Le samedi 17 mai 2014, le Premier Ministre Moussa Mara débarque à Kidal. Il n’ignore pas le danger auquel il s’expose. La veille, à Gao, ses services lui ont décrit l’atmosphère malsaine de Kidal, le nombre réduit des soldats maliens présents au camp n° 1 de la ville et, surtout, la volonté affichée du MNLA, le mouvement séparatiste touareg, d’empêcher toute visite gouvernementale à Kidal avant la fin des négociations entamées sous l’égide de la communauté internationale. La MINUSMA, force onusienne, et la force française Serval ne s’enthousiament pas, elles non plus, de cette visite qui pourrait ouvrir un engrenage. Conscient du danger qui rôde à Kidal, Soumeylou Boubèye Maiga, ministre de la Défense, préfère rester à Gao au lieu d’accompagner le Premier Ministre dans la capitale des Ifoghas. Même refus des deux députés de Kidal, pourtant issus des groupes armés.
Trois éleveurs nigériens, dont un chef de tribu enlevés par des bandits armés
Kidal : les FAMA frappent, le MNLA appel au secours
Visite risquée de Mara à Kidal
Au matin du samedi 17 mai, une foule d’agitateurs à la solde du MNLA occupe l’aéroport de Kidal, bien décidée à s’opposer à l’atterrissage de l’avion de Mara. Elle pense rééditer le coup qui a, quelques mois auparavant, contraint l’ex-Premier Ministre, Oumar Tatam Ly, de rebrousser chemin. Mara passe outre aux mises en garde. Il n’a pas, en effet, le tempérament réservé d’Oumar Tatam Ly; de plus, ancien rival politique nommé Premier Ministre au détriment du parti majoritaire, le RPM, Mara tient, davantage que son prédécesseur, à donner des gages de loyauté et d’efficacité au président IBK. Ne vient-il pas, d’ailleurs, de s’illustrer, sur les ondes nationales et devant les députés, dans la défense acharnée de l’achat du très polémique avion présidentiel ? Mara emprunte donc un hélicoptère de la MINUSMA qui, après une escale au camp n° 2 de Kidal, siège de la force onusienne, le dépose à la garnison malienne de la ville.Vêtu d’un boubou et d’un bonnet, accompagné d’une forte escorte militaire et d’une foule de badauds qui scandent son nom, le Premier Ministre se rend au gouvernorat. Là l’attendent les administrateurs civils de la région: le colonel d’aviation Adama Kamissoko, nommé gouverneur le 2 mai 2013; les préfets et sous-préfets en grand uniforme kaki.
Le chef du gouvernement leur tient un discours martial, sous l’oeil des caméras de l’ORTM. A l’entendre, Mara n’admet pas que Kidal passe, de fait, pour une principauté étrangère: « Qu’on nous dise Kidal fait ou non partie intrégrante du Mali! ». L’allusion à la France et à la MINUSMA est manifeste: celles-ci passent pour aider le MNLA à perpétuer leur mainmise sur Kidal, en violation de toute légalité. Mara promet de remettre la région sous l’autorité de l’Etat, d’y redéployer l’administration et d’y assurer la sécurité des biens et des personnes. Comme partout au Mali.
Les premiers coups de feu éclatent alors que la réunion se poursuit. Dehors, des combattants rebelles touaregs veulent gâcher la fête en organisant l’invasion du gouvernorat. Il faut, de toute urgence, évacuer la délégation primatoriale. Il ferait beau voir qu’un groupe rebelle s’empare de la personne du chef du gouvernement ! Comme tout le monde ne trouve pas place dans les véhicules présents, Mara, ses ministres, ses plus proches collaborareurs et l’état-major militaire qui l’accompagne sont conduits au camp militaire malien. S’il n’a pas voulu venir au gouvernorat dans un véhicule de la MIUNUSMA, Mara rentre, en revanche, au camp malien à bord d’un engin blindé onusien. Un petit groupe de soldats maliens monte fébrilement la garde devant le gouvernorat. Il est facilement décimé par les rebelles touaregs qui investissent l’édifice de vive force. Les 24 fonctionnaires présents dans le bâtiment sont pris en otages. Pour bien montrer leur détermination et, accessoirement, ressusciter dans le subconscient malien le terrible syndrome d’Aguelhok, les assaillants égorgent 5 représentants de l’Etat et 3 personnalités civiles. Il s’agit de Mory Diarra, préfet de Tin-Essako; Amadou Belco Bah, préfet de Kidal; Sékou Sissouma, préfet adjoint de Tessalit; Paul-Marie Sidibé, préfet de Tinzawaten et Mahamane B. Touré, sous-préfet de Boureissa. Aghaly Ag Inamoud Yattara, préfet adjoint de Kidal, est annoncé parmi les victimes; son épouse prend les habits de deuil mais, par miracle, l’intéressé survécu: les bourreaux rebelles l’ont laissé en vie en lui rappelant qu’il était, en tant que Belha, leur esclave. Les corps des victimes sont jetées dans la rue par les tueurs, ramassées par une patrouille de la MINUSMA puis remises aux militaires maliens.
