Le 26 juin est consacré Journée internationale de lutte contre l’usage et le trafic de drogue. Il a été célébré au Mali par une marche contre l’usage et le trafic des substances psycho actives et par une conférence-débat animée par le Pr Baba Koumaré, médecin psychiatre, dans l’amphithéâtre de la FDPRI, sous la houlette du ministère de l’Intérieur et de la Sécurité, dont le bras armé dans ce domaine est l’Office Central des Stupéfiants, dirigé par le Colonel Moussa Zabour Maïga.
Créé d’abord par le Décret n°10-212/PRM du 13 Avril 2010, puis par l’Ordonnance n°2013-012/P-RM du 02 Septembre 2013, l’Office Central des Stupéfiants est un service central du Ministère de la Sécurité, spécialisé dans la lutte contre le trafic illicite des stupéfiants. Il est opérationnel depuis le second semestre de l’année 2011.
L’OCS a pour mission principale de mettre en œuvre l’ensemble des mesures de prévention, de contrôle et de répression envisagées aux plans national, sous-régional, régional et international pour une lutte efficace et coordonnée contre l’usage et le trafic illicites des stupéfiants. Il est investi des missions de Police Judiciaire en matière de trafic illicite de drogues.
Le personnel de l’OCS compte 140 membres, répartis entre Gendarmes, Policiers et Douaniers principalement, auxquels s’ajoutent quelques Militaires, Gardes et personnels d’autres administrations. Malgré les insuffisances qui persistent en matière de textes législatifs et réglementaires relatifs à son fonctionnement et à ses missions, ainsi qu’en termes de ressources humaines, matérielles et financières, l’OCS peut se targuer de belles réussites dans le domaine de la lutte contre le trafic de drogue.
Les saisies opérées au cours de l’année 2013 permettent d’évaluer le niveau de ce trafic, qui semble très important. En effet, ce sont 6,792 kg de cocaïne, 4,400 kg et 78 plaquettes d’amphétamine – métamphétamine, 858,900 kg, 347 boules et 4 briques de cannabis, 227,700 kg, 68 briques, 40 rouleaux, 7 barres et 361 boules de chanvre indien, 53 paquets et 50 plaquettes de Tamadol, 20 boîtes d’éphédrine, 10 paquets de comprimés appelés «Béret rouge» et 118 plaquettes de Diazépam (Valium) qui ont été récupérés sur diverses personnes en plusieurs sites de toutes les régions du Mali sauf Kidal, principalement dans le District de Bamako.
En termes de nationalités, les 101 personnes appréhendées, sans distinction de sexe, sont 85 Maliens, 8 Burkinabé, 2 Ivoiriens, 1 Nigérien, 2 Nigérians, 1 Béninois, 1 Guinéen et 1 Bolivien. Cela bat donc en brèche l’idée reçue, et largement répandue, qui voudrait que les trafiquants de drogue dans notre pays soient majoritairement étrangers!
D’autres statistiques, hospitalières celles-là, permettent de dresser un portrait-robot des types de consommateurs, pour le District de Bamako tout au moins. Ainsi, en 1989, les aspects sociodémographiques et culturels de la toxicomanie au Mali ont été abordés dans une enquête épidémiologique de l’Institut de Formation et de Lutte contre la Drogue (IFLD), en collaboration avec l’AMAMM.
Il ressort des résultats de ces travaux, tels que présentés par le Pr Baba Koumaré, une prolifération de la consommation de drogue au sein de la population générale, avec tous les âges représentés, avec une proportion importante de sujets de moins de 30 ans. La tranche d’âge moyenne de la majorité des usagers se situerait entre 12 et 35 ans.
Dans le Service de Psychiatrie du Point G, en 1993 – 1994, 13,7% des patients étaient hospitalisés pour diverses toxicomanies. Parmi eux, 74,63% ont été pris en charge pour polytoxicomanie, 18% pour addiction à l’alcool seul, 16% pour usage de cannabis seul. A noter, 1 cas de consommation d’héroïne a été pris en charge pour désintoxication.
Pour ce qui est du milieu carcéral, toujours selon les résultats présentés par le Pr Koumaré, en 1989, sur 639 sujets enquêtés, 497 étaient détenus pour consommation, détention et trafic illicite de drogue. 457, soit 92,5% étaient de sexe masculin, 69, 3% étaient célibataires, 73,3% avaient un niveau scolaire relativement faible et toutes les ethnies étaient concernées. Les produits utilisés étaient principalement les médicaments (186 cas soit 41%), le tabac (85 cas soit 18,7%), le cannabis (64 cas soit 14,1%), l’alcool (50 cas, soit 11%) et l’héroïne dans 3 cas. La dépendance aux produits était créée dans 143 cas, soit 34,3% d’usagers qui ne pouvaient se débarrasser de leur addiction sans une aide spécialisée.
C’est dire que le tableau est sombre et que la dépendance aux diverses drogues répertoriées officiellement, y compris le tabac et l’alcool, il est nécessaire de le rappeler, frappe surtout le milieu jeune, ce qui pourrait devenir un problème de santé et de sécurité publiques si nous n’y prenons garde. Nous reviendrons sur ce sujet, via le thème choisi pour 2014, dans une prochaine parution.
Ramata Diaouré