L’association Djoyoro Fa a organisé, samedi dernier, une conférence débat au Centre international de conférence de Bamako. On notait au présidium, la présence du président de l’association, Koniba Sidibé, de Younoussi Touré et d’Ibrahim Ag Oumarou. Le thème portait sur la question des minorités touareg et arabe dans une perspective historique et géostratégique. Pour Djoyoro Fa, le caractère récurrent et de plus en plus autonomiste de la rébellion dans les régions septentrionales du Mali impose une analyse de fond, quelques semaines après la chute du régime ATT, illustration des tensions sociétales profondes. A cet égard, indique Djoyoro Fa, une association dont la naissance résulte de la prise de conscience d’un groupe de Maliens de toutes origines, de toutes appartenances politiques et de tout statut social, de leur responsabilité collective et individuelle dans la situation que vit le Mali aujourd’hui, a le devoir d’apporter sa contribution à une meilleure compréhension des irrédentismes et rébellions récurrentes des populations d’origine arabo-berbères du Mali.
Les objectifs
Djoyoro Fa indique : ‘’ les objectifs de la conférence sont de traiter de la complexité des enjeux dans l’espace saharo-sahélien à la lumière des évolutions récentes qui ont précipité la région dans une crise profonde. L’apport des chercheurs et acteurs s’intéressant aux régions du Nord du Mali permettra de mieux comprendre ce qui se joue entre les différents acteurs de la région. Au cœur des conflits d’influence, les régions du Nord du Mali sont l’objet de revendications politiques par des groupes de Touareg depuis des décennies. L’espace saharo-saharien présente un grand intérêt géostratégique sur le plan des ressources naturelles et énergétiques qui y sont nombreuses et pour des pouvoirs en émergence, il est devenu une zone de trafic où s’exercent de nouvelles formes de domination contre lesquelles les Etats actuels semblent bien démunis’’
L’avenir de l’espace saharo –saharien, ajoute-t-elle, est en jeu tout autant que celui de l’Afrique de l’Ouest et des rapports avec l’Europe. Elle déclare que celle-ci n’a pas su, empêtré dans les relations néocoloniales, construire de véritables politiques de coopération pour le développement avec les pays de la région. ‘’ Elle a même, souligne Djoyoro Fa, souvent contribué à ce que se maintiennent en place des régimes à la démocratie de façade, dont la légitimité est aujourd’hui faible, comme en témoigne le renversement rapide du président malien, les mouvements sociaux et de contestations qui s’expriment dans la région contre les mauvaises conditions de vie et la pauvreté. ‘’ L’association signale que dans le cadre de la crise du capitalisme mondialisé, les tensions sur l’accès aux ressources stratégiques augmentent et les rapports de domination prennent de nouvelles formes, bouleversant les modes de gestion du politique. L’association Djoyoro Fa estime que ces évolutions méritent d’être débattues. Elle note : ‘’ Au fil du temps, des coopérations se sont tissées entre le Nord et les coopérations décentralisées. L’insécurité dans les régions du Nord du Mali a mis un coup d’arrêt aux projets de développement. Mais les acteurs restent en contact souhaitant trouver les moyens de poursuivre ce qui a été commencé et de contribuer au retour de la paix dans la région. ‘’ La portée de la conférence consistait à dresser l’état des lieux de la situation en terme de sécurité, de crise humanitaire et politique pour mener avec les chercheurs, les élus et d’autres acteurs intervenant dans les régions du Nord du Mali, une réflexion critique sur les modes de gestion du politique dans un contexte de crise internationale profonde, la décentralisation, la réforme de l’Etat comme perspective de sortie de crise. L’association a fait remarquer qu’à la faveur des soulèvements qui ont eu lieu dans les pays du Maghreb et de l’Afrique du Nord, l’Occident porte une responsabilité particulière dans la déstabilisation de la région et la crise en cours au Mali, contrecoup direct de la guerre de l’Otan en Libye. Un sentiment anti-Occident et Cedeao gagne du terrain, surtout au Mali qui entre dans une transition fragile. Les contributions ont donc un rôle à jouer, a-t-elle soutenu, pour changer les perceptions et contribuer à une sortie de crise durable.