Balloté par les vagues des dossiers brûlants de la nation et rattrapé par la réalité de l’exercice du pouvoir, le président de la République s’est, enfin, décidé (s’il ne s’est vu contraint) à rencontrer la classe politique malienne. C’est ainsi que hier, mercredi 04 juin 2014, Ibrahim Boubacar Kéïta a reçu les leaders des partis politiques de la majorité, puis ceux de l’opposition pour échanger sur la situation politico-sécuritaire du pays, plus particulièrement sur les récents événements survenus à Kidal. Le roi du Mandé est-il redescendu de son piédestal ?
Il le fait sur le tard, mais IBK a le mérité d’avoir franchi le pas en appelant, hier, la classe politique à la table de concertation autour des questions brûlantes de la nation. Mais, en fait de concertation, il n’y a pas eu, selon un acteur de la rencontre, d’échanges réels ou un acquis de rang. « Tout s’est déroulé comme si c’était une rencontre ordinaire », témoigne-t-il.
C’est en milieu d’après-midi que le président de la République a reçu les chefs des partis politiques de l’opposition, en présence notamment du leader de l’opposition, Soumaïla Cissé de l’Urd et de Tiébilé Dramé du Parena. Avec eux, le président de la République a brossé la situation d’ensemble du pays au cours des neuf derniers mois, en mettant un accent particulier sur la situation de Kidal. A ce niveau, IBK a dit ce que lui et Mara ont fait par rapport à ce qui s’est récemment passé à Kidal, avant d’enfoncer son ancien ministre de la Défense…
Le président de la République a aussi informé les responsables de l’opposition de la signature prochaine de l’Accord de coopération avec la France. En est-il contraint ? Sans doute.
IBK a également confié à ses interlocuteurs qu’il est tout fait d’accord avec l’Accord préliminaire de Ouaga, et sa totale disponibilité à négocier avec les groupes armés. Le dialogue aurait déjà commencé.
Enfin, le président a marqué sa disponibilité à discuter (dorénavant ?) avec les leaders de l’opposition, car la rencontre d’hier était la toute première depuis l’investiture d’IBK.
Prenant la parole au nom de ses pairs, Soumaïla Cissé a salué cette initiative et remercié le président de la République pour ce cadre de concertation créé, avant de donner son appréciation sur certains dossiers notamment par rapport à des jugements portés sur les cadres de l’opposition qualifiés d’apatrides. « Nous sommes tous des fils du Mali et nous aimons bien ce pays », se défend-il.
Se prononçant sur la sécurité à Kidal, aspect que le président IBK a beaucoup développé, le chef de l’opposition précisera que ce n’est pas Kidal seulement qui est concernée par cette question, mais plusieurs autres endroits du pays et qu’il faille élargir le champ de vision de la problématique.
Quelques heures plus tôt, le président IBK avait évoqué avec les partis politiques de la majorité présidentielle les mêmes sujets. Il a été donc question de la situation au nord du pays, avec les récents évènements de Kidal. A ce sujet, le chef de l’Etat a parlé de l’assaut du 21 mai, lancé par l’armée pour libérer cette ville. Occasion pour IBK de se démarquer de cette action militaire, qu’il aurait imputée à l’ex-ministre de la Défense, Soumeylou Boubèye Maïga. Le chef de l’Etat a fait référence à son discours de la veille où il avait invité les groupes armés à la négociation.
Et selon lui, différents chefs d’Etat avaient déjà indiqué que le Mnla s’était disqualifié après l’attaque contre le gouvernorat, la prise d’otages et l’assassinat de six administrateurs au gouvernorat de Kidal. « Et c’est en conseil de ministres que j’ai été informé par le ministre de la Défense du déclenchement des opérations, et de la prise du gouvernorat », dira IBK.
Pour lui, dès lors, il ne pouvait plus garder sa confiance au ministre de la Défense qu’il aurait contraint à la démission.
Dans les deux cas, l’enseignement principal, c’est que cette initiative (qui sent un coup du Premier ministre) est le prélude à l’instauration d’un cadre de dialogue et de concertation entre le président de la République, le gouvernement et l’opposition et la majorité. Si le président Ibrahim Boubacar Kéïta avait commencé par ça, peut-être n’en serions-nous pas là aujourd’hui ? Enfin, majorité et opposition sont d’accord sur un fait : la nation court d’énormes dangers. Donc, l’heure est grave !