Cela fait 20 ans jour pour jour que les populations de Sabalibougou-Est ont été autorisées à rester sur les terres par un arrêt de la Cour suprême du Mali. Face à l’inamovibilité de l’Etat, elles ont décidé de se prendre en charge. Mais, il semblerait que le gouvernorat du district a d’autres ambitions pour ces terres. Il vient d’effectuer une visite sur les lieux, le vendredi dernier.
En effet, c’est une délégation du gouvernorat composée d’architectes et de géomètres qui s’est rendue sur le site de Sabalibougou Est pour s’enquérir, disent-ils, de l’état d’évolution des travaux que les populations sont en train d’effectuer sur le terrain.
Pour cette simple visite, c’est une véritable mobilisation des forces de sécurité composées d’une centaine de garde et de policiers qui ont encadré les lieux comme si la délégation avait peur de quelque chose. Après le départ de la délégation, qui n’a pas daigné nous adresser la parole (ils nous ont même invités à quitter les lieux), nous avons rencontré le président de l’association des habitants de Sabalibougou Est, Famory Kamissoko, qui venait de tenir une assemblée générale d’information avec les populations, surprises du déploiement massif des forces de l’ordre sur les lieux.
Selon lui, cela fait 20 ans jour pour jour que la cour suprême a rendu un arrêt en leur faveur contre le maire de la commune V de l’époque. Cet arrêt dont nous nous sommes procuré une copie est enregistré sous le numéro 80 du 30 juin 1994, ordonne à la mairie le sursis à l’exécution de la décision de casse de Sabalibougou Est. Il stipule que la réhabilitation de Sabalibougou-Est est un impératif à poursuivre. Que la réhabilitation n’entraine pas nécessairement une casse systématique (rasage) de toutes les concessions existantes mais les tracés des voies et autres aménagements nécessités par les besoins d’intérêt collectif. A cet effet, les opérations en cours sont annulées. L’arrêt stipule aussi que les opérations doivent être reprises avec la collaboration des populations.
Aidé par le secrétaire général de l’association, Lacina Mariko, le président affirme que rien n’a été fait dans ce sens jusqu’en l’an 2000, où les autorités reviennent à la charge en cassant les concessions. Ils ont saisi le juge des référés du tribunal des céans. La section administrative de la Cour suprême par les ordonnance n°04 du 26 septembre 2000 et n°05 du 9 octobre 2000 pour ordonner l’arrêt des démolitions et d’associer les populations.
M. Kamissoko soutient que depuis, face à l’inamovibilité des populations, ils ont engagé un géomètre et un architecte pour procéder à la viabilisation et au morcèlement, et que pendant tout le processus, ils ont écrit des correspondances aux autorités à tous les niveaux mais qu’ils n’ont jamais reçu de réponse. Qu’après leur morcellement, les parcelles furent distribuées aux populations par tirage au sort pour déterminer le numéro de lot de chacun avec l’aide d’un huissier.
Mais ce qui parait bizarre pour le vieux Kamissoko, c’est que Hady Traoré, l’actuel Gouverneur du district, ait collaboré avec eux dès le début mais aujourd’hui il change sa veste et leur fait la guerre.
Aujourd’hui, les autorités s’agitent parce que les propriétaires ont commencé à mettre leur parcelle en valeur, pense t-il. Il soutient également que certains agents du département de l’urbanisme sont en train d’émettre l’idée de les recaser à Kabala. C’est hors de question, a dit le président, car Sabalibougou Est ne saurait leur échapper. Kamissoko conclut qu’ils ne demandent rien d’autre que l’application de la loi. Qu’ils sont et resteront derrière la loi. Ils sont sereins et aucun spéculateur ne saurait venir s’accaparer de leur terre.
Harber MAIGA