Mis en liberté, sur décision unanime du parquet, le président – directeur général du Pari Mutuel Urbain du Mali (PMU-Mali) n’a, pour autant, par fini avec la justice.
Après avoir contraint le juge à faire appel de sa propre décision, le ministre de la Justice, Garde des Sceaux, s’apprêterait à lancer un mandat d’arrêt international contre Mr Idrissa Haidara. Mais aussi, une procédure visant à saisir ses biens. Sans jugement.
Dans une lettre, déposée à notre rédaction, sa famille dénonce cet acharnement judiciaire, sans précédent, dont il fait l’objet depuis le 27 décembre 2013. Et, avec lui, toute sa famille. Lissez plutôt !
Nous venons, par la présente, vous informer de la situation dans laquelle notre famille vit depuis le 27 décembre 2013 à cause d’un acharnement juridique sans précédent.
La cible est notre père, M. Idrissa HAÏDARA, président-directeur général du PMU-Mali, en tout cas jusqu’à cette date où je vous écris malgré ses quatre mois d’incarcération à la prison centrale de Bamako.
Aussi étonnant que cela puisse paraître, notre père a été incarcéré à la suite d’un rapport du vérificateur général (« Végal ») qui l’accuse de mauvaise gestion dans la société qu’il dirige pour un montant de 34 milliards de francs CFA.
Cette incarcération a été précipitée. Le ministre de la Justice a ordonné au juge du pôle économique de mettre notre père sous mandat de dépôt et ce sans enquête préalable, puisque le vérificateur n’avait pas encore envoyé son rapport, ni d’ailleurs saisi la justice pour dénonciation des faits, afin que l’enquête puisse démarrer. Il a fallu que notre père fournisse une copie dudit rapport qui était en sa possession.
Il a juste suffi d’un simple courrier de dénonciation du ministre de la Justice, dans lequel ce dernier intime l’ordre au juge de mettre notre père sous mandat de dépôt. Voilà la justice dans laquelle nous vivons aujourd’hui au Mali.
Nous pourrions corroborer ces dires par des preuves tangibles et nous défions quiconque de prouver le contraire.
Résumé
Instruction du ministre de la Justice au juge d’interpeller notre père (PDG PMU-MALI) et de le mettre sous mandat de dépôt.
Où est l’indépendance de la justice et du juge ?
Les faits (ci-joint le tableau récapitulatif des faits reprochés suite au contrôle du vérificateur général) prétendument reprochés à mon père ont tous été justifiés. Aucune partie civile dans le dossier. Ni le procureur général (qui a fait appel sur ordre de son ministre de tutelle, le ministre de la Justice, après avoir lui-même donné son aval à sa libération), ni le contentieux de l’État (qui cite aujourd’hui le PMU-MALI comme partie civile, très étrange, quelque part se substitue même au procureur et demande le renouvellement du conseil d’administration du PMU-MALI car ce dernier a renouvelé sa confiance à mon père ce que le contentieux de l’Etat qualifie de complicité). Je rappelle une fois de plus que la société PMU-MALI ne s’est jamais constituée partie civile et que le conseil d’administration a réitéré sa confiance à notre père, Idrissa HAÏDARA.
C’est sur la base des pièces justificatives et des différentes auditions que le parquet a donné un avis favorable à la mise en liberté de notre père, à la suite de quoi le juge a décidé de procéder à cette libération assortie d’une caution de 40 Millions FCFA payée au trésor.
La libération de notre père était dès lors connue du parquet, donc du ministre de la Justice, qui n’a jamais fait appel. Or, aussi étonnant que cela puisse paraître, à peine avait-on libéré notre père que le lendemain le ministre faisait appel, et le « Végal » prétendait avoir d’autres éléments à fournir, après plus de quatre (4) mois d’instruction. Pourquoi donc cette rétention d’informations ? Pourquoi le contentieux de l’État n’a-t-il pas porté plainte ? 2
Et de surcroît personne ne prend le temps de lire le dossier, on fait fi de toutes les enquêtes opérées par le juge d’instruction. Nous assistons à un procès expéditif, telle la rapidité avec laquelle le dossier a été traité à la cour d’appel. Presque six mois de procédure balayée en un revers de main. Première décision de liberté annulée, aucune mention de la plainte, reconduction des faits cités du rapport de vérificateur général et même requalification des faits car maintenant on parle de faux arrêtés ministériels (pourtant tous certifiés par les ministres finances concernés) et de sortie d’argent exclusivement au profit personnel.
Des incohérences patentes :
- Le Vérificateur général parle 34 milliards Francs CFA de mauvaise gestion, mais demande le recouvrement de 3,8 Milliards Francs CFA ;
- Le courrier du ministère parle de 39 Milliards Francs CFA ;
- La plainte parle de 3,7 Milliards Francs CFA, justifié à 100% ;
- Le contentieux de l’Etat parle de 4 Milliards et cite maintenant le PMU Mali comme partie civile alors qu’il n’y a aucune partie civile dans le dossier ;
- Et pour finir la cour d’appel parle 34 Milliards, elle n’a repris que le rapport du vérificateur général, sans même prendre connaissance de la plainte, qui mentionne pourtant les montants supposés reprochés et tous justifiés.
