Selon le conseiller en coopération judiciaire de la Cour pénale internationale, Pascal Turlan, La Haye n’exclut pas un traitement diligent sur les crimes graves commis à Bamako et Kati lors de la crise politico-sécuritaire, notamment les disparitions forcées et exécutions sommaires. Seulement, suivant les procédures en vigueur, elle restera au nord jusqu’à la publication du rapport finale sur les crimes de guerre. Néanmoins un dénouement à la Blé Goudé n’est pas écarter pour l’ancien chef de la junte de Kati, le capitaine-général Amadou Haya Sanogo, soupçonné de meurtres de bérets rouges.
En marge des activités du séminaire de formation sur les théories, techniques et pratiques de traitement des crimes graves au regard des droits de l’Homme, organisé par la division des droits de l’Homme de la Mission intégrée pour la stabilité au Mali (Minusma) en collaboration avec la Cour pénale internationale et l’Organisation internationale de la Francophonie, les représentants de La Haye ont expliqué la vision de la CPI pour le Mali dans le cadre de la lutte contre l’impunité.
Pour les responsablesde l’institution, la lutte contre l’impunité est le principal objectif de la CPI. C’est pourquoi depuis le lancement des opérations de la Minusma, La Haye œuvre pour faire la lumière sur toutes les atteintes aux humains au Mali. « Nous sommes déterminés à faire triompher la justice et elle se fera avec l’accompagnement des Maliens », a déclaré M. Turlan. Avant de dire que l’urgence pour l’heure est le Nord du pays.
Des investigations judiciaires sont encours dans la zone. « Plusieurs allégations d’atteintes aux droits humains commises par les groupes islamistes armés notamment les homicides arbitraires et délibérés, les recrutements d’enfants soldats, les viol doivent être justifiées. Ainsi que des exécutions extrajudiciaires et de disparitions forcées commises par les groupes armés. Ces actes ont fait chavirer les fondements du Mali. Et nous sommes engagés là-bas », a-t-il expliqué.
Le 30 avril 2012 en mire
Pour conduire la mission à bon port, une équipe sillonnera les localités de Bamako et Kati qui était aussi en proie à une instabilité politique, suite aux événements de mars 2012 qui ont renversé le président démocratiquement élu, Amadou Toumani Touré. Le putsch militaire dirigé par les hommes de Kati, selon les responsables de la CPI, a entraîné des violations graves des droits humains.
De nombreux leaders politiques et militaires ont été arrêtés et détenus de manière arbitraire. Les violations des droits humains les plus graves commises par les acteurs du 22 mars ont été conduites par le capitaine-général Amadou Haya Sanogo. La junte, réprimant le contrecoup d’Etat de la nuit du 30 avril au 1er mai 2012, a fait disparaître une vingtaine de militaires « bérets rouges » (favorables à l’ancien président renversé).
Placé depuis novembre 2013 sous mandat de dépôt pour son rôle joué dans la disparition des militaires arrêtés, Amadou Haya Sanogo risque d’emprunter le même chemin que l’ancien président ivoirien Laurent Gbagbo et son disciple Blé Goudé. Selon M. Turlan, les indications font croire que les militaires et policiers arrêtés n’ont pas été incarcérés dans un lieu de détention officiel, mais ont été conduits au camp de Kati, siège de la junte, où ils se sont retrouvés entre les mains des militaires auxquels ils s’étaient opposés. « La Cour pénale ne fera pas la sourde oreille face à la situation. Nous allons mener des enquêtes sur les militaires bérets rouges disparus », a-t-il dit.
C’est dire que l’étau se resserre sur les leaders putschistes qui sont arrêtés pour complicité d’assassinats. Avec cette vision de la CPI, le chef des auteurs du coup d’Etat du 22 mars 2012 a peu de chance devant la peine de mort si l’on s’en tient au Code pénal malien. En effet, le complice écope de la même peine que l’auteur principal. Le capitaine-général Sanogo est même considéré le plus souvent comme le donneur d’ordre. Autrement dit, celui qui a facilité la commission des crimes. Ce qui le rend autant responsable que l’exécutant.
Et le général d’opérette Sanogo pourrait compter le reste de sa vie derrière les barreaux de La Haye.
BréhimaSogoba