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Célébration de l’Aid El Fitr à Bamako / Sous le signe de la crise au Nord… Taïfouné Makamad, Chef de trois familles des déplacés du Nord, une de Kidal et deux de Tombouctou : «On est ici malgré nous»
Publié le mardi 21 aout 2012  |  Le 22 Septembre




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Le grand problème auquel nous, chefs de familles déplacées, faisons face aujourd’hui, c’est que nous n’avons rien à faire, aucune activité à entreprendre ici à Bamako. La vie est trop chère. On est ici malgré nous. J’ai une très grande famille et, pour le moment, je n’arrive pas à subvenir à ses besoins. Ce qui me retient encore à Bamako, c’est que les nouvelles qui me parviennent de ceux qui sont restés ne sont pas bonnes: les gens vivent quotidiennement dans la peur, à cause des pratiques des islamistes.

Minty Maïga, Elève déplacée de Kidal : «Dieu merci, Orange nous a donné deux moutons»

Nous avons bien passé la fête. Seulement, à Kidal on a des amis, des parents, qui nous manquent en cette fête de Ramadan. Ici, à Bamako, on ne s’est pas encore fait des amis, on n’a pas où aller aussi. On est donc restés à la maison. Dieu merci, Orange nous a donné deux moutons. Nous, élèves déplacés du Nord, sommes très préoccupés par nos études. On a composé ici à Bamako, mais personne d’entre nous n’a passé les examens, seulement quelques rares cas parmi les déplacés qui ont été inscrits dans des écoles privées. Le maître nous a dit qu’il y aurait une session en octobre pour les élèves du Nord, mais nous ne savons pas si celle-ci concerne seulement les élèves qui sont restés au Nord ou tout le monde.

Saloum Baba Hamadi, Chauffeur de camion remorque, Corridor de Dakar : «Je suis de cœur avec tous nos parents du Nord»

Je me sens très bien, puisque j’ai fêté en famille. Tout le monde est présent ici à Bamako et c’est une rare occasion que la fête de l’Aïd El Fitr offre à tous les membres de la famille de se retrouver ensemble chaque année. Je suis de Tombouctou et, comme tous les Maliens, je dois avouer que la crise au Nord de notre pays m’a vraiment surpris. On ne s’y attendait pas et c’est quelque chose que nous n’arrivons pas à maîtriser. Je suis de cœur avec tous nos parents qui sont restés au Nord et je prie Dieu pour que cette crise prenne fin très vite, pour que tous les fils du Mali se retrouvent et continuent à vivre ensemble, dans une paix totale.

Sékou Coulibaly, Électromécanicien à l’ACI 2000 : «On s’est juste contenté de peu»

La fête de cette année n’a rien de commun avec les autres fêtes de Ramadan. On s’est juste contenté du peu qu’on avait pour que la fête soit belle. Nous sommes frappés de plein fouet par cette crise au Nord, puisque nous travaillons beaucoup avec des partenaires étrangers. Malheureusement, beaucoup d’entre eux sont déjà rentrés chez eux. Pour le moment on se contente de travailler avec des nationaux, mais le rendement n’est pas le même. Mes pensées, en cette fête de l’Aïd el Fitr, vont surtout vers nos frères et sœurs du Nord, qui passent leur fête dans une zone sous l’occupation barbare des islamistes. Tout bon Malien doit se dire qu’aujourd’hui ce sont nos frères du Nord et que demain ce sera peut-être nous du Sud qui subirons le même sort entre les mains de ces islamistes.

Mme Maï Coulibaly, Ménagère : «Seuls les enfants ont reçu des tenues de fête»

Cette année, Dieu merci, on a bien fêté. Seulement, cela n’a pas été comme l’an passé, à cause de la crise au Nord. Déjà que le panier de la ménagère était très pauvre, on s’est seulement débrouillés à rendre la fête belle. La crise nous a beaucoup affectés. Seuls les enfants ont reçu des tenues de fête, parce que celles-ci ne coûtaient pas grand-chose. Je souhaite vivement que les islamistes quittent notre pays. Ce sont eux qui nous ont amené tous ces problèmes.

