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Soumaïla Cissé: «IBK n’a pas de feuille de route pour le Mali»
Publié le vendredi 25 avril 2014  |  Le Débat




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Dans une interview accordée à nos confrères de Jeune Afrique, le candidat malheureux à la dernière présidentielle et chef de file de l’opposition, Soumaïla Cissé, soucieux de ne pas « hurler avec les loups », n’en a pas moins une vision critique de l’action du président IBK. Une sortie médiatique qui intervient quelques jours seulement après le mémorandum du Parena intitulé «IBK, sept mois après : le Mali dans l’impasse», qui a ébranlé le régime.

Perdant du second tour de l’élection présidentielle d’août 2013, Soumaïla Cissé, 64 ans, fait office d’opposant numéro un à Ibrahim Boubacar Keïta (IBK). Mais un opposant tempéré, soucieux de ne pas tomber dans l’anathème permanent. Alors que le président traverse une mauvaise passe, le député de Niafunké dresse un bilan mitigé des premiers pas d’IBK à la tête du Mali.

Se prononçant sur le départ prématuré de l’ancien Premier ministre Oumar Tatam Ly, Soumaïla Cissé explique qu’aucun président au monde ne pense garder un Premier ministre en si peu de temps. «Il y a eu soit une erreur de casting, soit des dysfonctionnements réels. Or la lettre de démission du Premier ministre est claire : il y a un problème de gouvernance au sommet de l’État. Cela confirme ce que je pensais : il manque une feuille de route à ce gouvernement. Les priorités n’ont pas été définies», a-t-il déclaré.

En parlant du choix de Moussa Mara pour la Primature, le chef de file de l’opposition a laissé entendre que c’est un jeune qui a des qualités, tout en lui souhaitant bonne chance. Cependant, il doute de sa capacité à rassembler. «Son parti compte un seul député sur 147 à l’Assemblée nationale», a fait savoir l’ancien président de la Commission de l’Uemoa, qui ajoute que le président IBK n’a pas tenu compte du vote des Maliens aux dernières législatives.

S’agissant du bilan des premiers mois d’IBK à la présidence, Soumaïla Cissé estime que l’attente des Maliens était très forte sur des sujets comme la sécurité, la réconciliation nationale, la justice… Et selon lui, on n’a pas beaucoup bougé depuis. «Kidal est toujours quasi inaccessible. Dans le Nord, on assiste à une recrudescence de l’insécurité, et l’attaque du domicile de l’ancien président Alpha Oumar Konaré le 5 avril dernier nous rappelle que Bamako n’est pas à l’abri. Les négociations avec les groupes armés piétinent. Enfin, les investisseurs ne sont pas encore rassurés, et l’aide internationale de 3 milliards d’euros n’est toujours pas débloquée», constate M. Cissé. Faisant allusion aux bandits armés dont certains ont été élus députés sous la bannière du RPM notamment Ahmada Ag Bibi, Soumaïla Cissé affirme que «des responsables de la junte sont en détention, mais des gens convaincus d’avoir participé à des violences ne sont pas inquiétés ; certains ont même été élus députés… Cela jure avec la philosophie de l’impunité prônée par le président».
Indigné par cette situation, il explique qu’il ne faut pas laisser croire que «nous avons une justice à deux vitesses. Si des gens ont commis des fautes, il faut qu’ils les reconnaissent, qu’ils demandent pardon et que la justice soit saisie en cas de crime». En ce qui concerne le chef rebelle d’Ansar dine, Iyad Ag Ghaly, le député de Niafunké est catégorique : «À mon avis, il a franchi la frontière. Cela fait vingt ans qu’on discute avec lui…».

Avec le Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA), l’ancien ministre des Finances se montre plus prudent, en déclarant qu’il ne sait même plus qui représente ce mouvement. Le problème du MNLA, selon Soumi, c’est la crédibilité de ses représentants. «Avec qui va-t-on discuter pour être sûr que, si accord il y a, il sera respecté», s’interroge l’honorable Cissé. Idem pour le Mouvement arabe de l’Azawad.

Sur la question du blocage des négociations, Soumaïla Cissé pense que les responsabilités sont partagées. «Les groupes armés sont divisés mais le gouvernement n’a pas non plus une ligne très claire», explique-t-il. «La seule chose évidente, c’est que le président ne veut plus d’intermédiaire», affirme-t-il. Sur le choix à conduire les négociations, il juge que les objectifs qui avaient été fixés à Blaise Compaoré, médiateur désigné de la Cédéao dans notre crise, ont été atteints notamment l’organisation d’élections présidentielle et législatives, accords sur l’intégrité du territoire et sur la laïcité de l’État. «Maintenant, il faut voir quelles sont les perspectives nouvelles qui s’offrent au Mali», croit savoir M. Cissé.

Pour une autonomisation plus large dans le nord, l’enfant de Niafunké pense qu’une large décentralisation pourrait être la solution pour toutes les régions du Mali. «Mais si on veut décentraliser, il faut s’assurer de la qualité des ressources humaines et d’un apport financier sur le long terme – dix ans au minimum», prévient-il. Et de poursuivre : «Il faut un « plan Marshall » pour les régions défavorisées, en particulier celles du Nord».

S’expliquant sur la mission des Nations unies dans notre pays, Soumaïla Cissé déclare que beaucoup de Maliens s’attendaient à ce que la Minusma aide notre armée à reconquérir Kidal, ce qui n’a pas été le cas. «À Gao et Tombouctou, les Casques bleus semblent commis à un service minimum», constate M. Cissé qui précise que seule la France mène la chasse aux jihadistes.

Interrogé sur sa mise en accusation par le ministre de la Justice, Garde des Sceaux, Mohamed Ali Bathily, pour avoir spolié 22 milliards de FCFA lorsqu’il était ministre des Finances, Soumaïla Cissé estime que leur opposition est républicaine. «Nous critiquons les programmes et nous nous prononçons sur les résultats», a indiqué le candidat malheureux à la dernière présidentielle. «J’ai déjà solennellement demandé au ministre d’apporter le moindre début de preuves à ses allégations. J’attends encore», précise Soumi.
À propos du ton mesuré de son discours d’opposant, Soumi a fait savoir qu’il ne veut pas hurler avec les loups. «Notre opposition est républicaine, nous critiquons les programmes et nous nous prononçons sur les résultats», insiste M. Cissé.

Travailler avec IBK, l’opposant numéro un n’exclut rien. Mais, dit-il, «Je ferais tout pour que mon pays s’en sorte. Aujourd’hui je suis dans l’opposition et je critique ce qui n’est pas bon. Mon combat est de construire une opposition républicaine avec un statut reconnu par l’État».

Fombus avec JA

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