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Les impasses de la lutte contre la corruption au Mali
Publié le vendredi 16 mai 2014  |  La Revelation




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Tous les anciens gouvernements de la troisième république diront qu’ils ont lutté, certains oseront même dire efficacement, contre la corruption au Mali. Cependant aucun n’a été capable de mesurer le phénomène pour en connaître l’étendue, de procéder à des mesures afin de déterminer l’ampleur des efforts qu’il aurait entrepris et de connaître les résultats de ces efforts. Vous me direz, et j’en conviendrais aisément, que celui qui recouvre l’aiguille de son pied ne peut participer aux efforts de recherche de ladite aiguille.

En lieu et place d’actions organisées et coordonnées nous n’avons eu droit qu’à des slogans éculés, répétés à ne plus en finir au point que les messagers ne se donnaient même plus la peine de faire semblant de croire à ce qu’ils disaient. Rappelez-vous de la gymnastique à laquelle s’est livrée quelques ministres d’ATT pour démonter le rapport du VEGAL Sidi Sosso Diarra en nous expliquant que « manque à gagner » dans le contexte dudit rapport est une expression ésotérique que seuls les initiés à la grande confrérie des pilleurs du pays comprennent et qu’elle ne signifie en aucun cas mauvaise gestion, surfacturation, entente illicite et détournement de fonds.

Le Président de la république, à travers ses collaborateurs, fait mine de découvrir l’état du Mali en s’étonnant de la profondeur et de l’étendue de ses problèmes. Puisqu’il n’a pas fini de prendre la mesure des défis qui l’attendent, nous l’aidons ici dans le domaine de la corruption en lui rappelant différentes mesures disponibles sur le phénomène. Il saura alors d’où il part et régulièrement aussi la qualité des résultats qu’il aura obtenu.
Etendue de la corruption au Mali.

Divers indicateurs de gouvernance indiquent que la corruption est perçue comme très largement étendue et systémique à tous les niveaux de la société au Mali. Citons parmi les plus important ceux de Transparency International (Indice de perception de la corruption), de la Banque mondiale (les Indicateurs de gouvernance), du Forum économique mondial (Rapport sur la compétitivité mondiale), de l’UEMOA (l’observatoire des pratiques anormales de l’UEMOA).

Transparency International définit la corruption comme étant l’abus à des fins privées d’un pouvoir reçu en délégation. Cette définition englobe les pratiques de corruption dans le secteur public ainsi que dans le secteur privé. L’Indice de perception de la corruption (IPC) classe les pays selon la perception de la corruption dans le secteur public. Il s’agit d’un indicateur composite qui associe différentes sources d’information sur la corruption,
permettant ainsi d’établir des comparaisons entre les pays. L’indice varie de 0 (haut niveau de corruption) à 10 (haut niveau d’intégrité). Les résultats suivant illustrent la gravité du problème de la corruption au Mali selon Transparency International.

2013 2012 2011 2010 2009 2008 2007 2006 2005 2004 2003
IPC Mali 2,8 3,4 2,8 2,7 2,8 3,1 2,7 2,8 2,9 3,2 3
Pendant la décennie écoulée le Mali s’est donc systématiquement classé parmi les pays les plus corrompus du monde et ce avec un niveau de perception de la corruption très élevé.
Selon le dernier rapport de l’observatoire des pratiques anormales de l’UEMOA «le Mali reste le pays de la région où les prélèvements illicites sont les plus levés et comme d’habitude tous les services contribuent significativement aux prélèvements.

Les rapports sur la compétitivité mondiale du Forum économique mondial identifient année après année la corruption comme l’une des plus grandes contraintes pour faire des affaires au Mali.

L’enquête entreprise de la Banque Mondiale conduite en 2003 supportent ces vues. Environ 60% des entreprises ont affirmé payer des paiements de facilitation pour que les choses soient faites, suggérant par cette occasion que la petite corruption est largement étendue dans le pays. Près de 50% des PME identifient la corruption comme un obstacle majeur ou grave à la conduite des affaires au Mali . Selon une évaluation du climat des affaires de la Banque mondiale en 2004 presque 3,5% du chiffre d’affaires des entreprises disparaissent dans des paiements informels.

