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Armée malienne : Les défis de la réforme et de la restauration
Publié le mercredi 29 aout 2012  |  Le Combat


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© Getty Images par DR
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Les revendications corporatistes affichées par les mutins du Capitaine Sanogo avaient finalement débouché sur le coup de force du 22 mars dernier. Après les affrontements entre bérets verts et rouges, les frères d’armes sont aujourd’hui obligés de se rapprocher, sinon de se réconcilier. Entre temps, de nouveaux défis sécuritaires s’annoncent avec, en filigrane, de nombreuses interrogations, notamment concernant la reconquête du Nord.


Du refus du déclassement à la contestation corporatiste

La « Grande muette » malienne doit à présent sortir de sa réserve. La période Moussa Traoré a fonctionné comme une « boîte de pandore » ouverte par l’armée. Le coup d’Etat du 26 mars 1991 qui, aux dires de ses instigateurs, s’est déroulé sans effusion de sang a fait des émules. 21 ans plus tard, soit en mars 2012, d’autres soldats prirent d’assaut les sites stratégiques de la capitale pour revendiquer l’amélioration, sinon la clarification de la situation au Nord, en attendant d’être situés sur le sort des Bérets rouges à propos de leur opération de contrecoup d’Etat contre leurs frères d’armes de Kati le 30 avril dernier. L’un des points d’achoppement de l’application de la réforme et de la restauration de l’armée malienne, c’est le cas des Bérets rouges. Les avancées dans ce secteur hautement sensible et stratégique sont telles que certains observateurs de la vie sociopolitique malienne parlent de blocage du processus de sortie de crise. C’est donc pour mettre fin à ces conjectures que le gouvernement a mis sur pied un Comité de suivi et de réforme des forces de défense piloté par le Capitaine Sanogo.

Vers la restauration et la restructuration de l’armée

Ce Comité est un organe de réflexion dont l’une des missions consiste à proposer un cadre général de composition, d’organisation et de fonctionnement des Forces de défense et de sécurité. Il est également chargé de soumettre aux partenaires une stratégie globale de restauration et de restructuration de l’armée. En dépit des fronts créés par l’armée dans la région de Mopti, les points de vue sont divergents quand il s’agit « d’accorder les violons » à propos de la reconstruction de l’armée. La question des militaires para commando n’a toujours pas été tranchée. Le facilitateur Blaise Compaoré, à qui ses pairs ont confié la gestion de ce dossier, ne s’est toujours pas prononcé sur la question. C’est que le sujet est d’autant plus délicat qu’il impose des concessions difficiles.

L’un des défis de la nouvelle armée : sauver le soldat malien

Les violences engendrées par la guerre ne se limitent pas aux affrontements entre les groupes armés en présence. Le conflit a entraîné une crise sécuritaire qui revêt plusieurs formes. L’armée était confrontée à des tensions qui se sont traduites par des erreurs de comportement et des atteintes à l’honneur militaire. Par contre, ceux qui étaient au front dénonçaient leurs conditions de vie depuis le regroupement des soldats déployés sur la ligne de front. Ce qui renforçait la brutalisation des champs politique et militaire. La nouvelle armée malienne devra également faire face à une montée en puissance de la criminalité. Les agressions ne visent plus seulement les domiciles des citoyens anonymes : elles concernent aussi les entreprises et souvent même des institutions de la République. Le mode opératoire s’est affiné dans la mesure où ce sont des armes de guerre qui sont mobilisées (kalachnikovs). Les enlèvements suivis de demande de rançons, les prises d’otage et le trafic transfrontalier des enfants, voire des adultes, rappellent ironiquement les films hollywoodiens. Les « Yahoo boys » et « Yahoo girls » qui se promènent sur la toile se livrent de plus en plus à la confection de faux documents administratifs et à des siphonages de fonds bancaires. Mais la situation sécuritaire du Mali n’est pas désespérante. En dépit de cette baisse sensible de l’indice de sécurité, les défis qui attendent la nouvelle armée malienne sont énormes et nécessitent une véritable prise en main du territoire national par l’armée dès le retour de la paix. Une restructuration militaire et sécuritaire post-conflit est une activité sensible et peut être porteuse de menaces susceptibles de déboucher sur une escalade du conflit. L’introduction de cessez-le-feu, d’accords de paix ou même les interventions discrètes visant le désarmement de belligérants ne garantissent pas toujours une amélioration tangible de l’indice de sécurité. Les situations post-conflit sont souvent le théâtre de massacres et de règlements de compte parce que les victimes d’hier peuvent s’en prendre à leurs bourreaux et alliés.

Réforme et nouvelle armée

La nouvelle armée du Mali se construira avec une intégration des Bérets rouges. Ce processus est capital pour la réconciliation nationale et la restauration de l’autorité de l’Etat. Or on craint que les interventions des différents partenaires impliqués dans le processus ne grèvent pas les efforts de paix. Les organismes internationaux (Banque mondiale, PNUD, ONU, etc.) peuvent se lasser de blocages supposés ou réels de l’une ou l’autre des parties et délaisser le conflit en allégeant leurs soutiens. On pourrait alors se retrouver dans un schéma de « conflit des papous ». La prudence de la CEEAO, que d’aucuns assimilent à de l’indolence ou à un manque de volonté, révèle plutôt de la prudence : c’est que la communauté sous-régionale ne tient pas à être accusée de réarmer d’anciens combattants.

Paul N’Guessan

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