Avec des objectifs de recettes revues à la hausse de 375 à 385 milliards Fcfa, l’administration douanière engage ses agents à appliquer les textes dans les procédures de dédouanement, pénalité comprise.
C’est une lapalissade que de dire que l’économie nationale a lourdement pâti de la crise que le pays traverse depuis 2012. Si l’heure est à la relance de l’économie, l’entreprise s’annonce difficile tant les effets de la crise se font toujours sentir sur l’activité économique. Les menaces sécuritaires qui persistent dans les Régions du nord et les griefs des institutions de Bretton Woods, ne sont pas de nature à accélérer le rythme de la reprise.
Malgré des perspectives macro-économiques qui s’annoncent récessives, notre économie montre jusqu’à présent une résilience encourageante. Toutefois, au niveau des finances publiques, une extrême prudence est de rigueur dans les dépenses, du fait de la diminution du financement extérieur liée à la suspension temporaire des décaissements de certains partenaires tels que la Banque mondiale et le Fonds monétaire international (FMI). Dans le domaine des recettes, les services de l’assiette et du recouvrement (douane, impôts, etc.) sont plus que jamais assignés à atteindre des objectifs de recouvrement croissants.
De 375 à 385 milliards de fcfa. Dans ce contexte économique difficile, les douanes sont plus que jamais sollicitées. Ainsi, au titre de l’exercice budgétaire 2014, il avait été assigné à la direction générale des douanes des objectifs initiaux de recouvrement de 375 milliards de Fcfa. Cependant dans le cadre de la loi rectificative des finances du mois de mars 2014, ces objectifs ont été revus à la hausse et portés à 385 milliards de Fcfa. A la date du 31 mai 2014, les soldats de l’économie ont réalisé 141,2 milliards de Fcfa en termes de recouvrement sur une prévision de 153,5 milliards de Fcfa pour la période, générant du coup un gap négatif de 12,3 milliards. La moyenne de réalisation mensuelle aura donc été de 28,2 milliards de Fcfa contre une prévision de 32,1 milliards Fcfa.
L’administration des douanes est donc appelée à recouvrer impérativement 243,8 milliards sur la période de mai à décembre prochain soit une prévision mensuelle de 34,8 milliards de Fcfa. Cet objectif est devenu un impératif fondamental aussi bien pour les douanes que pour le pays qui a besoin de ces ressources pour faire face à des dépenses essentielles comme le financement du fonctionnement normal de l’administration, le paiement des salaires, le financement des objectifs du gouvernement.
Pour le sous-directeur des recettes douanières, Nouhoum Sadia Camara, ce challenge mobilise aujourd’hui toutes les structures des douanes ainsi que tous les soldats de l’économie désormais invités à une révision des pratiques et méthodes d’exécution des règlementations douanières. « L’ensemble des services a été sollicité pour se mettre dans une dynamique et dans une logique nouvelles afin d’honorer le contrat de performance qui engage l’administration des douanes à réaliser pour le compte du gouvernement les recettes budgétaires assignées », indique notre interlocuteur.
Application stricte et rigoureuse des règlementations. Le patron du service des recettes souligne qu’en analysant les insuffisances notoires révélées dans l’exécution du service qui péjorent la réalisation des objectifs, il était impératif de prendre certaines dispositions. « C’est ainsi qu’il a été demandé à tous les douaniers l’application stricte et rigoureuse des règlementations douanières. Il n’y a donc ni hausse des frais de dédouanement ni de nouvelles règlementations en la matière. Il s’agit d’appliquer correctement les règlementations en vigueur », insistera le patron des recettes.
L’inspecteur des douanes précisera qu’en matière de prise en charge des marchandises par exemple, les chefs de brigades ont été invités à veiller à l’apurement systématique des T1 (document de transit national) et des manifestes créés. « A cet égard, aucune situation résiduelle ne devra demeurer au-delà de sept jours. Ce qui concourt à l’évacuation rapide des marchandises. En matière de scanning, le constat est que cette procédure a permis aux premières heures de conforter les recettes douanières et les résultats du contentieux. Aujourd’hui, ses résultats sont des moins en moins probants à cause du relâchement voire de la défection du service dans l’exploitation des résultats du scanning. Il importe donc de renforcer l’exploitation des résultats de ce scanning. Ainsi, afin d’optimiser les résultats attendus de cette procédure, les agents de la direction des renseignements et enquêtes douaniers sont invités à accentuer des contrôles de terrain et à analyser de façon méticuleuse toute la procédure. Les errements et dysfonctionnements seront sévèrement sanctionnés », a-t-il averti.
Notre interlocuteur ajoute qu’en matière d’évaluation des marchandises, les douaniers sont invités à l’application rigoureuse du Programme de vérification des importations (PVI). « Ici, l’accent est mis sur les structures de dédouanement, à mettre systématiquement en œuvre la pénalité pour défaut du respect de toutes les marchandises conteneurisées importées sans attestation de vérification (AV). La pénalité applicable, faut-il le rappeler, relève des dispositions contentieuses prévues à cet effet notamment les articles 352-alinéa 2b, 361 alinéa 6 et 354 du code des douanes qui stipule que lorsque la transaction sollicitée sera retenue par le service, il sera fait application d’une amende transactionnelle égale au moins à 30% des droits », a expliqué le douanier. Cette revitalisation de l’application stricte des règlementations, ajoute-t-il, concerne également l’application stricte des valeurs de référence à la pesée systématique des marchandises visées par l’arrêté fixant les valeurs de référence et dont l’évaluation est au poids (carreaux, tissus, etc.).
S’agissant des opérations de dédouanement en ligne, ce procédé sera réservé exclusivement aux cargaisons ne contenant qu’une seule espèce de marchandise. En outre, cette marchandise devra au préalable avoir satisfait les conditions d’inspection avant embarquement et être déclarée non suspect au scanning. « La réactivation de ces règlementations heurtent certains importateurs informels mais le souci de l’administration des douanes est d’atteindre les objectifs de recettes tout entretenant de bons rapports avec tous les acteurs de la chaîne – importateurs, commerçants, transitaires, etc. -, tant il est vrai qu’ils demeurent nos partenaires qui doivent comprendre nos missions et nos objectifs qui ne sont autres que la mobilisation accrue des ressources internes au bénéfice de notre pays. Nous les avons toujours encouragés à accomplir leurs opérations commerciales dans les bureaux de douanes compétents afin de contribuer, de manière efficace aux actions de développement à travers justement l’apport des recettes qui permettent la réalisation de certaines dépenses incompressibles de l’Etat, entre autres, les salaires et autres investissements », explique Nouhoum Sadia Camara en insistant sur le fait qu’il s’agit de réactiver les réglementations en vigueur.
Cette décision des douanes de serrer la vis sur les procédures ne va pas sans provoquer des grincements de dents chez des opérateurs économiques qui ont engagé des mouvements de protestation.
Les responsables des douanes restent fermes en expliquant que ces mesures visent surtout les douaniers qui sont sommés désormais d’appliquer de façon rigoureuse et stricte la règlementation en vigueur. Mais l’affairisme et la corruption s’étant nidifiés dans nos administrations financières, les règles de bonne pratique gêneront toujours.
D. DJIRE