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La «révolution verte» est possible au Mali
Publié le dimanche 20 avril 2014  |  Financial Afrik


© aBamako.com par Androuicha
Cérémonie d`ouverture de la 5è édition du Salon International de l`Agriculture (SIAGRI)
Bamako, le 18 avril 2013 au palais de la culture Hampâté Ba. Le président IBK a procédé à la coupure du ruban symbolique ouvrant la 5è édition du Salon International de l`Agriculture (SIAGRI)


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La 5è édition du Salon International de l’Agriculture (SIAGRI) vient d’ouvrir ses portes à Bamako. C’est l’occasion de passer en revue les énormes potentialités agricoles du Mali et surtout de proposer des mesures efficaces et durables pour l’émergence du secteur rural. Est-il possible de faire du Mali le grenier de l’Afrique de l’Ouest comme le professait l’ingénieur français Émile Bélime en 1934 ?

Par Cheikhna Bounajim Cissé, Bamako

Le Mali possède environ 17,4 millions ha de terres arables soit exactement le double de celles du Maroc, aujourd’hui puissance agricole régionale. Parcouru par deux des plus grands fleuves d’Afrique, le Mali dispose d’importantes ressources en eau estimées à environ 148 milliards de m3 pour une utilisation actuelle de 4% de ce potentiel. A titre comparatif, le Maroc ne possède que 20% des ressources en eau du Mali soit 29 milliards de m3.

Malgré ces énormes potentialités, le secteur agricole malien peine à décoller avec la persistance de l’insécurité alimentaire et de la dépendance extérieure.

En cause, l’organisation, la méthode et les outils

C’est pour cette raison, je propose une nouvelle stratégie agricole nationale basée sur le Plan Mali Emergence Verte (PMEV).

Mon ambition est de réaliser le passage du Mali du statut de pays agricole pauvre à celui de puissance agricole émergente, à l’horizon 2030, grâce à une volonté politique forte, une mobilisation exceptionnelle de sa population et une importante levée de fonds.

Le PMEV, en insufflant une nouvelle dynamique dans le secteur agricole, apporte une réponse globale, cohérente et structurée face aux multiples défis auxquels le monde rural malien est exposé. Il replace le secteur agricole au centre de l’économie en tant que moteur de la croissance.

Le PMEV s’inspire des expériences réussies – ou en voie de l’être – sur le continent, principalement le Plan Maroc Vert.

Le PMEV repose sur deux piliers essentiels : l’agriculture moderne (Pilier I) et l’agriculture solidaire (Pilier II). L’objectif du Pilier I est le développement accéléré de l’agriculture à forte valeur ajoutée et à forte productivité. Il s’agit de faire du paysan un entrepreneur agricole. Quant au Pilier II, l’objectif de l’agriculture solidaire est de développer une approche orientée vers la lutte contre la pauvreté, en augmentant de manière significative le revenu agricole de tous les exploitants y compris les plus fragiles. Il s’agit aussi de moderniser les exploitations agricoles familiales.

Cette agriculture moderne et solidaire prônée à travers les deux piliers du PMEV, se décline à travers trois instruments clés :

- Le programme « La Terre ne ment pas » par l’installation de 50 000 exploitations agricoles par an pour la période s’étalant jusqu’en 2030. L’objectif est de favoriser le retour à la terre et de résorber en partie l’épineux problème du chômage des jeunes.

- Le programme « Les Maliens Nourrissent les Maliens » : L’objectif est de booster la production céréalière locale pour assurer une autosuffisance, et réduire par conséquent les importations en les limitant au strict minimum d’appoint.

- L’initiative « 3M » (Les Maliens Mangent Mieux) : L’objectif est d’assurer aux populations maliennes trois repas par jour, équilibrés et accessibles à leur bourse. L’Etat veillera à la maîtrise de la qualité et du prix des céréales de base (riz, mil, maïs).

Coût du PMEV

Le Plan Mali Emergence Verte (PMEV), pour sa réalisation, nécessitera une enveloppe financière de 6 400 milliards de francs CFA (environ 10 milliards d’euros) à l’échéance 2030. Il requiert donc une nouvelle vague d’investissement massif de l’ordre de 400 milliards de francs CFA par an, mobilisable suivant le schéma suivant : 100 milliards sur les ressources budgétaires de l’Etat, 100 milliards de francs CFA auprès du système bancaire et 200 milliards de francs CFA auprès des PTF et investisseurs étrangers (par exemple dans le cadre du partenariat public/privé). Ces dispositions pourront être opérantes dans le cadre de la LOA à travers la mise en route du Fonds National pour le développement agricole (FONDA).

Ainsi, il s’agira de porter la part du secteur agricole à 15% du Budget national (contre 10% actuellement) pour les dépenses courantes et l’investissement, dont 10% sera consacrée à l’élevage (au lieu de 5,3% actuellement). S’agissant du financement bancaire, les banques implantées au Mali seront mobilisées à travers un Contrat-Plan avec l’Etat qui ciblera le dispositif (financement syndiqué en pool bancaire avec un chef de file), l’enveloppe financière et les conditions de mobilisation de ces fonds (taux, durée).

Impacts du PMEV

De façon spécifique, les résultats attendus du PMEV se présentent ainsi :

- Doublement des exploitations agricoles : Porter à 1 600 000 le nombre d’exploitations agricoles à l’horizon 2030 à raison d’une cadence annuelle de 50 000 unités (avec en moyenne une dotation foncière de 10 ha par unité).

