La ministre de l’Economie et des Finances s’est rendue au siège du Fonds monétaire international pour discuter des faiblesses dans la gestion des finances publiques et identifier des mesures concrètes propres à lever les équivoques.
La relation entre notre pays et le Fonds monétaire international (FMI) continue d’alimenter la chronique au fil de déclarations ou annonces soufflant le chaud et le froid. Le représentant résident du FMI au Mali, Atonn Op de Beke, avait ainsi éveillé les inquiétudes en évoquant le gel des décaissements de son institution en faveur notre pays jusqu’en décembre prochain.
Ces craintes prennent une dimension spéciale en cette période particulièrement difficile pour notre pays engagé dans la relance de son économie, au sortir d’une crise sans précédent. Dans ce contexte, la coopération avec le FMI est primordiale car elle permet à notre pays non seulement de profiter de l’expertise multiforme de l’institution de Bretton Woods, mais aussi de présenter aux autres partenaires un certificat de conformité de gestion rigoureuse des finances publiques et de lutte contre la pauvreté. Les appréciations du FMI valent, en effet, attestation de bonne gouvernance financière et budgétaire auprès des bailleurs de fonds.
Il faut rappeler que le désaccord entre notre pays et le FMI est né en mai dernier suite à l’achat d’un avion présidentiel à 20 milliards de Fcfa et à l’attribution d’un contrat de fournitures (autres que des armes et munitions) passé par le département de la Défense et des Anciens Combattants pour un montant de 69 milliards de Fcfa. Dans le cadre de ce contrat, le FMI formule divers griefs parmi lesquels l’octroi d’une garantie par l’Etat pour un montant 100 milliards de Fcfa.
L’apaisement. Pour dissiper les malentendus, la patronne du département de l’Economie et des Finances, Mme Bouaré Fily Sissoko, s’est rendue la semaine dernière à Washington au siège du FMI, accompagnée d’experts en charge de la question. L’objectif de cette visite étant d’établir le dialogue avec les plus hautes instances de l’institution financière.
« Les services du Fonds monétaire international et du département de l’économie ont discuté des faiblesses dans la gestion des finances publiques et identifié des mesures concrètes pour y remédier, explique un cadre du département qui ajoute que ces mesures sont, entre autres, la régulation de l’achat de l’avion dans le projet de loi de finances rectificative 2014 sans détérioration des soldes budgétaires du cadrage arrêté lors de la mission de revue de mars 2014, ni changement des planchers de dépenses prioritaires arrêtés à cette occasion ».
L’autre mesure phare, précise notre interlocuteur, est l’audit par le Bureau du vérificateur général (BVG), à la requête de la Primature, des transactions pour s’assurer de la conformité des procédures budgétaires et de passation de marchés. « Les modalités de publication de cet audit seront discutées lorsqu’il aura été réalisé. L’audit de conformité et de régularité des dépenses engagées au regard des procédures budgétaires prescrites en pareille matière est conduite par la Cour suprême à la requête de la primature », précise-t-il encore.
Cet expert expliquera que lors de sa visite à Washington, le ministre Bouaré Fily Sissoko a discuté avec les plus hauts responsables du FMI de tous le sujets qui prêtent à controverse. « Nous avons présenté tous les éléments pertinents pour comprendre la genèse et les implications financières de la garantie. Une note sur le respect des ratios prudentiels de division et de couverture des risques par la banque bénéficiaire de la garantie de 100 milliards de Fcfa a été présentée au partenaire », révèle notre interlocuteur.
A Washington, assure-t-il, le gouvernement a convaincu les techniciens du FMI de sa bonne foi à travers des mesures d’audits et d’autres mesures rassurantes notamment le traitement des garanties. Notre pays annonce un recensement et une évaluation des garanties et des lettres de confort (si elles impliquent des engagements financiers pour l’Etat) avant fin 2014. Le mode de traitement budgétaire (provisions à constituer) et comptable de ces garanties sera établi et mis en œuvre conformément aux dispositions des lois et procédures budgétaires en la matière à partir de la loi de finances 2015 en tenant compte de toutes les garanties répertoriées au moment de l’élaboration du projet de finances 2015.
En attendant la finalisation de cette procédure, le gouvernement s’engage à soumettre toutes les garanties à l’approbation de l’Assemblée nationale dans les budgets à venir à commencer par le projet de loi de finances rectificative 2014. « Il en sera ainsi de la garantie de 100 milliards de Fcfa en cours d’exécution au moment de la soumission du projet de loi de finances rectificative 2014 à l’Assemblée nationale et de toutes les autres garanties en cours », promet notre interlocuteur en assurant de l’engagement du département des finances à mettre en œuvre ces mesures d’ici la prochaine mission du FMI prévue du 4 au 7 septembre.
La visite ministérielle, juge-t-il, a eu le mérite d’aplanir les incertitudes et de relancer un dialogue sincère et fécond avec ce partenaire clé qu’est le FMI. « Il faut reconnaître que l’aide budgétaire allouée à notre pays par les institutions de Bretton Woods et d’autres partenaires est importante dans l’exécution correcte de la politique budgétaire de notre pays », souligne-t-il.
A la conquête des marchés financiers. En effet, l’aide publique internationale mobilisée chaque année par le FMI et d’autres partenaires bi et multilatéraux permet aux finances publiques de prendre en charge les programmes de développement dans les infrastructures, l’agriculture, les secteurs sociaux, etc. Il faut dire que l’essentiel de nos politiques de développement est financé justement par l’aide internationale. Donc sa rupture a un impact direct sur la trésorerie de l’Etat. Car, se sont des ressources supplémentaires qui permettent de financer le développement. « Les financements extérieurs procurent à notre économie des devises. Ce qui augmente les réserves de change et facilite les échanges commerciaux extérieurs », nous expliquait, il y a une année, l’ancien ministre de l’Economie Tiéna Coulibaly.
En l’absence d’accompagnement du FMI jusqu’en septembre prochain, le département de l’économie se mobilise fortement pour trouver des fonds afin de combler le gap. Aujourd’hui, le financement le mieux indiqué est l’émission de bons sur les marchés sous-régionaux et régionaux. « Nous nous réorganisons pour aller à la conquête des marchés financiers. Nous allons réviser les programmes d’émission de bons. Il faut noter que depuis le début de l’année, notre pays n’a émis que des bons à hauteur de 30 milliards de Fcfa. En plus, la mobilisation des ressources intérieures se fait de façon satisfaisante », souligne notre interlocuteur visiblement désireux de rassurer l’opinion nationale et les fournisseurs de l’Etat sur la bonne tenue et de la maîtrise du cadre macroéconomique.