La nomination à la pelle de ministres conseillers à la Primature critiquée par l’opinion publique nationale irrite aussi le président de la République. Dioncounda Traoré l’aurait fait savoir à Cheick Modibo Diarra.
Le conseil des ministres décalé du jeudi 23 août 2012, le premier du gouvernement d’union nationale (Gun) n’a pas été que celui des retrouvailles avec le nouvel attelage gouvernemental. Mais il a été aussi le lieu des vérités crues du président de la République à son Premier ministre.
Après les mots de bienvenue aux nouveaux ministres que Dioncounda Traoré a renvoyés à leurs missions pour reconquérir le Nord et organiser au plus vite les élections libres et transparentes, il a demandé au gouvernement Cheick Modibo Diarra II de faire en sorte que les partenaires financiers aient une bonne image de notre pays et reviennent le plus vite possible pour le financement de l’économie nationale.
Loin des caméras et des plumes, Dioncounda Traoré aurait eu une passe d’arme avec son Premier ministre de « pleins pouvoirs ». Selon des indiscrétions, les nominations de ministres conseillers spéciaux, faites dans son cabinet au lendemain de la formation du Gun n’auraient pas été du goût du président de la République.
Celui-ci a tenu à le faire savoir surtout qu’en son entendement, les trois nouveaux ministres nommés à la Primature dans le contexte de crise économique et sociale peuvent heurter la sensibilité de nos partenaires financiers. C’est là que ses propos « redonner confiance aux bailleurs de fonds et partenaires économiques du Mali » lancés comme une sentence ont tout leur sens.
Une remarque qui vaut son pesant de rappel à l’ordre à celui qui a tellement compris son statut de Premier ministre de « pleins pouvoirs » qu’il se croit un extra-terrestre auquel tout est permis sur cette terre africaine du Mali. Il a remanié le gouvernement à sa guise en gardant ceux qu’ils voulaient et s’est donné le plaisir de caser ceux qui ont quitté le navire malgré lui. Des bailleurs de fonds ne sont pas du tout contents de la façon dont les choses se passent.
CMD en saboteur de la transition
La signature du décret de nomination, le jeudi 23 août 2012 du 32e ministre du Gun, Moussa Bocar Diarra, président de l’UM-RDA et de la coalition IBK/Mali 2012, en qualité de ministre des Langues nationales et de l’Education civique, est une véritable farce gouvernementale. Une nomination qui a toute l’allure d’un repêchage que le Mali n’avait jamais connu jusque-là.
Cheick Modibo Diarra est accusé d’être le fautif pour avoir refusé de prendre en compte les CV acceptés par le président Dioncounda Traoré dont le deuxième poste réservé à IBK/Mali 2012. Il a fallu que cette coalition et le Rassemblement pour le Mali (RPM) tapent du poing sur la table en menaçant de claquer la porte du Gun que ce décret portant nomination de M. Diarra soit signé.
Selon nos sources, lorsque IBK/Mali 2012 s’est plaint de l’unique poste qui lui a été accordé contre deux promis, le président de la République leur a répondu que « la liste prise en compte n’est pas celle que j’ai validée ». Ce qui sous-entend que Cheick Modibo Diarra n’en a fait qu’à sa tête dans la mise en place du Gun jusqu’à torpiller les prérogatives du président Dioncounda Traoré.
Celui-ci, aux yeux de l’opinion publique, est réduit à sa plus simple expression et ne joue qu’un rôle de marionnette dans la transition. Cheick Modibo Diarra, le mouton noir de la transition malienne et en même temps le plus grand gagnant dans cette affaire, a rusé pour faire basculer les islamistes à travers le Haut conseil islamique (HCI) dans son « camp ».
Le grand meeting de sensibilisation au stade du 26-Mars le dimanche 12 août 2012, qui s’est traduit en meeting de soutien au gouvernement CMD en donne la preuve.
Un ministre en catimini
Comme la part du lion qu’on lui apporte dans sa tanière, le décret de nomination de Moussa Bocar Diarra, président de la coalition IBK/Mali 2012 et de l’UM-RDA, a été remis au président du RPM Ibrahima Boubacar Kéita à son domicile à Sébénikoro, le jeudi dernier. L’information a fait le tour de la ville alors que les médias publics sont restés muets sur la question.
En apprenant la nouvelle, certains croyaient à une farce ou à une intox. Les gens se sont rendus compte de l’évidence le samedi 25 août lorsque le ministre des Langues nationales et de l’Instruction civique, Moussa Bocar Diarra a été aperçu parmi ses collègues au séminaire gouvernemental, le tout premier du genre. Une nomination obtenue aux forceps et dans une grande cacophonie au sommet de l’Etat du Mali entre un président chancelant et un Premier ministre extravagant.