Les malheureux administrateurs sont inhumés à Kidal, en présence du gouverneur Kamissoko. L’odieux crime suscite l’ire de la communauté internationale. Le représentant spécial du Secrétaire général de l’ONU au Mali et patron de la MINUSMA, Albert Koenders, martèle : «Ce crime barbare est totalement inacceptable et les responsables devront répondre de leurs actes. Une enquête doit être menée rapidement afin de vérifier les faits et de traduire les responsables devant la justice, la MINUSMA soutiendra tous les efforts dans ce sens ». Les 5 administrateurs civils ne sont pas les seules victimes des affrontements au gouvernorat: selon un communiqué du gouvernement, le Mali déplore 8 morts et les rebelles 28. Les chiffres réels sont-ils plus élevés ? On ne sait.
Mara tente de quitter Kidal dans la nuit. Il n’y arrive pas : le temps orageux empêche tout mouvement de l’hélicoptère de la MINUSMA. La force onusienne lui propose de venir passer la nuit à son camp: le Premier Ministre, par accès de fierté, refuse; il préfère rester au camp malien. Ce n’est que dimanche qu’il décolle de Kidal. Il ne se prive pas, chemin faisant, de dénoncer la « passivité » des forces étrangères présentes à Kidal, affirme que le Mali est désormais « en guerre » et que « notre risposte sera à la hauteur de l’attaque » rebelle. Parle-t-il sous l’effet de la colère ou de son jeune âge (39 ans) ? Personne ne se pose la question tant son attitude plaît aux Maliens qui, dans leur immense majorité, jugent urgent d’en découdre avec la poignée de rebelles qui fait la loi à Kidal et inutile d’attendre, à cette fin, un feu vert français. Et puis, le discours du Premier Ministre panse, ne serait-ce que superficiellement, l’honneur du Mali brisé, en 2012, par la défaite militaire et l’occupation du nord par les hordes jihado-séparatistes. Accueilli en héros à l’aéroport de Bamako-Sénou par une foule qui crie « Mara, président ! », le chef du gouvernement se rend à Sébénicoro pour rendre compte de sa mission au chef de l’Etat.
Moussa Mara désavoué par IBK
En déclarant ouvertement la guerre avant même son retour dans la capitale, le Premier Ministre se taille un instant de gloire. Cependant, il plonge le président IBK dans le plus vif embarras. D’abord, Moussa Mara n’a pas qualité pour déclarer la guerre, ce pouvoir étant dévolu au chef de l’Etat, chef suprême des armées, par l’article Article 71 de la Constitution qui dispose : « La déclaration de guerre est autorisée par l’Assemblée Nationale réunie spécialement à cet effet. Le Président de la République en informe la Nation par un message ».
Ensuite, Mara met IBK devant le fait accompli: soit le président le suit dans son élan guerrier, auquel cas Mara en tire tout le bénéfice politique pour avoir été le catalyseur de la guerre; soit le président le désavoue, auquel cas Mara passe, dans l’opinion, pour le justicier empêché de pourfendre l’ennemi par un président faible. Limoger Mara ? Ce serait la pire chose de la part d’un président dont l’opinion fustige de plus en plus bruyamment l’attentisme. En tout état de cause, c’est Mara, et non IBK, qui sort politiquement gagnant du bras de fer où il a engagé le pays. Des partisans du président IBK, voyant le Premier Ministre voler la vedette à leur champion, subodorent une déloyauté : « Mara a probablement un agenda personnel; IBK devrait dorénavant s’en méfier ! ». Enfin, les déclarations de Mara désobligent les officiels français et onusiens tout en bouleversant le processus de négociations repris, sur injonction de la communauté internationale, par IBK.
