Rien ne va plus pour Appolinaire Compaoré, l’homme d’affaires burkinabè qui s’est vu octroyer, en violation de la procédure, la troisième licence de téléphonie globale au Mali. Après avoir payé 55 milliards de nos francs aux autorités maliennes, en deux tranches (33 milliards pendant la transition et 22 milliards plus récemment, sous IBK), Compaoré, qui avait trahi son colistier Cesse Komé, multiplie les va-et-vient entre Bamako et Ouagadougou, afin d’étaler son plan d’investissement, compris entre 80 et 100 milliards de nos francs dans un premier temps.
Les banques de la sous-région, sollicitées par Appolinaire Compaoré, ne veulent pas financer ce montant faramineux, dans un environnement conflictuel et incertain.
Cet homme d’affaires, bien connu désormais au Mali par la haute administration, les banques et surtout le ministère des Finances, veut piéger le gouvernement Moussa Mara, à travers un expert, pour l’amener à la faute et annuler l’attribution de la 3ème licence. Une bien intelligente manière de lui donner l’occasion d’ester en justice contre l’Etat.
Le piège, bien compris par le ministère de la Communication, est en train d’être contourné par le ministre Mahamadou Camara, qui refuse la note explicative de cet expert, qui préconise le retrait, disons l’annulation, de la troisième licence, en raison des nombreuses irrégularités qui ont émaillé le processus d’attribution. Ce ministre, qui a la tête sur les épaules, ne veut pas du tout prendre une décision qui pourrait se retourner contre l’Etat, au double plan financier et politique. Il attend en effet impatiemment que Compaoré respecte le cahier des charges, et tous ses engagements.
Compaoré peine à s’installer, malgré le paiement de 55 milliards, parce qu’il n’a pas d’argent pour financer son plan d’investissement, sans compter ses ennuis judiciaires à Paris, où il se retrouve devant la Cour de Cassation dans le contentieux qui l’oppose à Etisalat pour le contrôle de Télécel Faso. Il a perdu une manche décisive et tout porte à croire que la suite des évènements ne lui sera pas favorable. S’y ajoute l’affaire de la troisième licence de téléphonie globale, qui l’oppose toujours dans la capitale française à Cesse Komé, homme d’affaires malien résidant en Côte d’Ivoire.
Dans le cadre de la procédure d’arbitrage international qu’il a lancée contre l’Etat malien, suite à la «réattribution» de la troisième licence télécom à Planor, la société de Compaoré, Cesse Komé réclame 7 milliards de nos francs à l’Etat du Mali. Une note très salée qui doit être acquittée par Compaoré.
En effet, en annexe de la convention de concession, que Jeune Afrique a consultée, Planor s’est engagé à couvrir «la totalité des dommages» dont l’Etat serait redevable suite à un recours. A peine l’existence de la procédure d’arbitrage connue, l’Etat a rappelé par courrier à Appolinaire Compaoré, le patron de Planor, son engagement écrit.
Voilà les raisons objectives qui font que Compaoré peine à s’installer au Mali et que les banques deviennent de plus en plus craintives à son endroit. Quant à l’Etat du Mali, il doit rester tranquille et veiller au respect du cahier des charges et des engagements, sans oublier que ceux qui ont fauté dans la procédure d’octroi de la troisième licence doivent en répondre.
Faut-il rappeler que la licence a été attribuée une première fois à Alpha Telecom Mali, en 2012, sous le règne d’ATT. 56% des actions étaient détenues par Planor et les 44% par Cesse Komé. Ensuite, l’Etat du Mali, sous la transition de Cheick Modibo Diarra, a décidé d’attribuer de nouveau la même licence, mais à une seule des deux parties, Planor d’Apollinaire Compaoré. Conséquence: Cesse Komé conteste, puisque ses intérêts sont lésés.
Chahana Takiou