- Surfaces cultivées : A terme, porter les terres cultivées à 11 millions d’ha soit environ 30% du potentiel (au lieu de 7% actuellement). Porter les terres irriguées à 1,4 millions d’ha (au lieu de 383 000 ha actuellement) suivant un rythme annuel de 50 000 ha les six premières années. La cadence sera portée à 75 000 ha sur les dix années suivantes. Cet effort sera réalisé par une politique de maîtrise de l’eau avec la construction d’infrastructures adéquates (barrages, bassins de retenue, puits, forages,…).

- Faire appliquer les dispositions de la Loi d’Orientation Agricole (LOA), notamment en assurant l’effectivité de la création des structures d’encadrement et de financement.

- Elevage : Relever la contribution du sous-secteur de l’élevage à 20% dans la formation du PIB (au lieu de 12% actuellement). Favoriser la construction de grosses usines d’aliments bétails (tourteaux) à l’aval des usines d’égrenage du coton.

- Pêche : Porter le nombre de pêcheurs à 100 000 au lieu de 71 000 actuellement.

- Mécanisation de l’agriculture : A l’horizon 2030, éradiquer la pratique du labour manuel (représentant actuellement 17% de la surface cultivée), réduire le labour attelé (de 72% à 60%) et renforcer intensivement le labour motorisé (de 1% à 40%). Cette modernisation des équipements doit se faire progressivement en tenant compte du rythme des investissements programmés.

- Céréales : porter les emblavures à 6 millions d’ha (au lieu de 4 millions d’ha actuellement). La production céréalière attendue en 2030 serait de 62 millions de tonnes. Cet objectif est réaliste. Il se base sur un taux de progression de 15% l’an (ces dernières années la production céréalière a augmenté à un rythme annuel de 12 à 14%).

- Coton : porter les exploitations agricoles dédiées à la culture du coton à 500 000 (au lieu de 300 000) soit un peu plus de 31% du volume global. Grâce à l’extension de la superficie cultivée, de l’enrichissement des sols, de l’augmentation du nombre des producteurs et de la modernisation de la mécanisation, la production de coton graine devrait atteindre 1,5 million de tonnes à l’horizon 2030 (avec l’objectif de 1 million de tonnes en 2020) faisant du Mali le premier producteur africain du coton (position que le pays a eu à occuper en 2003).

Mesures d’accompagnement

La bonne réussite du PMEV requiert la prise de mesures supplémentaires :

• Rationalisation des structures d’encadrement et de pilotage des projets : Réunir les différents offices agricoles sous une seule et même structure qui pourrait être dénommée « Office du Développement Agricole ». Les autres Offices seront transformés en Pôles de développement agricole. L’objectif est d’assurer un suivi de la feuille de route du PMEV dans les domaines de sa compétence, de garantir une cohérence et une gestion saine des programmes et projets, de mieux coordonner les investissements, de mutualiser les moyens dans le cadre des synergies de coût et d’assurer la disponibilité et l’accessibilité d’une information pertinente, fiable et régulière sur le secteur d’activités.

• Utilisation judicieuse et transparente des fonds des projets agricoles : Dans le budget de certains projets de développement, plus de la moitié des fonds mobilisés sont destinés aux frais d’administration (salaires, frais de consultants, prestataires, experts, assistance technique, etc.) et seulement une infime partie est affectée à la cible adressée. Inverser la tendance à travers une décision gouvernementale qui consacre l’allocation d’au moins 80% des ressources mobilisées et utilisées du projet aux bénéficiaires concernés. Les charges de fonctionnement des projets seront plafonnées à 20%.

• Formation du monde paysan : La modernisation de l’agriculture préconisée dans le PMEV nécessite plus d’emphase sur la formation des différents acteurs intervenant dans le secteur agricole (agriculteurs et porteurs de projets agricoles) dans la maîtrise des équipements et des nouvelles techniques culturales, ainsi que les cadres et les techniciens d’encadrement.

• Structures de recherches et de développement : Renforcer leurs moyens par des ressources qualifiées et suffisantes. L’objectif est d’assurer un encadrement efficace et soutenu des paysans en vue de l’introduction de nouvelles techniques culturales et de la vulgarisation des meilleures pratiques.

Conclusion
Au Mali, quand l’agriculture éternue, l’économie tousse ; et quand l’agriculture tousse, l’économie est fiévreuse. Et inversement, quand le monde rural se porte bien, ce sont tous les pans de l’activité économique et sociale qui en ressentent les effets bénéfiques.

C’est dire que les performances, actuelles et futures, de l’économie malienne dépendent en grande partie de celles de son secteur agricole. Celui-ci a la lourde responsabilité d’assurer la sécurité alimentaire d’une population de 15 millions de consommateurs qui doublera en 2030. Il s’agit là d’une priorité nationale, indispensable au développement et à la stabilité économique et sociale du Mali.

Par-delà mon ambition de faire du Mali une puissance agricole à l’horizon 2030, développée dans mon ouvrage : « Les défis du Mali nouveau », le journaliste québécois Damase Potvin résume mieux mon état d’esprit : « Rien n’est meilleur que l’agriculture, rien n’est plus beau, rien n’est plus digne d’un homme libre. Elle suffit amplement aux besoins de notre vie. »
Rédaction Financial Afrik

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