Notre pays et les groupes armés ont signé le 24 juillet dernier à Alger une feuille de route consensuelle en vue des futures négociations pour un accord global et définitif dans le cadre de la crise que vit le Mali dans sa partie Nord. Il s’agissait de l’aboutissement d’un processus qui s’étalera jusqu’au mois d’octobre et qui connaître, en principe, son épilogue en territoire malien. Présent à cette rencontre, en plus mouvements armés et non armés, le gouvernement malien, les médiateurs et autres facilitateurs sous l’égide de l’Algérie. Sur ces pourparlers, nous avons échangé avec le vice-président du MNLA, Mahamadou DieriMaïga. Dans l’entretien qui suit, il évoque sans détour ses sentiments par rapport à la délégation gouvernementale, ses attentes par rapport aux négociations futures, sa compréhension du fédéralisme et du statut de l’Azawad. Sans oublier la position de son groupe par rapport à un futur remaniement…
Nouvelle Libération : Vous rentrez d’Alger où vous avez pu obtenir un accord sur la feuille de route des futures négociations pour une paix définitive au Mali. Comment s’est passée la rencontre et que retenez-vous de ce document et du comportement des différentes délégations ?
Mahamadou DjeriMaïga: Bien sur que nous avons eu un accord sur la feuille de route. Mais il faut signaler qu’en partant en Algérie nous étions pas suffisamment informés sur l’agenda des assises et nous n’avons pas manqué de le souligner. Cependant par la suite nous nous sommes organisés et dit que de toutes les façons la communauté nationale, le gouvernement du Mali et la Communauté Internationale ont cautionné la rencontre ; alors nous ne ferons pas objection à la paix. Nous avons beaucoup apprécié le comportement de la délégation gouvernementale et nous pensons qu’avec eux,Inch’Allah nous ferons un bon travail. Je profite pour souhaiter au peuple de l’Azawad, au gouvernement malien, à tout le peuple malien et à tous ceux qui sont là pour nous aider à sortir de cette crise, une bonne fête. Une bonne fête également au Gouvernement algérien et surtout à son ministre des Affaires Etrangères. Il est à noter quand même que nous avons été surpris de voir des groupes qui n’ont pas de problème avec le Mali venir compliquer la tache au médiateur et aux autres délégations. Nous pensons que ces groupes ont leur place dans le dialogue inclusif en tant que partie civile, mais pas dans les négociations en tant que mouvements armés. Nous disons qu’il est temps pour eux de choisir leur camp avant le 17 Août (date de la reprise des négociations).
N.L : Quelles sont vos attentes par rapport au document que votre délégation a signé à travers son représentant Algabass Ag Intallah du HCUA
M.D.M : Nous pensons que nous avons notre lecture de cette feuille de route et le gouvernement Malien aussi a la sienne. Il est clair que la feuille de route a été signée entre le gouvernement malien et la coordination des mouvements (MNLA, HCUA, MAA). Ce qui veut dire que la négociation se déroule entre les deux belligérants.
N.L : Dans la feuille de routes en questions, il est question de développement économique. Il s’agit surtout des richesses au Nord. Comment entendez vous qu’elles soient gérés sans que ça ne constitue une source de frustration pour les autres régions maliennes, si elles s’y voient exclues ?
M.D.M: Nous n’avons pas engagé la lutte au nom des autres régions du Mali. Donc, nous n’avons pas à juger de leur comportement après l’accord global. Nous avons des revendications pas seulement économiques. Et ces revendications seront déposées sur la table et il n’y aura pas de tabou.
N.L : Il pourrait aussi être question de réintégration de vos combattants à la suite d’accord définitif. Le Premier ministre Mara en a parlé et c’est un sujet qui fâche au sein de la population à Bamako. Comment voyez-vous ces futures réintégrations et quel est votre appel à l’endroit de la population et des autorités ?
M.D.M : Nous ne parlons pas d’intégration mais nous parlons de refondation de l’Armée. Nous verrons la forme de cette nouvelle armée après la négociation, pas avant. Je ne juge pas de ce qui fâche la population de Bamako, car elle veut toujours maintenir les Azawadiens dans l’obscurantisme afin de bien les exploiter. Nous pensons que chaque chose en son temps et le temps de la vérité à sonner qu’on le veuille ou pas.
N.L : Au départ vous parliez d’indépendance, ensuite d’autonomie, après il a été question de fédéralisme. Rien de tout ça dans le document signé. Ou est-ce cela existe sans que ce ne soit expressément mentionné ? Quelles sont nouvelles ambitions par rapport aux régions du Nord ?
M.D.M : Bien sur que nous parlerons toujours de l’Azawad et du fédéralisme. Si vous prenez le document au niveau des modalités d’organisation des négociations de Paix, il est mentionné : « Des négociations spécifiques entre le Gouvernement et les mouvements belligérants ». Cela veut dire que dés le 17août la question de l’Azawad et de son statut seront sur la table. Nous n’avons pas voulu tirer sur la corde dans la feuille de route, car nous ne sommes pas encore aux négociations. Mais,dès l’entame des négociations le premier point sera la reconnaissance de l’Azawad et son statut. Ce n’est qu’après que les groupes thématiques seront formés. Nous connaissons le Mali et les accords passés nous servent de leçons. Nous allons tout faire pour qu’il y’ait un nouveau Mali différent de celui que nous connaissons. Sans oublier que nos plateformes seront prises en compte par les groupes de négociations thématiques.
N.L : On parle officieusement de remaniement ministériel à la suite de l’accord définitif, c’est à dire en octobre, les mouvements que vous représentez accepteraient-ils de siéger dans le gouvernement ?
M.D.M : c’est sur qu’après l’Accord global définitif il y aura un gouvernement de transition pour gérer les affaires avant son application, mais nous ne sommes pas encore là. Essayons d’abord de trouver un accord, après on verra.
N.L : Pour coller à l’actualité, il s’est passé récemment un drame à Gossi avec le crash de l’avion d’Air Algérie, on a vu à peine les autorités maliennes dans ce dossier, mais plutôt le Burkina Faso, qu’en pensez-vous ?
M.D.M : Oui, ce sont ceux qui travaillent qui seront vus. Vous serez d’accord avec moi que les services de renseignements du Mali ont mal centralisé les informations et cela a induit le Président de la République en erreur. Ils l’ont fait dire que le crash a eu lieu dans la région de Kidal. Il y’a beaucoup de défaillance qu’il faut corriger dans ce pays. Enfin je dis au musulmans du monde entier bonne fête. (PS : L’entretien a été réalisé le jour de la fête de Ramadan)
Propos recueillis par Makan Koné