Accueil    MonKiosk.com    Sports    Business    News    Femmes    Pratique    Le Mali    Publicité
NEWS
Comment

Accueil
News
Politique
Article



 Titrologie



Autre presse N° 005 du

Voir la Titrologie

  Sondage


 Nous suivre

Nos réseaux sociaux



 Autres articles


Comment

Politique

Le Maroc inspire le Mali pour l’encadrement de l’islam
Publié le mardi 24 juin 2014  |  lacroix


© aBamako.com par mouhamar
Coopération Mali-Maroc : 17 conventions signées
Bamako, le 20 février 2014. La signature de conventions de partenariat entre les gouvernements et les opérateurs économiques du Mali et du Maroc, sur plusieurs secteurs d’activités identifiés, a eu lieu ce jeudi dans la salle des banquets du palais présidentiel.IBK et le Roi du Maroc.


 Vos outils




 Vidéos

 Dans le dossier

En septembre 2013, une convention a été signée entre le Maroc et le Mali prévoyant la formation de 500 imams maliens sur cinq ans. Une centaine sont déjà arrivés à Rabat. Les uns dans leur salle de classe, le livre saint ouvert devant eux, les autres assis en tailleur sur les tapis de la salle de prière aménagée au premier étage du bâtiment, tous récitent le Coran. D’ici à la fin de l’année prochaine, ces 106 imams maliens âgés de 20 à 50 ans, qui ont laissé femme (s) et enfants au pays, devront connaître par cœur le livre saint.

Leurs voix puissantes se mêlent donc, et s’évadent des fenêtres de cet ancien lycée du quartier chic de Hay Ryad, dans la banlieue de Rabat, transformé en centre de formation à leur intention.

À la demande du président malien Ibrahim Boubacar Keïta, et désireux de participer à la « reconstruction matérielle et immatérielle » du pays marqué par le conflit armé avec les islamistes et les indépendantistes touaregs du Nord, le roi du Maroc s’est engagé à accueillir 500 imams sur cinq ans pour leur enseigner un « islam ouvert, tolérant ».
La première promotion découvre les salles de cours

Deux mois plus tard, la première promotion découvrait les salles de cours, les dortoirs, la petite infirmerie et la cantine de ce bâtiment fraîchement repeint.

Le programme de formation s’inspire de celui qui est conçu pour les imams marocains, basé sur l’islam malékite et enrichi de soufisme. Mais il a été adapté au contexte malien : aux quatre heures hebdomadaires de « Coran et sciences coraniques », six heures d’arabe et quatre heures sur « la mission de l’imam (prière, prêche, enseignement et aspects sociaux) ».

Le cursus ajoute, selon les semestres, des cours sur « l’histoire » ou les « institutions du Mali », l’apprentissage de quelques-uns des principaux dialectes et même quelques notions de « santé mentale », sur les médias ou Internet.
Un islam du juste milieu

« Nous formons des imams authentiques qui n’iront pas chercher d’autres idées que celles qui sont dans la population depuis des siècles, cet islam du juste milieu que nous pratiquons au Maroc », fait valoir le directeur de cabinet du ministre des habous et des affaires islamiques, Abdallah Begdouri.

Non pas « un imam standard que l’on envoie partout dans le monde, comme ceux qui sont formés à Qom (en Iran, NDLR) ou à Médine (en Arabie saoudite, NDLR), mais sur mesure ».

Le cursus, que présente le directeur aux visiteurs, intègre même une présentation des « droits de l’homme », et une autre sur « l’initiation aux religions comparées ». Interrogé sur la possibilité que des représentants de ces autres religions viennent eux-mêmes expliquer leur foi dans ce cadre, le responsable ministériel se fait évasif : « Cela viendra peut-être… Ce n’était pas la priorité. »
Le président malien est venu en février

Signe de l’importance qu’il accorde à ce partenariat, le président malien est venu en février rencontrer et motiver ses imams. « Ici sont formés des imams contemporains de leur siècle, au service total des hommes. Des imams qui comprennent la société qui les entoure. Qu’ils sachent de retour au Mali être à leur tour des semeurs », leur a-t-il lancé, remerciant le Maroc pour son « cadeau inestimable ».

