Alors que l’épidémie continue de se propager, l’inquiétude s’est transformée en véritable psychose. Tout le continent pourrait bien en faire les frais.
En vieux renard de la politique, Macky Sall avait flairé le risque. Le 5 août, lors du sommet Afrique - États-Unis à Washington, le président sénégalais avait profité de sa présence à la tribune, juste avant Barack Obama, pour s’exprimer ainsi : "Ebola n’est pas une maladie africaine. La solidarité mondiale doit venir en soutien aux pays touchés !"
Macky Sall tentait sans doute d’éviter que tout un continent soit stigmatisé et fasse les frais de la peur - certes légitime - suscitée par le virus. Il faut croire qu’il n’a pas été entendu : mi-août, l’équipe américaine de basket-ball a annulé un déplacement très attendu au Sénégal, où aucun cas d’Ebola n’a pourtant été diagnostiqué.
Le problème, c’est que la maladie a démontré sa capacité à voyager par avion (entre le Liberia et le Nigeria) et que les autorités britanniques ont violemment tiré la sonnette d’alarme. "Ebola est une menace très grave" pour le royaume, avait déclaré, fin juillet, le secrétaire d’État aux Affaires étrangères, Philip Hammond.
Partir au plus vite. Depuis, l’inquiétude s’est transformée en panique, avec son cortège de décisions parfois irrationnelles. Par exemple, une délégation d’hommes d’affaires brésiliens a annulé un voyage à Windhoek, la capitale de la Namibie, qui se trouve pourtant à près de 5 000 kilomètres du malade le plus proche. La compagnie d’assurances thaïlandaise One Thaï est allée jusqu’à annuler le voyage de 1 500 de ses collaborateurs... en Afrique du Sud ! Quant à la compagnie sud-coréenne Korean Air, elle a suspendu tous ses vols vers le Kenya, également épargné pour l’instant.
Plus logiquement, Berlin a demandé à tous ses ressortissants présents en Guinée, au Liberia et en Sierra Leone - les pays les plus touchés - de partir au plus vite. British Airways et Emirates Airlines ont déjà cessé de desservir Conakry, Monrovia et Freetown. Air France, qui a fermé sa liaison vers le Liberia mi-juin ("pour des raisons économiques non liées à Ebola", affirme Franck Legré, son directeur pour l’Afrique), continue de voler vers Conakry et Freetown. Mais plusieurs membres d’équipage refusent désormais de travailler sur ces lignes et font circuler une pétition pour réclamer leur fermeture.
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