Des procédures judiciaires non respectées :
- Instruction donnée par le ministre au juge pour faire un mandat de dépôt sans enquête préalable ;
- Présomption d’innocence jamais respectée et d’ailleurs on a jamais fait mention des réponses et des preuves apportées par notre père ;
- Suite à la libération on voulait remettre en prison notre père sans mandat de dépôt uniquement sur autre du ministre alors que même s’il y a appel c’est sa caution qui devrait le représentant devant la loi. Et ça c’est légal ;
- Aujourd’hui le ministre demande un autre mandat d’arrêt (national et international) suite à la décision de la cour d’appel, qui a cassé la décision de liberté sous caution, ce qui ne nous étonne point, et malgré le pourvoi devant la cour suprême qui suspend toute procédure mais on a décidé d’outre passé là encore la loi.
Situation actuelle
Le ministre de la Justice apparemment n’est plus d’accord avec la libération de notre père.
Des agents du pôle économique ont envahi notre domicile, sans mandat de dépôt ni autre document justifiant l’interpellation de notre père.
D’après leurs dires, c’est leur chef, un capitaine, qui leur a donné l’ordre d’interpeller notre père, et ce capitaine aurait reçu l’ordre du ministre de la Justice mais n’avait aucun mandat.
Comment peut-on interpeller quelqu’un sans mandat ? Quelle justice est-ce là ?
Nous ne comprenons pas cet acharnement, à croire que tout est mis en oeuvre pour que notre père ne bénéficie jamais de son droit le plus élémentaire, celui relatif à une justice équitable que le président de la République lui-même reconnaît à tout Malien. Tout ce que nous demandons, c’est la justice. Que ce mot ne soit pas vain dans la bouche des plus hautes autorités du pays et que notre père soit avant tout dans ses droits. Que fait-on de la présomption d’innocence ? 3
Autre injustice
Comment pourra-t-on nous expliquer que subitement, dans un courrier, le contentieux de l’État cite aujourd’hui l’entreprise PMU-MALI comme partie civile alors que la société ne s’est jamais constituée partie civile ? Et comment se fait-il que le « Végal » prétende avoir d’autres éléments à fournir, alors qu’il ne l’a jamais fait en près de cinq mois de procédure ?
Aujourd’hui c’est le contentieux de l’État qui se dédit et se constitue, à la place du procureur général et/ou de l’entreprise PMU-MALI et de son conseil d’administration, partie civile pour le compte du PMU-MALI.
Est-ce que notre père, qui est un citoyen à part entière, ne devrait pas bénéficier non seulement de la présomption d’innocence mais encore et surtout d’une procédure juste et équitable ?
Notre père est malade, il est sous médicament depuis un (1) an à la suite à d’une lourde opération. Malgré plusieurs analyses médicales qui l’attestent, on n’a pas voulu le laisser aller à la clinique. À croire qu’on veut le tuer.
Notre famille souffre depuis le 27 décembre 2013, date de l’interpellation de notre père. On nous a mis sur écoute, des agents sont postés devant notre domicile familial, tous nos faits et gestes sont décryptés, on nous suit partout… Sans compter toutes les insultes et calomnies dans la presse.
Notre père n’est pas un délinquant financier, encore moins un bandit.
Tout ce que nous demandons, c’est la justice dans toute sa plénitude et toute son indépendance.
Dans tous les cas, nous irons jusqu’au bout, ne serait-ce que pour l’honneur de notre père et de notre famille.
Rappel
Notre père et son ancien directeur, M. Nouhoum Traoré (paix à son âme), ont créé la société PMU-MALI. Notre père y travaille depuis vingt ans. Depuis qu’il a pris la tête de la structure, le PMU-MALI est premier, en termes de chiffre d’affaires, parmi tous les PMU d’Afrique de l’Ouest.
Depuis sa nomination comme PDG, il a multiplié le chiffre d’affaires au moins par trois. Donc qu’on ne nous fasse pas avaler des choses qui ne sont pas vraies, comme la société qui ne marcherait pas à cause des mauvaises gestions.
D’autre part, nous tenons à rappeler que le contrôle du vérificateur porte sur six ans, 2006-2011, et il prétend qu’il y aurait eu 34 milliards de francs CFA de mauvaise gestion ! (Sachant que la plainte porte sur environ 3,8 milliards, représentant pour la plupart des investissements de l’État – tout a été fourni à la justice et confirmé par les anciens ministres de l’Économie de l’époque). Un simple calcul permet de comprendre toute l’absurdité de ce rapport car dans la même période (2006-2011), le chiffre d’affaires de la société était inférieur de beaucoup. Alors de qui se moque-t-on ? Sans doute de la communauté internationale sous prétexte de lutter contre la corruption.
Notre père ne saurait être le bouc émissaire de quelque système ou stratégie que ce soit. 4
Si, lors de la vérification, notre père n’a pas voulu donner certaines pièces justificatives, c’était uniquement pour préserver l’État (certaines informations relevaient du secret-défense) et ce sur instruction de son ministre de tutelle, le ministre de l’Économie et des Finances.
Nous sommes inquiets pour la suite, car nous pensons que les plus hautes autorités de notre Pays nous dénient le simple droit à une justice équitable.
Nous vous remercions de toute l’attention que vous porterez à ce courrier.
Bamako, le 19 Juin 2014