Phénomène récurent à Bamako, le lynchage des voleurs a conquis les esprits des populations. Cette pratique, selon le chef de la Brigade de recherche du 13e arrondissement, Moïse Baya, est une violation de l’article 1er de la Constitution.
Pour notre policier, nul ne doit être soumis à la torture, ni à des sévices ou traitements inhumains, cruels, dégradants ou humiliants, car tout individu, qui se rendrait coupable de tels actes, soit de sa propre initiative, soit sur instruction, peut être poursuive conformément à la loi. En revanche, dit-il, il revient à l’Etat de garantir le droit de propriété.
A Bamako, la justice populaire pour les malfrats refait surface. Cette pratique inhumaine et cruelle commence à se métastaser. A l’allure où vont les choses, nous risquons de nous retrouver dans une société où le droit sera remplacé par la brutalité et où notre raison sera remplacée par l’instinct barbare. Si ce n’est déjà le cas.
Ces actes de lynchage ne cessent de croitre dans la capitale malienne et dans certaines zones du pays consécutivement au nombre de vols et de braquages. Les populationstrouvent du reste que c’est l’unique et meilleur moyen de se rendre justice, en lieu et place de la justice.
Or, le tout 1re article de la Constitution stipule que la personne humaine est sacrée et que nul n’a le droit de porter atteinte à son intégrité. Seulement cette phrase et son sens semblent le dernier des soucis de certains Maliens.
Sauvagerie et hold-up généralisé
Cette pratique inhumaine mérite l’attention des autorités compétentes qui doivent faire respecter la loi une bonne fois pour toutes. Il n’a été et ne sera jamais question de dire qu’un voleur est un homme bien. Mais, il est à reconnaître que nous sommes avant tout des êtres humains vivants dans une société régie par des lois et des règlements.
C’est en fonction de ces lois et règlements qu’on doit se comporter vis-à-vis de son prochain. La raison dont nous disposons doit aussi nous pousser à agir de manière raisonnable devant certaines situations. En agissant en fonction de la loi qui commande de mettre les malfaiteurs à la disposition de la justice.
Pour le M. Baya, « tout prévenu est présumé innocent jusqu’à ce que sa culpabilité soit établie par la juridiction compétente. Le droit à la défense, y compris celui de se faire assister par les forces de l’ordre doit être garanti ».
Selon lui, un malfaiteur se sent beaucoup plus mal en passant le restant de ses jours dans une prison, privé de sa liberté en méditant sur son sort. Chose qui pourrait même l’inciter à redevenir un homme normal comme tous les autres. « Le malheur, c’est que n’importe qui peut être lynché aujourd’hui par ces ‘ justiciers’. Il suffit de crier ‘au voleur’ pour que les gens affluent sur les lieux sans chercher à comprendre ».
Pour l’inspecteur Boubacar Sissoko, les populations se disent quela justice est loin d’appartenir à tout le monde. « Dans plusieurs de nos investigations, elles nous informent que la justice ne fait pas son devoir et la rue se rend justice elle-même. Si nos compatriotes s’adonnent à de tels agissements, c’est tout simplement par manque de coordination avec les forces de l’ordre ».
Il revient à la justice de garantir, dans les conditions fixées par la loi, la liberté d’aller et venir, le libre choix de la résidence des populations, faisant respecter les lois.
Bréhima Sogoba