Comment corriger le tir ? Le président IBK est longuement entrepris par François Hollande (avec lequel il a une conversation téléphonique d’une heure); Hélène Legal, conseillère de François Hollande dépêchée d’urgence à Bamako; Bert Koenders, chef de la MINUSMA; l’ambassadeur français à Bamako, Gilles Huberson; et l’ambassadrice américaine à Bamako, Mary Beth Leonard. Les présidents burkinabè, Blaise Compaoré, et ivoirien, Alassane Ouattara, ne sont pas en reste. Tous pressent le chef de l’Etat malien de calmer le jeu et de ne pas s’engouffrer, malgré la gravité de l’heure, dans la voie guerrière ouverte par le Premier Ministre Moussa Mara. IBK n’a pas le choix. La mine sombre, il apparaît, dimanche soir, au petit écran. Ses paroles sont lourdes de sens. Il condamne l’assassinat des administrateurs, dénonce la prise d’otages au gouvernorat, s’engage à traduire devant la justice internationale les criminels et annonce que plus jamais, aucune délégation officielle malienne ne sera empêchée d’entrer à Kidal. IBK n’oublie pas de louer le « patriotisme » de Moussa Mara: « Mara a l’amour de ce pays ».Mais concluant son propos, le chef de l’Etat assure que les négociations restent de mise et que le Mali se doit d’honorer sa signature apposée sur l’accord préliminaire de Ouagadougou. La morale de l’histoire ? Mara est adroitement désavoué: lui déclare la guerre, le président IBK la paix. Le désaveu infligé à Mara se traduit d’ailleurs, à Kidal, par l’interdiction faite aux troupes de s’attaquer aux rebelles. Quand un petit détachement militaire parti chercher des denrées en ville réplique à des tirs du MNLA, il reçoit une sévère mise en garde des hauts galonnés consignés à la base malienne. Se sentant abandonné par son chef, le Premier Ministre aurait offert sa démission, laquelle aurait été refusée par IBK qui n’aimerait pas joindre à une crise militaire une crise politique: il vient à peine de perdre un premier chef du gouvernement (Oumar Tatam Ly) et se dépêtre encore difficilement du scandale né de l’achat d’un nouvel avion présidentiel.
Envoi de renforts
Le climat ne cesse pas, pour autant, de s’épaissir à Kidal. Pour ne pas se laisser prendre au dépourvu, l’armée y dépêche des renforts. Commandée par le lieutenant-colonel Oumar Sérémé, une bonne partie des 600 soldats du Groupement tactique « Balanzan » stationnés à Anéfis, issus de la quatrième promotion de formation européenne à Koulikoro, font mouvement vers Kidal. Deux vagues de bérets rouges venus du camp des parachutistes de Djikoroni les imitent: la première, forte de 300 commandos, quitte Bamako dans la nuit du dimanche 18 mai 2014, la seconde le lendemain matin. Un contingent de bérets verts prend le départ à Kati, le même jour, pour Kidal. Déjà présents au camp n° 1 de Kidal, 200 soldats prennent position dans les alentours. D’autres forces rejoignent Kidal à partir de Gao. Pour encadrer tout ce beau monde, l’état-major opérationnel débarque au grand complet dans la capitale des Ifoghas.Parmi ces officiers qui se préparent à la guerre figurent le colonel-major Abdoulaye Coulibaly, chef d’Etat-major adjoint de l’armée de terre et chef du poste de commandement opérationnel pour tout le théâtre du nord; le général Didier Dacko, chef d’état-major général adjoint des armées; et le général Alladji Gamou, chef de l’unité « Delta », composée de combattants touaregs lourdement armés.
Mardi 20 mai 2014, la ville de Kidal déborde d’hommes en uniforme. Les 2.000 officiers et soldats maliens bombent le torse. Contrairement à une période récente, ni la France, ni la MINUSMA ne se sont opposées à leur entrée à Kidal. De plus, le matériel de combat se trouve au rendez-vous: la garnison malienne est remplie à ras bord d’armes lourdes et de munitions. Une dizaine de BRDM, redoutables semi-blindés de fabrication russe, sont de la fête. Pour tout arranger, les renseignements militaires prêtent des effectifs squelettiques au MNLA et à ses acolytes : 250 hommes au total, soit quelque 10% des effectifs maliens.
L’offensive malienne
Mercredi 21 mai 2014, l’armée malienne déclenche les hostilités. Objectif: prendre le contrôle de la ville de Kidal et neutraliser individuellement les chefs rebelles, même ceux tapis dans les résidences privées. Le fer de lance de la grande offensive malienne ? Les commandos parachutistes (bérets rouges), chargés d’investir le gouvernorat, où sont tapis des dizaines de rebelles, et de fouiller les quartiers. Chaque béret rouge dispose d’un kit de combat composé, entre autres, d’un bidon d’eau, d’un paquet de nourriture, de couteaux, d’un fusil d’assaut Kalachnikov et d’une cartouchère de 250 balles. Les commandos, troupes de choc féroces, sont soutenus, à l’arrière, par des fantassins bérets verts ayant pour mission de renouveler, en cas de besoin, les munitions de combat et les provisions alimentaires; de ramasser les blessés et d’assurer l’intendance. Au niveau de la garnison malienne siège l’état-major opérationnel chargé de collecter les renseignements, de coordonner la progression des soldats et de leur donner les ordres tactiques nécessaires.
