Après les combats de mercredi dernier, le Mali a toujours les moyens de libérer Kidal, militairement ou politiquement. L’évaluation et le renforcement des dispositifs en place en demeurent la condition sine qua non.
Les Forces armées maliennes (FAMa) ont momentanément baissé pavillon à Kidal le mercredi dernier. Face au prétendu « Mouvement national de libération de l’Azawad » (MNLA) ainsi qu’aux jihadistes et narcotrafiquants, l’armée malienne n’a pas pesé lourd. Nos militaires ont laissé Kidal à l’ennemi. Celui-ci ne s’est pas fait prier pour ensuite consacrer ses efforts à d’autres conquêtes.
L’optimisme affiché par les autorités la veille du déclenchement de l’opération de « nettoyage« de Kidal s’est transformé en désillusion. La Grande muette n’est pas prête à répondre aux défis de l’heure. Elle a besoin d’une remise à niveau certaine pour être à même d’assurer ses missions régaliennes. Les conséquences de cette débâcle étant lourdes à la fois sur le plan humain que politique, l’Etat devra relever la tête, à travers une réorganisation de son système de gestion de la situation.
Quelle que soit la stratégie que le gouvernement adoptera, il doit y avoir des remises en question dont le seul but ne sera que de ressortir avec des méthodes efficaces. Cela est d’autant plus vrai que ça ne sert à rien de s’empresser si l’on n’a pas les moyens de sa politique.
Les événements de ces derniers jours à Kidal devront inciter le gouvernement à rebattre les cartes. N’étant pas à mesure de faire cavalier seul, le Mali a indéniablement besoin de l’accompagnement de ses partenaires en ces moments difficiles. Toutefois, il faudrait pouvoir séparer le bon grain de l’ivraie.
Les intérêts sont croisés et tous ceux qui parlent aujourd’hui de la sauvegarde de l’intégrité territoriale du Mali n’agissent pas réellement dans ce sens. Il revient aux autorités de faire en sorte que ceux qui prétendent aider le Mali à recouvrer tout son territoire et son honneur ne soient pas au cœur de la stratégie gouvernementale.
L’amalgame n’aiderait pas certes, mais il faudrait que le gouvernement fasse preuve de responsabilité vis-à-vis de certaines ambiguïtés extérieures. Quand le président de la République se confie aux partenaires du Mali sur la situation à Kidal et qu’au sortir de ses échanges avec ses hôtes, les ennemis de la nation sont expressément informés des décisions présidentielles comme s’ils l’avaient aidé à les prendre, il y a anguille sous roche.
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Les groupes armés du Nord ont des affinités avec certains « amis« du Mali, qui excellent dans la duplicité. La communication est primordiale pendant les crises et l’on ne peut pas vaincre un ennemi si l’on ne communique pas efficacement. A eux seuls, les coups de gueule ne suffisent pas étant donné que les convictions gouvernementales doivent être perceptibles dans des actes concrets.
Les autorités devront aussi renforcer leurs stratégies de gestion de l’armée. Malgré la bonne tenue de l’élection présidentielle, IBK a été investi au milieu d’une crise. Le dossier du Nord était une urgence à gérer. Et la réforme de l’armée s’est naturellement imposée comme un objectif majeur du nouveau régime. Mais, force est d’admettre que cette reconstruction a un long chemin devant elle.
Les événements de Kidal en sont la parfaite illustration : en 9 mois de gestion IBK, aucun plan n’a été mis en place pour éventuellement faire face au cas urgent qu’est Kidal. Il est inutile de dire que la Grande muette n’est pas au niveau escompté. La médiatisation et les shows ont pris le dessus sur les véritables enjeux. Sous d’autres cieux, au lendemain de son investiture, IBK aurait instruit à la hiérarchie militaire de s’atteler à la formation d’unités spéciales susceptibles de répondre présent si besoin est.
Chez nous, il a fallu une visite sous haute tension du Premier ministre à Kidal pour qu’on se tourne vers une armée que l’on n’a pas suffisamment préparé à agir. C’était donc trop demander à des militaires mal en point qui, contrairement à leurs homologues tchadiens, ne sont pas familiers avec les réalités du désert.
IBK était donc contraint d’accueillir à bras ouverts le « cessez-le-feu« demandé par l’ONU. Cette trêve n’est pas une fin en soi. Le Mali a trébuché, mais il doit se relever. Pour cela, IBK, qui dit prôner le dialogue, doit se servir de l’expérience de certains de ses prédécesseurs. Ces derniers pourraient bien l’aider en lui prodiguant de sages conseils parce que tous ceux qui ont gouverné le Mali ont eu à gérer cette rébellion récurrente, avec des expériences variées.
Surtout qu’il ne sert à rien de signer des deals sans lendemain. Conclu à la veille de la dernière élection présidentielle, l’Accord de Ouagadougou est certainement morte de sa belle mort à cause de ces violents combats. Maintenant, place doit être faite à d’autres protocoles qui seront l’aboutissement de l’établissement d’un climat de confiance entre les belligérants. En attendant, les groupes armés feront de la surenchère, étant nantis de leur hégémonie sur Kidal et ses environs.