport et la jeunesse. D’une manière générale, le confrère prône le recentrage pour réduire la taille du gouvernement. « L’objectif, dira-t-il, c’est surtout l’efficacité ».
Alexis Kalambry, lui, a vu plutôt en ce remaniement « un remembrement », marqué par la difficulté dans sa composition. Ce remaniement a eu, cependant, l’avantage de pouvoir obtenir un cloisonnement, car les ministres se marchaient sur les pieds.
Quant à Drabo, il a estimé que ce changement de gouvernement traduit une volonté de changer un dysfonctionnement. La récupération du ministère de l’Intérieur par la Sécurité, a retenu l’attention du confrère, pour qui, il s’agit d’un tandem traditionnel dans la composition du gouvernement dans plusieurs pays.
L’avis est partagé par Dr. Etienne Fakaba Sissoko. Mais l’universitaire est allé plus loin et a estimé que ce remaniement a été une déception pour une partie des Maliens, et n’a permis de combler les attentes et les espoirs placés en Moussa Mara.
« Ce remaniement a été à la fois, selon ma lecture, une incompréhension, une colère et une désolation », a dénoncé Dr. Sissoko pour qui, les jeunes avaient espéré en ce remaniement la volonté de Moussa Mara (lui-même jeune), un changement de la classe politique et des visages qui doivent décider pour le Mali.
« C’était l’occasion de faire confiance aux jeunes », a-t-il déclaré, regrettant le retour d’anciens caciques des régimes précédents dont les bilans sont fortement discutables. Mais pour le professeur d’université, le problème va au-delà. Il a pointé du doigt l’incompatibilité du profil de certains ministres avec leurs postes.
S’attaquer vite aux priorités
« On me dira qu’un cadre peut s’adapter même s’il n’est pas dans son domaine. Mais je suis de ceux qui estiment que l’efficacité d’un tient à sa connaissance du secteur pour lequel on est appelé », a-t-il dit. Il s’est appesanti sur l’exemple de Me Mountaga Tall devant diriger l’Enseignement supérieur.
« J’aurais franchement préféré, compte tenu de l’importance du ministère, que l’on choisisse un enseignant. Ce dernier est mieux en mesure de connaître les principales difficultés du secteur, et les mesures d’urgence à prendre », a analysé Dr. Etienne Fakaba Sissoko, pour qui la pléthore du gouvernement n’est pas un espoir vers la réduction des dépenses de l’Etat. « Il y a donc de l’insatisfaction par rapport au changement espéré sur la taille du gouvernement et le choix des hommes », dira-t-il.
S’agissant des priorités de la nouvelle équipe gouvernementale, l’universitaire retiendra des secteurs prioritaires comme la nécessité de faire revenir Kidal dans le giron malien, impulser une nouvelle dynamique à la lutte contre la corruption et la délinquance financière, la relance économique. « Moussa Marra doit aussi convaincre les Maliens en remettant l’école sur les rails, assurer la sécurité alimentaire qui frappe des milliers de Maliens, l’accès aux soins de santé, etc. ».
Bref, pour Dr. Etienne Fakaba, si Moussa Marra veut réussir l’action gouvernementale, il doit mettre en œuvre la loi 04051 de 2004, portant organisation de la défense nationale. « J’ai de l’espoir, car dans le livre de Moussa Mara, sur la refondation de l’Etat, il parle de cette loi. J’ose croire qu’il s’inspirer de celle-ci pour réussir sa mission », a conclu Dr. Sissoko.
Ibrahim Nasser