Les premiers affrontement tournent en la faveur des militaires maliens. Encouragé par les informations en provenance du front, le gouvernement publie un communiqué confirmant la mise en oeuvre d’une « opération de sécurisation des personnes et des biens à Kidal ». Les commandos foncent sur le gouvernorat à allure régulière. Il sont accueillis par un feu nourri des occupants rebelles. Lesquels se replient vers leur base appelée « Luxembourg », située dans un quartier de Kidal et où stationne le gros des troupes et du matériel rebelles. Vers 13 heures, le mercredi, en plein conseil des ministres, le ministre de la Sécurité, le général Sada Samaké, souffle à l’oreille du président IBK que Kidal est tombée sous le contrôle des forces maliennes et que le MNLA, en déroute, demande un cessez-le-feu immédiat. Joyeux, le chef de l’Etat annonce la bonne nouvelle. Toute l’assemblée se lève pour applaudir. Quelques ministres font les difficiles en suggérant de refuser le cessez-le-feu et de détruire les derniers bastions rebelles au nord. Sage réplique d’IBK: « Il faut toujours accepter le cessez-le-feu et négocier quand on est en position de force ». Dans la foulée, un communiqué est préparé par le gouvernement et promis à la lecture dans la soirée: il salue la reprise de Kidal par l’armée et ordonne le cessez-le-feu. Le conseil des ministres prend fin après avoir approuvé une vague de nominations à des postes administratifs.
La défaite malienne
Deux heures plus tard, les mauvaises nouvelles commencent à tomber. Les recoupements permettent d’établir que les troupes déployées en soutien aux bérets rouges ont, les premières, pris la fuite. Ayant essuyé un déluge de feu, elles ont cru déjà morts les bérets rouges qui constituaient l’avant-garde de l’offensive. Apercevant leurs hommes en débandade, les officiers de l’état-major prennent, à leur tour, la fuite. Direction: le camp de la MINUSMA, sis à quelque 800 mètres de la garnison malienne. A bord d’une colonne de 20 véhicules 4X4, le général Didier Dacko, le colonel-major Abdoulaye Coulibaly et autres se présentent à une telle allure devant la garnison onusienne que les casques bleus manquent de leur tirer dessus, croyant à une attaque armée. Comprenant qu’il s’agit, en réalité, de l’état-major malien en fuite, ils lui livrent précipitamment le passage.
Les officiers ainsi réfugiés sont exactement au nombre de 40, selon le compte-rendu de la MINUSMA à sa hiérarchie. Ils seront transportés par hélicoptère onusien à Gao. Quant au général Alladji Gamou, il connaît mieux le terrain que ses pairs noirs : à la tête d’une colonne de son unité spéciale, il pique à travers la brousse et rallie Anéfis. Là, il tombe nez à nez avec les renforts maliens envoyés de Kati. Après des échanges de signaux, les deux groupes parviennent à s’identifier, font leur jonction et rejoignent ensemble Gao. L’adjoint de Gamou, le colonel Fayçal Ag Kiba,a beaucoup moins de chance: en route, seul, vers son village situé près d’Intadéni, dans la région de Kidal, il est rattrapé par ses poursuivants qui lui logent plusieurs balles dans la tête. En vérité, les rebelles mènent une chasse aux hauts galonnés maliens dont la mort acheverait d’annihiler le moral de l’armée. Seul Fayçal y laisse la peau. Les commandos parachutistes, abadonnés à leur sort, se rendent compte trop tard de la fuite des autres troupes maliennes: ils paient le plus lourd tribut à la bataille de Kidal.
Qui commandait les rebelles ?
Les forces touarègues sont conduites, à Kidal, par Cheick Ag Haoussa, cousin d’Iyad Ag Ghali et numéro 2 du groupe islamiste Ançar Dine.Il est secondé par un ex-colonel de l’armée malienne: Assalat Ag Habbi, dont les aptitudes militaires sont connues. Autre tacticien rebelle, Haroun Ag Dawoud dirige, depuis longtemps, le camp du MNLA à Ambobar, à 7 km de Tessalit. Près d’Anéfis, un autre état-major rebelle dépend du Mouvement Arabe de l’Azawad (MAA). Redoutables guerriers, les Arabes prennent le relais du MNLA et du Haut Conseil Unifié de l’Azawad (HCUA) pour prendre en chasse les soldats maliens éparpillés dans le désert. Une étroite coordination lie les différents groupes.
