Ligne de force : L’armée malienne condamnée à se L’information a été livrée par un diplomate français, mardi 4 septembre à Ouagadougou, à sa sortie d’audience chez Blaise Compaoré, médiateur de la CEDEAO dans la crise politico-sécuritaire malienne : le président de la transition, Pr Dioncounda Traoré, a adressé au président de l’organisation sous régionale, l’Ivoirien Alassane Ouattara, la requête ouvrant la voie à l’envoi d’une force militaire ouest-africaine pour libérer le nord du Mali de l’occupation des groupes salafistes et terroristes.
La formation d’un gouvernement d’union nationale, en application de l’Accord-Cadre du 6 avril 2012, signé dans la capitale burkinabé entre la CEDEAO et l’ex-CNRDRE, était un préalable au déploiement d’une telle force. Cet exécutif de 32 membres, recrutés au sein des principales forces politiques, de la société civile et des forces de l’ordre et de sécurité, a été mis en place depuis plus de deux semaines. Mais la requête indispensable que le président Traoré est censé formuler n’avait pas suivi, faisant redouter des pressions dissuasives exercées sur lui par les militaires et les politiciens hostiles à une intervention ouest-africaine. Les premiers pour ne pas perdre la face devant l’opinion nationale, les seconds au nom d’une dignité nationale dont la préservation, selon ses tenants, requiert que ce soit l’armée malienne elle-même qui libère les régions septentrionales, l’appui de la CEDEAO ou de la communauté internationale devant se limiter à un apport en logistique.
Mais l’occupation par le MUJAO de Douentza, localité charnière entre le nord et le sud du Mali, à quelques encablures du verrou stratégique que constitue le couple Mopti-Sévaré, a brusquement changé la donne. Elle a balayé, tel un fétu de paille, les préoccupations d’amour propre ou de nature souverainiste. Cet acte, qui a surpris plus d’un observateur, dans l’atmosphère de «ni guerre ni paix»qui prévaut depuis cinq mois, peut s’analyser comme un test de la capacité de l’armée nationale à rebondir. Si aucun signe ne venait d’elle pour sortir de sa torpeur, les agresseurs pourraient s’aventurer plus loin vers le sud, faire sauter le verrou mopticien et descendre vers Ségou et, pourquoi pas, Bamako. Une fois la capitale passée sous leur contrôle sans combat, comme ce fut le cas à Tombouctou, Niafunké ou…Douentza, il ne leur resterait plus qu’à proclamer la république islamique du Mali et étendre la charia sur toute l’étendue du pays. En toute quiétude.
Ce sont 33OO hommes que la CEDEAO envisage d’envoyer au Mali. Au détour des nombreux sommets et réunions d’États-majors qui se sont déroulés sur le dossier Mali, elle a maintes fois déclaré que cette force est prête et n’attend, en plus de la requête des autorités transitoires du Mali, que le mandat du Conseil de sécurité des Nations Unies. Lequel ne devrait plus tarder après la réunion des experts militaires tenue à la mi-août à Bamako et la formation du gouvernement d’union nationale exigée par les partenaires internationaux du Mali. Le Nigéria, le Niger, la Côte d’Ivoire devraient fournir le gros des effectifs mais la quasi-totalité des Etats membres y participera. Si besoin est, l’Union Africaine fournira elle aussi des troupes comme en Somalie où sont déjà engagés des soldats ougandais, rwandais, burundais, éthiopiens etc.
L’armée malienne sera-t-elle de la partie épique qui va s’ouvrir au nord? Cela semble hautement probable. En effet, on voit mal le président de la transition actionner le levier de l’intervention des troupes de la CEDEAO sans l’accord des chefs militaires du Mali. Reste à savoir maintenant si la nécessaire mise à niveau des unités combattantes maliennes pour accroître leur efficacité sur le champ de bataille (un acquis de la réunion d’experts de Bamako) se fera concomitamment avec le déploiement de la force ouest-africaine sur le terrain ou si elle le précédera.
C’est la suite des évènements (par exemple une poussée plus hardie du MUJAO ou d’autres groupes armés vers le sud) qui élucidera cet aspect du problème.