Les images de la salle informatique, passées en boucle sur les chaînes maliennes, ont fait forte impression semble-t-il : le nombre des candidats a en tout cas grimpé de 480 la première année à plus de 2 000 aujourd’hui… Choisis par le directeur pour venir répondre aux questions de la visiteuse, Adama Doumbia et Cheikh Omar Sow, qui exerçaient tous les deux à Bamako, sont bien conscients de leur « chance » d’avoir été sélectionnés.
Au Mali, la plupart des mosquées sont privées

« Au Mali, il n’y a pas de formation spécifique, on devient imam par la force des choses dès qu’on connaît un peu d’arabe », témoigne Adama, par ailleurs enseignant. « La plupart du temps, les mosquées sont privées : ceux qui les financent amènent leurs imams. »

« Ceux-ci ont généralement un problème de niveau car seuls quelques-uns ont la chance de faire des études supérieures », appuie son camarade, Cheikh Omar Sow. À la fois « enseignant et commerçant » au Mali, celui-ci souhaiterait d’ailleurs, à son retour, partager son savoir tout neuf et « encadrer d’autres imams ».

De fait, et au-delà de cette formation, le partenariat entre Maroc et Mali porte surtout sur l’encadrement politique et institutionnel du religieux. Un domaine dans lequel le Maroc, confronté lui aussi à l’islam radical, fait désormais figure de modèle…
Une grande réforme dans la foulée des attentats de 2003

Dans la foulée des attentats de Casablanca en 2003, le royaume chérifien a en effet engagé une réforme en profondeur de ses institutions religieuses, autour de la figure unificatrice du « commandeur des croyants », le roi Mohammed VI.

Un Haut Conseil des oulémas, seul apte à délivrer des fatwas (avis religieux), est placé sous l’autorité du ministère, tout comme les 50 000 mosquées du pays, auxquelles les fidèles peuvent contribuer financièrement mais dont l’imam est toujours désigné et payé par lui.

Religion et politique sont par ailleurs soigneusement tenues à distance. « Un imam marocain n’a pas le droit d’adhérer à un parti politique », rappelle Abdallah Begdouri. Enfin, la formation des imams – ainsi que des « mourchidates », les guides féminines de la prière – a été remaniée.
Création d’un réseau d’imams instructeurs

La semaine dernière, un « plan de soutien à l’encadrement religieux » a été dévoilé par le ministre des habous et des affaires islamiques, Ahmed Toufik, qui prévoit la création d’un réseau d’imams « instructeurs » chargés de chapeauter les mosquées locales.

Même les salafistes sont intégrés au jeu religieux national, comment en témoigne la récente prière de Mohammed VI à la mosquée de Tanger où officie le cheikh Mohamed Fizazi condamné à trente ans de prison ferme après les attentats de Casablanca, il a été gracié en 2011…

« Le seul pays qui montre le bon exemple, c’est le Maroc », se félicite ainsi le directeur de cabinet du ministère des habous. « Pourquoi tous ces problèmes sont-ils arrivés au Mali Parce que l’État, qui s’est proclamé laïc dans une société à 98 % musulmane, a laissé la religion à tout un chacun ; n’importe qui peut ouvrir une association, une mosquée, une école et prévoir un programme différent selon son rite et surtout selon qui paie… Il y a eu une ouverture excessive et négative qui a abouti à la perte par la société malienne de son identité religieuse. L’État doit reprendre en main cette question, qui relève à la fois d’un besoin social de la population et de la stabilité du pays ».
Préserver la stabilité politique du pays

Indéniablement, l’effort de Maroc témoigne aussi de sa volonté de préserver la stabilité politique et religieuse à ses frontières, et notamment dans le Sahel, dangereusement investi par nombre de mouvements djihadistes. Signe de cette préoccupation montante dans de nombreux pays à majorité musulmane, les demandes de semblables partenariats affluent en provenance d’autres pays africains, comme la Guinée-Conakry ou la Côte d’Ivoire, mais aussi du Maghreb comme la Tunisie ou la Libye, voire du Koweït ou des Émirats.

« Les Européens nous encouragent à continuer », reconnaît Si Mohamed Rifki, lui aussi conseiller du ministre des habous. « Un imam bien formé, c’est une garantie. » Lundi 12 mai, le roi Mohammed VI a posé la première pierre d’un futur centre de formation, toujours à Rabat, mais d’une capacité de 600 lits.

Anne-Bénédicte Hoffner


 Commentaires