Formes de la corruption au Mali.

Le portail Anti-Corruption Business rapporte que le clientélisme et diverses formes de corruption politique incluant l’achat de vote sont largement répandus au Mali . La corruption prévaut le plus dans les règlements des litiges et dans les marches publics.

Le système judiciaire est notoirement perçue comme inefficace et corrompue, manquant d’indépendance vis-à-vis de l’exécutif et contribue à une culture de l’impunité des officiels corrompus . L’Afrobaromètre 2004 révèle qu’une majorité de maliens pensent que le système judicaire accorde des traitements préférentiels aux nantis . Cela est confirmé par les points de vue des entrepreneurs et des membres de la communauté internationale qui se plaignent de l’inefficacité de la justice dans les enquêtes sur le climat des investissements et des entreprises conduites par la Banque mondiale et mentionnées ci-dessus.

Les milieux d’affaires en général n’ont pas de confiance dans les capacités de la justice de faire respecter la loi et remettent en question l’équité des décisions de justices. Faire respecter les contrats commerciaux est difficile et la résolution des litiges implique souvent le paiement de pots de vin.

L’attribution des marchés publics apparaissent aussi particulièrement vulnérables à la corruption. L’enquête entreprise ci-dessus mentionnée de la Banque mondiale indique que les règles des appels d’offres sont largement ignorées lors de l’attribution de contrats publics. 66% des entreprises enquêtées s’attendent à devoir payer des pots de vin ou offrir des cadeaux valant environ 5% du contrat afin d’obtenir un marché public.
Mesure des progrès dans la lutte contre la corruption.

Les indicateurs évoqués plus haut ne sont pas spécifiques au Mali, quoique très utiles ils sont surtout élaborés à des fins de comparaison internationale afin de créer de l’émulation entre les pays qui veulent bien avancer et de faire pression sur les pays développés pour qu’ils fassent à leur tour pression sur les « pays en voie de disparition », parce qu’il faut avoir la décence de ne pas parler de développement, afin de lutter contrer le fléau de la corruption, ce qui dans bien des cas revient à demander à leurs dirigeants à se faire hara kiri. Je propose que le Président de la république, il faut bien lui accorder au moins en début de mandat le bénéfice du doute, instruise au BVG de définir des indicateurs de mesure des progrès dans la lutte contre la corruption et de les publier en même temps que son Rapport annuel.

La définition et la mesure régulière de ces indicateurs seront faites avec la même indépendance que celle qui préside l’élaboration des Rapports du bureau. Nous saurons alors de manière transparente la réalité des efforts et les résultats obtenus par le Gouvernement dans la lutte contre la corruption au Mali et le Gouvernement saura les goulots d’étranglement qui l’empêcheraient d’aller plus loin.
Sur la période 2004 à 2010, le BVG a effectué 117 vérifications financières dans 79 entités.

Elles ont concerné tous les secteurs (13) de développement du Cadre Stratégique pour la Croissance et la Réduction de la Pauvreté CSCRP (2007-2011) adopté par le gouvernement malien en 2007. Ces vérifications ont mis en lumière plus de 383 milliards de FCFA de manque à gagner pour le Trésor Public et les entités vérifiées. Une attention particulière a été accordée aux services fiscaux, qui ont connu 28 missions avec des déperditions financières d’environ 70% du manque à gagner total.

Ces résultats ont été obtenus à travers la vérification des impôts et taxes dus soit sur des opérations d’importation, soit sur des opérations domestiques ainsi qu’à la suite d’examens de la gestion des ressources et des dépenses par les services du Trésor Public. Dans les rapports du BVG Mali, le manque à gagner est tout montant qui aurait dû être dans les caisses de l’État si tout avait été fait dans le strict respect de la loi et des principes de la comptabilité

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