BAMAKO (AFP) - La demande d'aide faite par Bamako à l'Afrique de l'Ouest marque une étape vers le rétablissement de l'intégrité territoriale du Mali, dont le Nord est occupé par des islamistes armés, mais la participation au combat de forces étrangères reste exclue à ce stade.
Le président malien de transition, Dioncounda Traoré, a demandé mardi à la
Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (Cédéao) son aide pour
sécuriser les institutions de transition, réorganiser l'armée et restaurer
l'intégrité territoriale du Mali.
Mais la perspective d'une reconquête militaire du nord du Mali, aux mains
de groupes islamistes depuis cinq mois, reste lointaine, Bamako ne souhaitant
pas l'intervention de forces étrangères combattantes sur son sol.
Les autorités maliennes, qui se sont fixé comme priorité absolue de
reconquérir le Nord, doivent composer avec l'armée et l'ex-junte militaire
responsable du coup d'Etat ayant renversé le président Amadou Toumani Touré
(ATT) le 22 mars. Les putschistes ont prévenu qu'une force régionale ne
devrait pas s'occuper de la sécurité à Bamako et qu'elle n'aiderait qu'en
"appui" à reprendre le Nord.
Dans son courrier, le président Dioncounda Traoré s'inscrit dans cette
ligne: il demande "un soutien et un appui aériens", des renseignements, une
aide logistique et l'envoi de cinq bataillons "à engager graduellement dans le
contrôle des villes reconquises", sans participation aux combats préalables.
Et il prend soin de préciser que "le déploiement de forces militaires
combattantes est sans objet" à Bamako, alors que la Cédéao prépare depuis
plusieurs mois le déploiement au Mali de quelque 3.300 soldats, force dont les
contours demeurent flous.
"Il ne veut pas de troupes pour faire la guerre à la place des Maliens. En
gros, il demande des moyens pour permettre aux Maliens de faire le travail",
analyse Alexis Kalambry, directeur de publication du quotidien privé malien
Les Echos.
"C'est quand même une évolution, parce que ils ont toujours dit: +On ne
fera pas de demande.+ Je pense que l'occupation de Douentza (ville du Centre)
et l'opinion qui est en émoi ont précipité la lettre. Jusque-là, aussi bien le
gouvernement que la junte se refusaient à toute démarche en direction de la
Cédéao", souligne-t-il.
Car sur le terrain, la ligne de front a bougé: le 1er septembre, le
Mouvement pour l'unicité et le jihad en Afrique de l'Ouest (Mujao), un des
groupes islamistes armés contrôlant le vaste Nord, s'est emparé sans combat de
la ville stratégique de Douentza.
Kidal, Gao et Tombouctou, les trois régions administratives composant le
nord du Mali, sont tombées il y a cinq mois aux mains du Mujao et d'autres
groupes armés, dont des rebelles touareg et jihadistes liés à Al-Qaïda. Les
islamistes ont ensuite évincé leurs ex-alliés touareg et contrôlent désormais
totalement le Nord.
Pourtant, le secrétaire général de la présidence malienne Baba Berthé, en
visite à Abidjan, a encore émis l'espoir mercredi que la négociation rende une
intervention militaire "sans objet".
"L'appel à la Cédéao était attendu, mais il a été longtemps différé, parce
qu'il divise la classe politique malienne. Il y a un nationalisme malien très
fort qui s'accorde mal avec l'idée d'une intrusion étrangère à caractère
militaire", explique Babacar Justin Ndiaye, politologue sénégalais et
spécialiste du Mali.
Pour lui, l'armée malienne est en mesure de reconquérir le nord du pays,
qu'elle a pourtant perdu presque sans combattre.
"C'est le laxisme de ATT et le sous-équipement qui ont été fatals à l'armée
malienne. Si ces deux aspects sont comblés, les soldats maliens pourront faire
l'essentiel du travail: les effectifs existent et les Maliens connaissent très
bien leur territoire", assure Babacar Justin Ndiaye.
Le président Dioncounda Traoré demande d'ailleurs à la Cédéao son aide pour
"l'acquisition de matériels militaires majeurs", alors que des armes achetées
par le régime de ATT sont bloquées depuis fin juillet en Guinée, en accord
avec la Cédéao.
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