BAMAKO - La demande malienne d`une intervention de troupes ouest-africaines, annoncée par un diplomate français mais non confirmée officiellement à Bamako, est perçue par des Maliens et la France
comme un pas important vers la lutte contre les islamistes occupant le nord du Mali.
Le Front uni pour la défense de la République et de la démocratie (FDR), coalition contre le coup d`Etat militaire du 22 mars au Mali, "se félicite de cette décision", annoncée quelques jours après la prise sans combats, le 1er septembre, de la ville de Douentza (région de Mopti, centre), par un des groupes jihadistes armés occupant depuis cinq mois le vaste Nord.
Le FDR exhorte "la Cédéao (Communauté économique des Etats de l`Afrique de l`Ouest), l`Union africaine et les Nations à traiter rapidement cette requête tant attendue aux fins d`intervention des forces africaines pour aider notre armée à libérer le territoire national", affirme-t-il dans un communiqué transmis à l`AFP.
Le parti Solidarité africaine pour la démocratie et l`indépendance (Sadi), membre du front anti-putsch MP22, a au contraire dénoncé la requête.
"Nous ne sommes pas pour une intervention étrangère. (...) Nous souhaitons une libération du Nord avec au centre nos forces armées, a affirmé un de ses responsables, Nouhoum Keïta.
A Abidjan, le président par intérim du Ghana, John Dramani Mahama et le président ivoirien Alassane Ouattara se sont "félicités de l`évolution de la situation politique au Mali et ils ont exprimé leur appréciation de la requête des autorités maliennes adressée à la Cédéao pour l`envoi d`une force ouest-africaine au nord du Mali", selon un communiqué commun publié à l`issue
de la rencontre entre les deux chefs d`Etat.
Pour la France, "cette demande des autorités maliennes est une étape
indispensable pour envisager l`appui international".
Mardi soir, le représentant spécial de la France pour le Sahel, Jean
Felix-Paganon, avait annoncé à Ouagadougou que le président malien de
transition Dioncounda Traoré avait requis "formellement" une intervention dans son pays des troupes de la Cédéao.
Jusqu`à mercredi après-midi, cette annonce n`avait toutefois été confirmée à Bamako par aucune source, ni à la présidence, ni dans le cabinet du Premier ministre, ni au sein du gouvernement.
"Le temps n`est plus aux querelles politiciennes mais à la libération de notre pays", a simplement confié un membre de l`entourage du Premier ministre, refusant tout autre commentaire.
Selon une source à la présidence, le secrétaire général de la présidence malienne, Baba Berthé, s`est rendu mardi à Abidjan, pour remettre un message de Dioncounda Traoré à Alassane Ouattara.
Aucune précision n`a pu être obtenue par l`AFP sur la teneur de ce message.
Radio France Internationale (RFI) a indiqué s`être procuré la lettre de M. Traoré, qui "demande un renforcement des capacités antiterroristes, par l`envoi d`un détachement de fonctionnaires de police et par l`envoi aussi d`équipements". Il sollicite également "un appui aérien et l`envoi de cinq bataillons à partir de la ligne de front qui +seront graduellement engagés pour contrôler les villes reconquises+", d`après RFI, qui en cite des extraits.
La Cédéao prépare depuis plusieurs mois le déploiement au Mali de quelque 3.300 soldats, force dont les contours demeurent flous. Elle avait précisé attendre une demande formelle de Bamako et un mandat du Conseil de sécurité de l`ONU.
Mi-août, l`armée malienne avait déjà prévenu que cette force régionale ne s`occuperait pas de la sécurité des institutions à Bamako et évoqué un "partage de rôles" concernant la reconquête du Nord. "Personne ne fera cette guerre à la place du Mali, mais les autres viendront en appui, surtout en aviation, en logistique", avait dit le patron de l`armée malienne, le colonel-major Ibrahima Dembélé.
Parallèlement à la préparation de la force, la Cédéao a entamé des
discussions avec certains des groupes armés présents à Kidal, Gao et
Tombouctou (nord) pour résoudre la crise malienne née du putsch du 22 mars, coup d`Etat ayant précipité la partition du pays.
Aujourd`hui, les islamistes extrémistes ont évincé leurs ex-alliés rebelles touareg et contrôlent tout le nord du Mali ainsi que la ville de Douentza.
Les humanitaires affirment craindre de nouveaux déplacements de populations en lien avec la prise de Douentza. Depuis mi-janvier, la crise a poussé près de 443.000 personnes à fuir leurs domiciles pour se réfugier ailleurs au Mali ou à l`étranger, selon l`ONU.