Bamako, Bamako et des groupes armés maliens débutent lundi à Alger un difficile deuxième round de négociations pour tenter d’amener la paix dans le nord du Mali, toujours instable malgré une intervention militaire française lancée en 2013 contre les islamistes.
La première phase des discussions, en juillet à Alger, s’est achevée par la signature d’une "feuille de route des négociations".
"Cette fois-ci à Alger, les participants vont aller au fond des problèmes et, je l’espère, obtenir un pré-accord", a déclaré à l’AFP l’ancien Premier ministre malien Modibo Keïta, représentant du chef de l’Etat malien à ces négociations.
L’enjeu est essentiel pour le Mali, plongé dans une profonde crise politico-militaire depuis l’offensive lancée en janvier 2012 par la rébellion touareg du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA) dans le nord du pays.
Cette crise a été marquée par la prise de contrôle du Nord par des groupes jihadistes alliés à Al-Qaïda, qui y ont évincé le MNLA. Si ces groupes ont été délogés en grande partie par l’intervention militaire internationale lancée en janvier 2013 à l’initiative de la France - l’ex-puissance coloniale - et toujours en cours, le Nord reste secoué par des actions meurtrières.
Avant la rencontre d’Alger, les "faucons" et les "colombes" des groupes armés touareg et arabes se sont retrouvés ces derniers jours à Ouagadougou, au Burkina Faso, pour signer un document.
Ils ont ainsi scellé l’apparente unité de la plupart des mouvements armés du nord du Mali, à l’exception des groupes jihadistes, que Bamako ne considère pas comme des interlocuteurs.
Les signataires du document, dont l’AFP a obtenu copie, déclarent la "légitimité de la lutte que mène l’Azawad" - le nom qu’ils donnent à cette région nord où sont présents Touareg et Arabes - "depuis 50 ans pour jouir d’un statut spécifique conforme à ses réalités géographiques, économiques, sécuritaires, sociales et culturelles".
Dans le groupe des "faucons" figurent les hommes du MNLA, du Haut conseil pour l’unité de l’Azawad (HCUA, au sein duquel sont recyclés d’ex-jihadistes) et d’une aile du Mouvement arabe de l’Azawad (MAA), qui avaient défait en mai dernier l’armée malienne à Kidal (nord-est), fief des Touareg, lors d’une brève et violente reprise des hostilités.
Les "colombes" comptent notamment une autre aile du Mouvement arabe de l’Azawad (MAA), la Coalition du peuple de l’Azawad (CPA), qui est une dissidence du MNLA, ainsi qu’une aile des mouvements d’autodéfense "sédentaires" du nord du Mali.
- Nouvelle donne -
Depuis l’accord de Ouagadougou de juin 2013 qui a permis la tenue de l’élection présidentielle remportée par Ibrahim Boubacar Keïta en août 2013, les pourparlers piétinent et le rendez-vous d’Alger est donc crucial. Or, à mesure que les négociations durent, les relations entre les divers groupes évoluent.
"Nous constatons aujourd’hui que tous les groupes armés du nord du Mali,
qui hier s’opposaient sur le terrain, se rapprochent de plus en plus, pour
faire face à l’Etat malien. C’est une nouvelle donne dont il faut tenir
compte", explique Mamadou Samaké, politogue malien.
A côté des groupes armés, des milices tribales commencent à voir le jour sur le terrain, où se trouvent également toujours des islamistes, certes affaiblis par l’intervention française, mais qui commettent toujours des
attentats contre les forces internationales.
Outre l’Algérie, l’Union africaine (UA) et la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cédéao) feront partie des "médiateurs" des pourparlers d’Alger, tandis que l’Union européenne (UE), la France, le Niger et le Nigeria seront présents comme "facilitateurs".
Le Maroc qui, à la demande du président malien, était entré dans la ronde des nombreuses médiations, ne sera pas représenté. Mais le roi Mohamed VI areçu récemment une délégation du MNLA.
Selon des observateurs, les discussions pourraient durer de très longues semaines, le contenu du statut politique et juridique de l’"Azawad" réclamé par les groupes armés pouvant rapidement constituer un facteur de blocage.
"Le diable est dans les détails, et les groupes armés pourraient exiger qu’il soit écrit noir sur blanc un +chronogramme+ (calendrier) précis des engagements des uns et des autres", explique un diplomate africain en poste à Bamako.
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