L’artiste malien Sidi Touré vient d’une longue tournée européenne et américaine au cours de laquelle, il a produit plusieurs concerts et spectacles afin de vendre l’image de notre riche culture à travers les valeurs songhoï qui font aujourd’hui notre fierté. Durant cette tournée, il était accompagné par son groupe composé, entre autres, de Kalil Touré à la guitare solo, Kandia Fa au n’goni et Alex Baba à la calebasse.
De retour au bercail la semaine dernière, l’enfant prodige de la musique songhoï, Sidi Touré, nous a accueillis chez lui pour nous parler de son voyage qu’il a lui-même jugé fructueux. «Notre tournée euro-américaine a été fructueuse pas en terme d’argent, mais en matière d’expérience», a-t-il expliqué. Puis de poursuivre : «J’ai appris beaucoup de choses de cette tournée, car elle m’a permis de partager ma petite expérience vécue dans le monde de la musique. Aussi, j’ai rencontré de grands musiciens d’Europe et d’Amérique qui ont eu des mots très aimables à l’égard de la culture malienne. J’ai eu également l’honneur de rencontrer un des grands bluesmen de Chicago, Bill Brechet, qui dit que quand je joue, il a la chair de poule. Il m’a même promis de jouer dans mon prochain album».
En terme du donner et du recevoir, ajoute-t-il, cette tournée l’a été. «Pour ce faire je lance un appel à la jeunesse de mon pays à continuer à travailler et à croire en eux-mêmes, car après la fatigue, c’est le bonheur. Il faut alors éviter le découragement qui ne mène à nulle part car, comme le dit un adage, celui qui cherche du miel dans une grotte, ne regarde pas le bout de sa hache», conseille notre artiste.
À propos du genre musical qu’il fait, Sidi Touré affirme : «Je fais du songhoï Zarma, mais les différents médias américains diront que je fais du Sahel Blue, Niger bleu, Désert…». À en croire Sidi Touré, le Sahel Bleue a tiré ses racines en Afrique avec les Noirs lors de la déportation du commerce triangulaire, de l’Europe jusqu’aux Etats. Le Bleus, c’est la détresse en général, car les bluesmen chantent toujours leurs détresses, c’est-à-dire les maux vécus.
Sidi Touré a à son actif plusieurs albums dont «Koima», sorti officiellement en 1991 ; «Hogga» ; «Holley tiemaye» ou «la danse des possédés» en 1996 ; «Sahel Folk» ; «A Lafia» (qui veut dire la paix).
À la question de savoir si le vivre-ensemble est possible au Nord du pays entre les différentes communautés qui y vivent, après la crise que notre pays a traversée entre 2012-2013, l’artiste dira que nous sommes condamnés à vivre ensemble. Car, dit-il, ce sont des peuples qui ont vécu ensemble depuis des temps immémoriaux et il n’y a pas un Songhaï qui n’a pas un frère Arabe, et vice-versa. «Je ne suis pas contre l’impunité, mais je pense que les auteurs de crimes et autres exactions doivent répondre de leurs actes, condamnés s’il le faut. Mais la réconciliation nationale est plus que nécessaire, car, sans paix, rien n’est possible», soutient Sidi Touré.
Moins visible dans les différents festivals au Mali, l’artiste dira que la faute n’incombe pas à lui, mais plutôt aux promoteurs des festivals qui préfèrent chercher ailleurs, par complexe. Sinon, s’interroge-t-il, comment peut-on expliquer que nous soyons invités dans les grands festivals en Europe et aux Etats-Unis, mais pas chez nous au Mali ? D’autant que selon lui «nous pensons que le rayonnement de la culture malienne doit passer par la promotion de la musique malienne».
Issu d’une lignée noble, Sidi Touré a dû surmonter les réticences de sa famille pour suivre sa vocation musicale. Figure reconnue sur la scène musicale africaine, ce chanteur-guitariste a dirigé l’orchestre de Gao, The Songhaï Stars, et a été récompensé deux fois en tant que Meilleur chanteur dans le cadre des Maliens national Awards, signé depuis 2011 par le label américain Thrill Jockey.
Par ailleurs, Sidi Touré a tenu à remercier l’équipe de ReporterMag pour lui avoir consacré ces quelques lignes.
Alhousseini TOURE