Très utilisé par l’armée de terre et les forces spéciales sur le théâtre malien, l’hélicoptère de transport (EC725) rencontre des difficultés inédites. Les turbines des Caracal s’usent prématurément en raison des caractéristiques particulières du sable malien.
Au Mali, quand les hélicoptères de transport Caracal (Airbus Helciopters) ne sont pas cloués au sol moteurs cassés, ils ne peuvent voler à leurs performances maximales. "Il ne peut emporter que dix commandos à deux cents kilomètres à une température de 30°C et voit ses performances très dégradées lorsque la température excède 40°C", expliquent les sénateurs Daniel Reiner (PS), Jacques Gautier (UMP) et Gérard Larcher (UMP) dans un rapport consacré aux forces spéciales françaises. Selon la DGA (direction générale de l’armement), la capacité de transport maximum de cet appareil est de 28 commandos.
Ce qui rend furieux l’armée de terre, très, très agacée par ces pannes à répétition du Caracal et des Cougar rénovés sur un théâtre d’opération il est vrai très exigeant. "Ce n’est pas normal", fulmine-t-on au sein de l’armée de terre. "Des problèmes majeurs de moteur sont constatés et des changements sont nécessaires entre 60 heures et 100 heures alors que la limite d’envoi en révision générale annoncée par le constructeur est de 3.000 heures", précisent les trois sénateurs.
Les Caracal victimes de la silice malienne
Ce ne sont même pas les djihadistes qui les mettent hors d’état de nuire mais... la silice malienne, un mélange de poussière très fine et de grains de sables grossiers qui use prématurément les turbines des Caracal (Makila 2). Des moteurs qui finissent par mordre un à un la poussière, contrairement au Tigre par exemple, qui n’en souffre pas. "Seulement deux hélicoptères de manœuvre (Caracal et Cougar) sur cinq sont disponibles simultanément", constatent les sénateurs. Pourquoi ? Parce que le Caracal, un hélicoptère lourd doté de cinq pales qui brassent beaucoup d’air et forment des nuages de sable, n’a pas le bon système de filtration pour protéger son moteur.
Problème, cet ennemi insidieux est omniprésent au Mali et pénètre trop facilement dans les turbines du Caracal, pourtant irréprochable lors des opérations en Afghanistan, Libye ainsi qu’à Djibouti. C’est le système de filtration, qui est sous la responsabilité d’Airbus Helicopters, qui est mis en cause . "La granularité particulière du sable malien crée une érosion rapide des moteurs", confirme-t-on chez le constructeur. Il rappelle qu’initialement le Caracal était conçu pour des missions de récupération d’aviateurs dont l’appareil a été abattu en territoire ennemi. Un appareil développé pour l’armée de l’air après la guerre en Serbie.
Chez Airbus Helicopters, on met l’accent également sur les conditions d’emploi extrêmes des hélicoptères au Mali avec des missions très longues, de plus de douze heures. "Les pistes d’atterrissages et de décollages des hélicoptères ne sont pas préparés, les appareils bouffent beaucoup du sable. Et la façon, dont ils sont opérés, génère une usure plus rapide".
Une panne qui revient très chère
Un dysfonctionnement qui coûte cher à l’armée, les sénateurs dénonçant "le coût de l’heure de vol excessif". "Depuis janvier 2013, 22 moteurs ont été changés, précisent les auteurs du rapport. Enfin le coût du maintien en condition opérationnelle est lui aussi prohibitif. Le coût de réparation d’un moteur est de l’ordre de 300.000 à 600.000 euros hors taxe. Cette situation est inacceptable. Des mesures correctrices des industriels concernés s’imposent". Notamment le service après-vente qui "n’est pas à la hauteur de ce que l’Etat est en droit d’attendre"."Cela nous coûte trop cher", laisse entendre de son côté l’armée de l’air.
Airbus Helicopters en coopération avec le motoriste Turbomeca a trouvé une solution. Le constructeur a dans un premier temps proposé de mettre à disposition via son réseau mondial de son client militaire des lots de moteurs de rechange civils (EC225) pour assurer la disponibilité des Caracal au Mali, précise-t-on à La Tribune. Des lots de rechanges qui sont sous la responsabilité des militaires.
A qui la faute ? A personne. En accord avec le client, Airbus Helicopters a conservé pour le Caracal le même système de filtration que celui du Cougar, un hélicoptère pourtant développé dans les années 80 et doté d’un moteur moins puissant (Makila 1A1). Certains estiment qu’à l’époque le ministère avait voulu déjà faire des économies et éviter de payer des équipements plus solides et donc plus chers.
Pas d’impact à l’export ?
Pour autant, au-delà de l’amélioration des flux logistiques des moteurs, l’armée de terre et de l’air réclament un nouveau filtre à sable pour leurs hélicoptères. La DGA étudie la possibilité de développer un nouveau système de filtration à l’épreuve du sable malien. Turbomeca y travaille déjà. Le motoriste "développe des solutions de modifications plus robuste", assure-t-on à la Tribune.
Un dysfonctionnement qui peut être in fine facilement traité et ne pas impacté Airbus Helicopters dans ses campagnes export, notamment en Pologne. Par exemple, le Tigre possède déjà ce type de filtre à sable.