Est-ce enfin le signe d’une volonté réelle de s’inscrire dans le processus d’un dialogue inclusif inter-malien ? Telle est la principale question qui semble tarauder les esprits de bien des observateurs de la crise malienne après la publication, mardi, d’une déclaration commune de trois mouvements armés. Réunis dans la capitale algérienne, Le Mnla, le MAA et le Hcua ont surtout lancé un ultimatum aux groupes armés «orphelins» afin qu’ils rejoignent le processus de dialogue.
Du 5 au 9 juin dernier, le Mouvement national de libération de l’Azawad, le Mouvement arabe de l’Azawad et le Haut conseil de l’unité de l’Azawad se sont réunis autour d’une même table, sous l’égide du médiateur algérien. Cette rencontre était la deuxième du genre, car les mêmes mouvements s’étaient retrouvés, en janvier dernier, toujours dans la capitale algérienne, en vue de la relance du dialogue inter-malien.
Ces consultations exploratoires, visent, conformément au vœu du gouvernement malien, à permettre aux groupes armés éligibles au dialogue d’harmoniser leurs positions en vue des futures négociations inclusives. Ainsi, au terme de 5 jours de tractations, les trois mouvements, signataires du cessez-le-feu du 23 mai dernier, ont fait une déclaration commune dans laquelle ils expriment leur volonté d’œuvrer à la consolidation du processus de paix au Mali. Dans ce document dit «Déclaration d’Alger» et signé par leurs secrétaires généraux respectifs, le Mnla, le MAA et le Hcua expriment surtout leur plein respect de l’intégrité territoriale et l’unité nationale du Mali.
Parallèlement à cette déclaration, Bilal Ag Achérif pour le Mnla, Alghabass Ag Intalla pour le Hcua et Sidi Brahim Ould Sidati au nom du MAA, ont signé un autre document dans lequel ils lancent un appel à toutes personnes et à tous les groupes armés qui sont hors du processus de dialogue, à rejoindre, dans un délai d’un mois, l’un des mouvements signataires de ladite déclaration. «Toute personne ou groupe armé qui n’auront pas fait leur choix à cette date seront responsables de toutes décisions qui seront prises à leur encontre», prévient la déclaration.
Voilà ce qui pouvait sonner, de l’avis d’observateurs avisés de la crise malienne, comme le point de départ d’une réelle volonté chez ces mouvements de s’inscrire définitivement dans le processus de négociations avec le gouvernement malien. Sauf que ces derniers, depuis le début du processus, ont toujours joué au dilatoire et à la fuite en avant de sorte que leurs déclarations sont toujours reçues avec une certaine réserve. Surtout quand on sait que cette déclaration intervient dans un contexte où les groupes armés signataires ont tiré une certaine ascendance psychologique sur le gouvernement malien suite aux affrontements récents de Kidal, où, appuyés par leurs alliés terroristes, ils ont remporté la bataille.
Par ailleurs, pour revenir à l’ultimatum qu’ils ont lancé aux autres mouvements, cela devrait permettre tout de même au gouvernement d’avoir en face de lui un nombre restreint d’interlocuteurs. Il faut aussi dire que cet appel sonne comme un camouflet pour Ibrahim Mohamed Ag Assaleh, un dissident du Mnla, qui a récemment créé son propre mouvement du nom de Coalition pour le peuple de l’Azawad (CPA).
L’on se rappelle que suite à des tensions qui ont agité pendant des mois le Mouvement national de libération de l’Azawad, ce haut cadre du mouvement indépendantiste touareg avait lancé son propre mouvement politico-militaire, le mardi 18 mars dernier. Ancien député de Bourem, dans la région de Gao, Assaleh avait été jugé trop proches des intérêts de Bamako par le Secrétaire général du Mnla, Bilal Ag Chérif, qui avait ainsi choisi de l’écarter, selon certaines sources.
Dès la création de sa Coalition, Ibrahim Ag Mohamed Assaleh avait tendu la main au gouvernement malien pour la relance du dialogue qu’il trouvait timide. Sera-t-il ainsi contraint de revenir dans son mouvement d’origine ? Une chose est sûre, c’est que le CPA est appelé à disparaître si la déclaration des principaux mouvements armés était respecté.
Bakary SOGODOGO