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Pour forcer IBK à négocier : Paris bloque toute livraison d’avions militaires au Mali
Publié le mercredi 23 avril 2014  |  Le Procès Verbal


© aBamako.com par CHARLES PLATIAU
Rencontre des chefs d`Etats Africains sur la lutte contre le trafic et le braconnage des espèces menacées
Paris le 5 décembre 2013 à l`Hôtel de la Marine. Le président Ibrahim Boubacar Keita et son homologue français, François Hollande s`embrassant à l`occasion de la rencontre des chefs d`Etats Africains sur la lutte contre le trafic et le braconnage des espèces menacées tenue la veille du Sommet de l`Elysée pour la Paix et la Sécurité en Afrique


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C’est entendu: le Mali n’aura jamais les moyens de restaurer, par la force, sa souveraineté militaire, politique et administrative sur la région de Kidal. Il faudra obligatoirement négocier avec les rebelles touaregs et leur octroyer leur autonomie ou quelque chose qui y ressemble. La puissante France y veille comme sur la prunelle de ses yeux.

Lors de son premier séjour présidentiel français, Ibrahim Boubacar Kéita avait dénoncé, à de multiples reprises, la situation de Kidal. « On nous force à négocier avec les groupes armés », avait-il confié à la presse hexagonale.

Au cours d’entretiens en plus faible société, les officiels français lui avaient répondu que la France ne s’opposerait pas à ce qu’il récupère par la force Kidal mais qu’elle craignait une nouvelle humiliation que pourrait infliger à l’armée renaissante du Mali les bandits armés du MNLA.

De retour à Bamako, IBK, après avoir consulté la hiérarchie militaire, s’était rendu à l’évidence : le Mali n’avait, pour l’heure, les moyens militaires de reconquérir Kidal.

En son temps, votre journal l’avait rapporté en précisant que l’état-major de l’armée conseillait d’attendre, avant toute offensive militaire, la sortie de la quatrième promotion de soldats maliens formés à Koulikoro par l’EUTM, la mission européenne d’entraînement. Cette promotion, dénommée « Balanzan », a fini ses classes le 18 mars 2014, sans que la situation de Kidal évolue d’un pouce. En réalité, les experts reconnaissent unanimement qu’on ne peut envisager de libération armée de Kidal sans force aérienne d’appui et de protection. Or, en fait d’avions de chasse, le Mali n’en a point. Quant aux hélicoptères susceptibles d’appuyer des fantassins déployés au sol, il n’y en a pas non plus, à moins de compter sur d’antiques coucous juste bons pour bombarder les nuages en vue de provoquer la pluie! Pour que l’armée ait la moindre chance de déloger les rebelles qui campent à Kidal, il lui faut des avions ou, à tout le moins, des hélicoptères. C’est d’ailleurs grâce à sa force de frappe aérienne que la France a pu vaincre, en janvier 2012, les jihadistes en détruisant leurs sanctuaires et convois éparpillés dans l’immensité désertique du nord-Mali.

Le gouvernement de François Hollande a donc théoriquement approuvé la reconquête militaire de Kidal en sachant fort bien qu’elle relève, pour le Mali, de l’impossible. Et pour que l’impossible reste…impossible, la France travaille à empêcher le Mali d’acquérir des moyens aériens de combat. Objectif patent: obliger le Mali à négocier et à faire des concessions aux groupes armés du nord.

Pour s’équiper en appareils de combat aériens, le Mali s’est adressé à plusieurs pays européens. Les Pays-Bas, la Belgique et la Grèce se sont montrés favorables à la demande malienne. La Grèce était la plus enthousiaste à vider ses hangars et à vendre à vil prix de vieux mais efficaces hélicoptères au Mali. « La France y a mis le pied », nous affirme une source militaire qui révèle que la France a agi au niveau de l’Union Européenne pour que la Grèce obtienne une compensation financière de la perte d’argent frais que lui causait l’embargo français sur le Mali.

Le pays de François Hollande a également usé de son influence auprès de Bruxelles et des Pays-Bas pour renvoyer aux calendes grecques (c’est le cas de le dire !) toute livraison d’avions et d’hélicoptères au Mali. Selon des connaisseurs du dossier, le seul pays susceptible de livrer des appareils aériens au Mali sans craindre de représailles françaises est la Russie. Il semble que le récent séjour à Moscou d’une délégation du MNLA ait eu pour but principal de sensibiliser le président Vladimir Poutine à la cause touarègue et de le dissuader de livrer des avions militaires au gouvernement malien. L’information est d’autant plus vraisemblable que le MNLA n’avait jamais mis les pieds en Russie, que ce pays a toujours fourni des armes au Mali et qu’au regard des bonnes relations entre le Mali et la Russie, les rebelles n’avaient aucune chance d’obtenir des armes de Poutine.

En l’absence d’appui aérien, le Mali n’a plus qu’à regarder les rebelles parader et dicter leur souveraine loi à Kidal. Il y a, depuis février 2012, une autonomie de fait de cette région où le Premier Ministre malien, à l’époque Oumar Tatam Ly, n’a pu se rendre. Certes, les rebelles du MNLA ont quitté l’intérieur du gouvernorat de Kidal, mais ils se sont hâtés de l’encercler aussitôt, faisant de l’édifice une simple prison virtuelle. Prudent, le gouverneur vient y prendre le thé le matin mais la nuit, il se réfugie au camp militaire malien. Ledit camp est lui-même encerclé par les forces onusiennes pour éviter tout mouvement suspect et non autorisé des soldats maliens.


La stratégie française de pression officieuse sur IBK ne s’arrête d’ailleurs pas à l’embargo sur les avions: même les armes lourdes sont interdites de livraison au Mali.


Il n’est pas exclu que la France soit pour quelque chose dans le marasme économique malien dû, en partie, au non-déblocage des aides massives promises en 2012 à Bruxelles.


Est-ce pourquoi on assiste à un fléchissement d’IBK sur le sujet lorsqu’après avoir exigé le désarmement préalable des rebelles, il a finalement ordonné la reprise sans conditions des négociations avec eux? Jusqu’où IBK serait-il prêt à faire des concessions aux groupes armés ? Il n’est un secret pour personne que les revendications des rebelles tournent autour de 4 axes essentiels: autonomie administrative de Kidal; pouvoir des autorités autonomes locales de traiter, en matière économique, avec les bailleurs de fonds et opérateurs étrangers, y compris miniers; sécurisation du territoire kidalois par une force mixte majoritairement constituée de combattants touaregs; affectation prioritaire des ressources économiques de Kidal au développement local. Il n’est pas du tout certain que ces points de revendications soient solubles dans un processus de décentralisation, même poussé. Le plus drôle, c’est que le Mali, sans être un foudre de guerre, en est à son deuxième embargo militaire en deux ans: le premier, décrété par la CEDEAO contre l’ex-junte, visait à rétablir la démocratie; le second, décidé par la France contre un président démocratiquement élu, conforte plutôt des rebelles.


Tiékorobani

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