Le triomphe des rebelles à Kidal est dû, non à leur équipement (celui de l’armée est meilleur) mais à une plus grande ardeur au combat, à une meilleure connaissance du terrain et à une meilleure tactique. Pour prendre à revers l’armée malienne à Kidal, les rebelles ont surgi de leur base en formation triangulaire: un premier groupe pique à gauche pour barrer la route aux bérets rouges; un second fond comme un vautour sur les bérets verts qui servent de force de soutien aux commandos; un troisième et dernier groupe rebelle fonce sur la garnison malienne où il met en fuite l’état-major. Après sa conquête, Kidal est laissée aux mains du MNLA et du HCUA: ce dernier groupe est dirigé par le patriarche des Ifoghas, Intallah Ag Attaher, dont le fils aîné, Algabass, siège à l’Assemblée nationale du Mali sous les couleurs du RPM. Kidal conquise, les rebelles se lancent à la poursuite des soldats maliens. Leur but : conquérir des espaces susceptibles, plus tard, de garantir l’accès de leur fameux « Azawad » au fleuve Niger. Ainsi mettent-ils, en autres, la main sur Tessalit, Ménaka, Anéfis, Bourem et Ansongo. A Tessalit, ils se contentent de contrôler la ville et ne progressent pas jusqu’au camp malien, de peur d’une riposte des casques bleus tchadiens.
A Bourem, ville natale de Chato, l’ex-candidate à la présidentielle, les combattants rebelles sont priés de refluer par la force Serval qui, pour sécuriser Gao, centre névralgique des troupes françaises, dépêchent une centaine de soldats.D’Ansongo, ville riveraine du fleuve, les rebelles sont également contraints de se retirer par les troupes françaises. La panique, entre-temps, s’installe à Gao et Tombouctou: les Français doivent s’employer, par des messages radiodiffusés, pour apaiser la population et prévenir un exode général.
Des terroristes ont-ils pris part aux combats?
Selon le gouvernement malien, des groupes jihadistes d’AQMIet du MUJAO ont participé aux combats aux côtés des mouvements armés reconnus légitimes par la communbauté internationale: MNLA, MAA et HCUA. Des sources proches du pouvoir citent parmi les assaillants des terroristes d’AQMI comme Abdelkrim Al-Targui, un Touareg apparenté à Iyad Ag Ghali et chef de la katiba « Al-Ansar« ; et Abou Abdel Hakim Al-Kidali, chef de la katiba « Youssef Ibn Tachfin ». Dans son numéro du vendredi 23 mai 2014, Jeune Afrique soutient, pour sa part, que les troupes rebelles ont reçu des renforts terroristes. Ces informations sont à prendre avec des pincettes en raison de la tendance permanente du gouvernement malien à manipuler l’opinion publique et des accointances notoires du régime d’IBK avec Jeune Afrique. S’il ne faut pas exclure l’hypothèse de renforts terroristes en provenance d’Algérie ou de Mauritanie, rien n’indique que l’on n’a pas confondu « terroristes » et « jihadistes ». En effet, de nombreux jihadistes figurent, bien avant le conflit de Kidal, dans les rangs des 3 groupes armés reconnus comme interlocuteurs par le gouvernement malien: le MNLA, le HCUA et le MNLA. Depuis belle lurette, le HCUA a intégré dans ses rangs une bonne partie du groupe jihadiste malien Ançar Dine, le chef de ce groupe, Iyad, faisant l’objet de recherches françaises; le MNLA, pour renforcer ses effectifs, a recyclé lui aussi des jihadistes; quant au MAA, il a toujours été animé par des Arabes attachés à la charia islamique.
Le bilan des combats
Les combattants rebelles font une impressionnante moisson à Kidal. Tout le matériel de combat leur est abandonné. Il y a là des dizaines de véhicules neufs, des armes lourdes et quelque 600 mitrailleuses. Le tout est transporté à leur quartier général. Comme à l’accoutumée, les rebelles mettront, à bref délai, le feu aux BRDM capturés qu’aucun d’entre eux ne sait conduire. Le bilan humain est d’une lourdeur exceptionnelle que par pudeur, nous nous gardons de révéler. La MNINUSMA fut mise à contribution par les rebelles pour ramasser les cadavres maliens dispersés à travers la ville. En parlant de 20, puis de 30 morts, le gouvernement malien minore assurément les chiffres. 120 soldats maliens sont faits prisonniers. Répartis sur deux sites, ils sont sous la garde du MNLA et du MNLA.