Le Premier ministre Moussa Mara était à Bruxelles et à Paris ces derniers jours. Il participait à la 4e réunion de suivi de la conférence des bailleurs qui, en avril 2013, annonçait trois milliards d’euros d’aide pour la reconstruction du Mali. Le Mali a-t-il toujours la confiance de ses partenaires eu égard à récente brouille, semble-t-il, en voie de normalisation avec le FMI? Le Mali va-t-il prendre des sanctions contre les fonctionnaires et les ministres impliqués dans les malversations et les surfacturations évoquées dans les certains contrats concernés ? Comment le chef du gouvernement juge-t-il l’avancée des négociations de paix à Alger ? Ce sont là des questions auxquelles M. Mara a répondu sur RFI.
La question de savoir si les partenaires du Mali sont en train de lâcher le pays, le Premier ministre répondra par la négative. « Tous les partenaires sans aucune exception ont confirmé leur engagement, leur disponibilité « , a-t-il assuré. Il a précisé que certains partenaires sont même pressés d’avancer, puisque, dira-t-il, » ces derniers mois il y a eu la mise en parenthèse des aides budgétaires en rapport avec les incompréhensions que nous avons eues avec le Fonds monétaire. Tout cela est derrière nous maintenant « .
Pour Moussa Mara, le gouvernement est plus que jamais résolus à aller de l’avant, à faire des efforts dont certains auraient déjà été constatés en termes de transparence, de bonne gouvernance, pour que, précise-t-il, les finances publiques maliennes soient mieux gérées au bénéfice des Maliens. « Ce qui s’est passé ces trois ou quatre derniers mois pour notre pays est regrettable, mais nous avons convenu avec le Fonds monétaire d’aller de l’avant « .
Quid des sanctions demandées par le FMI comme l’une des conditions de reprise de ses décaissements? Le patron de la cité administrative dira qu’un processus est en cours. Avant d’ajouter que les rapports d’audit ont fait ressortir des insuffisances, des irrégularités. Ces rapports d’audit, tempère-t-il, doivent d’abord être partagés avec les « audités », qui doivent donner aussi leur opinion. « La version finale des rapports d’audit – nous nous sommes engagés en cela – seront publiés. Les sanctions judiciaires sont du ressort de la justice. Au niveau de l’administration, les sanctions administratives seront évaluées et toute personne dont la responsabilité aura été établie sera sanctionnée. C’est un engagement du chef de l’Etat, c’est un engagement du gouvernement que nous allons mettre en œuvre sans aucune ambiguïté ! », a-t-il souligné.
A la question de savoir qu’en tant que Premier ministre, s’il accorde toujours sa confiance à la ministre des Finances, qui dit que le FMI a violé la loi des finances dans l’affaire de l’avion présidentiel, M. Mara sera plutôt évasif. « Chaque chose en son temps. Et le chef de l’Etat, il ne faut pas l’oublier, est le maître du jeu. C’est lui qui fixe le « la » et c’est lui qui l’a clairement dit à la mission du FMI « personne au Mali n’est et ne sera au-dessus de la loi » », a-t-il expliqué.
Concernant les pourparlers de paix à Alger et la lancinante éventualité d’une fédération qui pourrait sauvegarder tout de même l’unité de l’Etat malien, Moussa Mara réfute cet argumentaire en arguant que les trois régions du Nord ne peuvent constituer une entité autonome. Pour lui, penser que Tombouctou, Kidal et Gao constituent une entité, c’est se tromper lourdement. Le nord de du Mali, à le croire, est une mosaïque de peuples, d’ethnies, de religions, de traditions, mais qui sont tous mus par une volonté commune d’être dans un même pays.
Il a donc opposé un niet catégorique à ceux qui murmurent dans les coulisses d’Alger le fédéralisme comme solution au problème du septentrion malien. « Ce refus n’est pas seulement la réponse des autorités maliennes, mais c’est la réponse même du monde ! La fédération aujourd’hui est contraire à tous les actes internationaux, toutes les résolutions des Nations unies. Discutons quel contenu nous allons donner au pouvoir des territoires. Dotons les régions d’infrastructures socio-économiques, de la sécurité nécessaire, de la possibilité de travailler avec d’autres régions, d’autres pays, pour pouvoir impulser le développement à la base. Pour nous ce sont les véritables enjeux « , a-t-il expliqué.
Moussa Mara est-il tout de même confiant pour trouver un accord de paix à Alger ? Il répondra que nous sommes au seuil de la dernière étape. » Chacun a fait son offre de paix. Les médiateurs aujourd’hui commencent les synthèses de ces offres de paix. Vers le 10 octobre, mi-octobre, on va se retrouver en Algérie où les médiateurs vont nous proposer une synthèse de ces offres de paix. Déjà on aura déjà une architecture de l’accord que nous allons discuter pour arriver à finaliser. Nous l’espérons, un accord qui puisse satisfaire toutes les parties. Nous avons bon espoir « .
A la question de savoir si une amnistie est compatible avec la recherche de justice, quand on sait que la CPI a ouvert des enquêtes sur les crimes perpétrés au Mali et notamment au nord par les groupes rebelles. En clair, la partie malienne refusera-t-elle toute amnistie dans l’accord de paix à venir ? M. Mara dira que tout accord de paix contient sa part de compromis et suppose des efforts. Le gouvernement, a-t-il ajouté, a déjà fait preuve de beaucoup de mansuétude et va continuer dans ce sens.
Au plan de la politique intérieure, concernant la volonté supposée ou avérée du parti présidentiel, le RPM de faire éjecter le Premier ministre de son fauteuil, le chef du gouvernement dira qu’il s’accroche au « soutien indéfectible du chef de l’Etat « . Et qu’il a également le soutien indéfectible du parti du président de la République. Il ne doit pour l’instant s’en tenir à ces réalités pour continuer tranquillement à travailler, à servir le Mali. En clair, le jour où il reconnaîtra que IBK ne le soutient plus et que le RPM lui a retiré sa confiance, il en tirera toutes les conséquences.
Bruno D SEGBDJI