Le pays a trop perdu du temps à la recherche d’un Gouvernement d’union nationale comptant toutes les sensibilités sociopolitiques. A présent que le consensus est fait sur l’actuelle équipe, les acteurs doivent se débarrasser des petites considérations égoïstes et mesquines pour s’attaquer rapidement aux dossiers chauds du moment. Il est vraiment temps, au nom de l’accalmie et de l’apaisement pour une bonne transition
Enfin, ça y est ! Depuis le 20 août 2012, le Mali est doté d’un nouvel attelage gouvernemental. Composé de trente et deux membres (contre 24 Ministres pour le Gouvernement sortant), il s’agit, ni plus ni moins, d’un gouvernement d’union nationale qui regroupe en son sein les représentants de toutes les forces vives de la Nation. On remarquera que le nouveau Gouvernement dirigé par un Cheick Modibo Diarra, reconduit, garde 18 des anciens Ministres et accueille 14 nouveaux. La transition a deux objectifs principaux : reconquérir les régions nord du Mali sous occupation des bandits armés et autres apatrides, et organiser des élections transparentes. C’est dire que la tâche n’est pas des plus aisées au regard de la complexité des missions à eux confiées.
Malgré l’urgence de l’heure et la complexité de la tâche, des critiques des plus virulentes fusent de toutes parts pour divertir le peuple malien et retarder l’action gouvernementale. En cause, la configuration de l’actuel gouvernement dans lequel tout le monde, non content d’y être représenté, veut entrer. Pourtant, tous les regroupements socio-politiques ont pris part aux concertations et négociations qui ont abouti à la formation de ce Gouvernement afin que personne ne soit resté sur le quai, comme l’a voulu le président de la République. Mais, ce n’est pas une nouveauté, au Mali il y a et il y aura toujours des éternels mécontents. Quelque soit les efforts entrepris par les bonnes volontés avec la meilleure volonté, les populistes, tribuns et forts en gueule, auront toujours à rechigner.
Hier, c’était certains responsables du Fdr qui ont réclamé le départ de Cheick Modibo Diarra avant de se rendre à l’évidence : le limogeage du Premier Ministre causerait beaucoup plus de dégâts que son maintien. De plus, contrairement aux nombreuses rumeurs répandues ça et là par les mauvaises langues dans le but de rajouter à la confusion générale, Dioncounda Traoré et Cheick Modibo Diarra, deux cousins à plaisanterie, s’entendent très bien pour diriger ensemble, chacun dans son rôle, une transition qui s’annonce extrêmement difficile. Le président l’a d’ailleurs prouvé en renouvelant sa confiance au Premier Ministre, refusant ainsi de céder à la pression.
De fait, homme de paix et de justice, Dioncounda Traoré résistera à tout le monde. Aux composants de la Copam qui exigeaient d’abord une Convention nationale qui désignera les dirigeants de la transition. Les camarades de Hammadoun Amion Guindo ont fini par comprendre que si le Premier Ministre a promis d’organiser des assises, il tiendra parole parce que c’est un homme de parole, ils ont donc accepté d’intégrer le Gouvernement et s’en sortent avec deux départements.
Aux extrémistes du MP 22 qui ont cru qu’avec leur exigence de la tenue préalable d’une Convention nationale, il n’y aurait point de Gouvernement tant que le pays allait continuer à évoluer dans la crise politique et institutionnelle. Ils ont été consultés, mais ont refusé de participer au nouveau Gouvernement formé, malgré eux. Depuis, alors qu’ils ont été fervents supporters de Cheick Modibo Diarra, ils ont retourné la veste pour s’attaquer au Premier Ministre dont tout le monde salue la configuration de la nouvelle équipe.
En effet, à écouter ou lire leurs commentaires dans les médias, les responsables des différents regroupements socio-politiques reconnaissent tout le bien-fondé du nouveau Gouvernement dans lequel ils sont tous valablement représentés.
Mais apparemment, cela ne suffit pas à calmer les ardeurs vindicatives et récalcitrantes des nouveaux acteurs de la scène politique.
De l’irrationnel à l’illogique
Mais, de toutes ces agitations sans grands effets sur Dioncounda Traoré, sûr d’avoir fait le meilleur choix en gardant son Premier Ministre, il résulte que l’irrationnel le dispute fortement à l’illogique. Ainsi, Hammadoun Amion Guindo, le syndicaliste soudainement converti à la politique a-t-il cru utile de confier au journal «Les échos» que même pour un Gouvernement d’union nationale, la taille de l’actuel est excessif. Lui n’aurait pas dépassé les vingt membres. Mais, il ne croit pas utile, pour faire maigrir le Gouvernement, de retirer ses deux ministres.
De même, des responsables de certains composants du CSM, regroupement qui a accepté d’accompagner activement la transition, croient de leur rôle de critiquer le Gouvernement auquel il participe, simplement parce que leur propre parti n’est pas représenté, tout en sachant que les plus de 120 partis politiques ne peuvent pas figurer dans l’équipe.
Que répondre à ce responsable du Coren (Collectif des ressortissants du nord) qui se plaint, sur Rfi, de l’absence de Songhay dans le Gouvernement, alors que sa première préoccupation doit être que les autorités se mettent enfin au travail pour la libération du nord ? Heureusement, le président du Collectif, beaucoup plus sensé, a vite fait de rectifier le tir en désolidarisant son association de tels propos.
Pour en revenir au Fdr, ce sont ses membres qui ont toujours réclamé un Gouvernement d’union nationale. Aujourd’hui, ils en ont un, mais le critiquent toujours parce qu’il est dirigé par celui-là même qu’ils ne veulent plus sentir. Ne pouvant obtenir son départ, on reproche désormais au Premier Ministre de s’entourer de conseillers spéciaux, de violer la loi pour ce faire.
Mais, s’ils étaient moins obtus et s’accrochaient moins aux détails inutiles, ils auraient su que Cheick Modibo Diarra n’a fait que se référer au décret n°2012 fixant l’organisation de la Primature, document selon lequel «il est permis au Premier Ministre de nommer par décret un ou plusieurs conseillers spéciaux chargés des questions particulières relevant de son autorité directe et bénéficiant d’un statut déterminé par leur acte de nomination». Donc, c’est en toute légalité que le Chef du Gouvernement a récupéré auprès de lui trois des anciens Ministres, Sadio Lamine Sow, Mamadou Diakité et Hamadoun Touré, en qui il a entière confiance, et qui avaient volontairement demandé à quitter un navire de plus en plus convoité par des pirates de la pire espèce, prêts à le saborder.
Maintenant qu’ils sont sur ce navire, on aimerait bien les voir à la tâche. Laquelle n’est axée que sur deux préoccupations majeures : la reconquête du nord et l’élection propre d’un président de la République. Et pour cela, le pays est déjà en retard. Il est temps que les acteurs politiques cessent de ne penser qu’à leurs seuls intérêts particuliers, personnels et partisans. Entrer dans le Gouvernement est loin d’être une sinécure, car il s’agit d’y travailler pour des causes beaucoup plus nobles que les coups bas politiques.