ATT serait aujourd’hui dans la capitale burkinabé pour prendre langue avec des groupes armés. Si cette information était avérée, elle ne manquerait pas de susciter des interrogations.
Selon plusieurs sources, l’ancien président malien serait aujourd’hui à Ouagadougou où il devrait rencontrer les représentants de certains groupes armés terroristes admis dans le processus de négociation en vue de parvenir à la signature d’un accord de paix durable. Il s’agit notamment
des émissaires du Mnla (Mouvement national de libération de l’Azawad), du Hcua (Haut conseil pour l’unité de l’Azawad) et du MAA (Mouvement arabe de l’Azawad). La rencontre entre Amadou Toumani Touré, en exil à Dakar depuis son
renversement en mars 2012, et ces groupes armés serait placée sous l’égide du médiateur burkinabé de la Cedeao dans la crise malienne, à la demande de certains responsables politiques de la sous-région et des groupes armés terroristes. Des représentants de ces mêmes groupes armés terroristes ont signé le 23 mai dernier, à Alger, un accord de cessez-le-feu. A la demande du président mauritanien mandaté par son homologue malien, les représentants touareg ont exprimé leur volonté d’œuvrer à la « consolidation de la dynamique de paix en cours », selon un officiel algérien. Décidés, à leurs dires, de s’engager dans le dialogue inclusif inter-malien, ils se sont ensuite réunis,
toujours à Alger, à partir du jeudi 05 mai pour des consultations exploratoires afin de s’entendre sur une plateforme unique de revendications à soumettre aux autorités maliennes. A Alger comme auparavant à Ouagadougou ou ailleurs, ils
n’ont pas fait mystère de leur réticence à se réunir avec les officiels maliens sur le territoire malien, privilégiant un dialogue sur terrain neutre. Si le Mali est d’accord avec le principe de tenir des rencontres préliminaires en dehors du pays, ces rencontres ne pourraient être que préparatoires de la signature d’un accord définitif de paix durable qui ne saurait se faire que sur le territoire malien.
Il s’agit avant tout de dialogue inclusif inter-malien même si les autorités devaient le faire avec des individus qui ont deux, trois voire quatre nationalités différentes.
En outre, il serait difficile de trouver un terrain neutre, ces individus possédant le passeport de la plupart des pays de la bande sahélo saharienne. Après les consultations exploratoires en cours et les rencontres préparatoires en vue, qu’est-ce que l’ancien président malien vient faire dans la danse ? Qui l’a mandaté ? Pourquoi ATT alors que le président IBK a nommé un haut représentant chargé du dialogue inclusif inter malien en vue d’une paix définitive dans le Nord de notre pays et qu’il s’apprêterait à rendre opérationnelle la Commission vérité justice et
réconciliation, alors que l’Algérie s’active dans le dossier et que le Maroc est prêt à s’impliquer ? ATT, les Imghad et
les Ifoghas L’explication pourrait se trouver dans la profonde connaissance que l’ancien président malien a du dossier de l’insécurité dans la bande sahélo saharienne.
Selon plusieurs sources, si le nord du Mali est resté longtemps tranquille, c’est parce qu’ATT avait su jouer la carte du diviser pour mieux régner. Dans la région de Tombouctou, il serait l’auteur de l’armement et de l’équipement des milices arabes chargées d’assurer la sécurité à la place des équipes mobiles qui n’ont jamais véritablement vu le jour. Dans la région
de Kidal, pour calmer et contrôler les ardeurs des Ifoghas, il aurait constitué, financé, armé et équipé des Imghad, sous la houlette d’un certain
Aladji Gamou. Imghad et Ifoghas étant des rivaux héréditaires pour le contrôle du Sahara malien dominé par les seconds, leur antagonisme s’est accru à cause de problèmes personnels entre Iyad Ag Ghaly, de la tribu des Ifoghas dirigée par le vieil amenokal Intalla, et Aladji Gamou qui est resté fidèle à l’armée régulière au sein de laquelle il gravi les échelons tout en restant en dehors de l’institution, lui et son bataillon de cinq cents hommes qu’on lui impute.
ATT, selon toute vraisemblance, connaitrait également les liens d’intrication, pourtant très compliqués, entre des leaders touaregs ou arabes et les jihadistes venus de l’Algérie, de la Mauritanie ou de la République arabe sahraouie démocratique pour s’installer dans le nord malien qu’ils ont vite sanctuarisé.
La complexité des relations entre communautés nomades, présentes au Mali et dans d’autres pays de la Bande, rend difficile la lutte contre un banditisme transfrontalier et un terrorisme international.
ATT en était conscient lui qui a toujours demandé une conjugaison des efforts de tous les pays riverains. Il devait donc avoir un plan. Est-ce pour cela ilserait aujourd’hui à Ouagadougou? Possible, toujours est-il que les autorités actuelles n’ont pas de plan précis et pourraient donc avoir recours aux services du président déchu.
Cheick TANDINA