Tahirou Ballo, Marabout à Para Djicoroni : «Dieu a voulu qu’il en soit ainsi»

Tout ce qui arrive à l’homme, arrive par la volonté de Dieu, le Tout Puissant. Nous ne pouvons rien contre cela. Alhamdoulaye, Dieu a voulu qu’il en soit ainsi. Que nous fêtions dans ces conditions cette année. Nous ne pouvons que le remercier pour cela. Peut être que nous lui avons fait quelque chose. Donc nous devons implorer son pardon, sa grâce, pour surmonter cette crise. Je demande à nos responsables d’être honnêtes, sincères avec le peuple. Tous les Maliens sont les mêmes. Beaucoup de nos problèmes dépendent du comportement de nos responsables. Je ne dis pas qu’ils ne sont pas droits avec le peuple, mais je les invite à l’être davantage encore. La crise dans le Nord du pays ne touche pas que les populations du Nord. Elle est nationale. Nous sommes tous meurtris par cette crise. Je souhaite qu’elle soit bientôt un triste souvenir pour nous.

Almady Touré, Déplacé de Gao à Bamako : «J’ai fêté dans des conditions difficiles»

Pour moi, la fête d’Aïd El Fitr, communément appelé fête de Ramadan, n’a été qu’un non évènement. A part la prière, au cours de laquelle d’ailleurs j’ai eu une pensée pieuse pour nos compatriotes restés au Nord, je suis resté comme ça. Je n’ai pas du tout senti qu’il y avait une fête. Je demande aux autorités de sortir de leur attentisme pour faire quelque chose pour la libération de nos terres occupées. On a assez attendu. Chaque jour, ce sont les mêmes propos, les mêmes condamnations. Je ne pense pas que la négociation va faire partir ces gens. Il faut la force. Ils se sont installés par la force et c’est la force qui les fera partir. Ce ne sont pas des islamistes. Ce sont des bandits armés qui se cachent derrière la religion pour s’adonner au trafic de drogue.

Mamadou Camara, Commerçant à Lafiabougou : «Je connais très peu de chose sur la situation au Nord»

Je souhaite d’abord une très bonne fête de Ramadan à toute la communauté musulmane du Mali. Dieu merci, à Lafiabougou, nous avons bien fêté, malgré le contexte difficile marqué par l’occupation des régions Nord du pays. S’agissant de cette crise, je vous avoue que je connais très peu de choses sur cette situation. Mais je demande aux Maliens de rester unis et solidaires pour faire face à cette situation. A mon avis, on ne parviendra jamais à faire face à cette rébellion sans une stabilité au Sud, particulièrement à Bamako ici. Pour la reconquête de ces régions, je souhaite qu’il y ait une parfaite entente entre notre armée et les populations, principalement les jeunes de ces régions, sans quoi on ne parviendra pas à faire face à ces occupants.

Amidou Doumbia, Diplômé sans emploi : «On ne peut pas fêter alors que le pays est dans une situation de guerre»

La fête de ramadan n’a pas eu toute sa saveur. Les gens ne peuvent pas fêter alors que les 2/3 du pays sont sous occupation. On ne peut pas fêter pendant que le pays est dans une situation de guerre. Pour un sursaut national, les premiers coups de canon auraient dû être entendus le jour de la fête. Mais, malheureusement, on a l’impression que le gouvernement traine les pieds. Les responsables politiques sont en train de s’entredéchirer pour des places, pendant qu’il y a des Maliens qui souffrent injustement. Quand la nation est en péril, ce n’est pas le moment de revendiquer. On doit chercher à sauver le pays. Mais hélas!

Propos recueillis par Pierre Fo’o Medjo et Yaya Samaké

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